Il est fréquent que des salariés, dirigeants et/ou associés d'une société constituent une entreprise concurrente afin de détourner la clientèle.
Or, ces actes de concurrence déloyale sont susceptibles de donner lieu à indemnisation de la société victime ainsi que de ses associés.
L'arrêt commenté illustre le fait que les modalités d'indemnisation diffèrent entre la société et l'associé victimes des préjudices subséquents.
En effet, le 29 septembre 2015, la Cour de cassation a précisé les conditions d'indemnisation d'une société et de son associé majoritaire au titre des actes de concurrence déloyale subis de la part d'anciens associés et salariés de la société qui ont développé une activité concurrente (Cour de cassation, chambre commerciale, 29 septembre 2015, N° de pourvoi: 13-27587)
En l'espèce, la société Le Vériscope et l'associé majoritaire de celle-ci se sont estimés victimes d’actes de concurrence déloyale de la part de la société Openfield créée par deux anciens salariés, dont l'un d'eux avait été cogérant-associé de la société Le Vériscope.
La société Le Vériscope a été mise en iquidation judiciaire.
Dans ce contexte, la société Le Vériscope, par le biais de son liquidateur, et l'associé majoritaire les ont tous deux assigné en paiement de dommages-intérêts.
Après avoir constaté que les agissements de la société concurrente avaient permis le détournement des principaux clients de la société Le Vériscope, les juges d'appel l'ont condamné à payer 150.000 euros de dommages-intérêts.
La cour de cassation a validé cette condamnation après avoir constaté que :
- le chiffre d’affaires et le résultat net réalisés par la société Le Vériscope démontraient sa pleine croissance avant la création de la société concurrente,
- la qualité de cogérant de la société Le Vériscope par le fondateur de la société concurrente,
- des courriels montraient qu'avant son départ l'ancien cogérant avait transféré de la messagerie professionnelle à sa messagerie personnelle de nombreux dossiers appartenant à la société, relatifs aux principaux clients,
- la rupture des relations commerciales avec un important client postérieure à la démission de l'ancien cogérant,
- la réception, par erreur, de courriels en provenance d’un fournisseur, traduisait la confusion dans l’esprit des partenaires commerciaux.
S'agissant de l'indemnisation de l'associé majoritaire, les juges d'appel avaient constaté que celui-ci justifiait d’un préjudice personnel résultant de la perte du capital social qu’il a apporté, ainsi que des revenus qu’il tirait de la société Le Vériscope en sa qualité de dirigeant.
A cet égard, les juges d'appel avaient condamné la société concurrente à payer une somme de 150.000 euros à l'associé majoritaire.
Cependant, la cour de cassation a jugé qu'il appartenait aux juges de « distinguer entre la perte des apports de M. Y..., qui n’était qu’une fraction du préjudice collectif subi par l’ensemble des créanciers, et la perte pour l’avenir des rémunérations qu’il aurait pu percevoir en tant que dirigeant social, à l’origine d’un préjudice distinct qui lui était personnel ».
Les juges ne pouvaient donc pas valablement condamné la société concurrente à indemniser l'associé majoritaire sans distinguer le préjudice collectif subi par l’ensemble des créanciers et la perte des rémunérations à venir.
En effet, l’action en responsabilité dont disposent les associés d’une société contre laquelle a été ouverte une procédure collective à l’encontre des tiers ne peut tendre qu’à la réparation d’un préjudice personnel, direct et distinct de celui subi par la collectivité des créanciers de la société.
En condamnant la société concurrente à indemniser la perte du capital social que l'associé majoritaire avait apporté et des revenus qu’il tirait de la société, la cour d’appel n'a pas caractérisé un préjudice distinct de celui subi par la collectivité des créanciers.
Il est donc fondamental pour l'associé victime d'actes de concurrence déloyale de justifier son préjudice personnel et direct afin de pouvoir prétendre obtenir une indemnisation de la part du juge.
Le recours à un avocat spécialisé en droit des affaires permettra donc d'établir juridiquement et de quantifier financièrement le montant des préjudices subis, conformément à la jurisprudence précitée.
Je suis à votre disposition pour toute information ou action.
Anthony Bem
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