Le 8 juillet 2015, la Cour de cassation a jugé qu'en l'absence de preuve de l’occupation exclusive d'un bien en indivision par l'un des époux coindivisaires, les juges ne peuvent pas condamner l'occupant au paiement d'une indemnité d'occupation (Cour de cassation, 1ère chambre civile, 8 juillet 2015, N° de pourvoi: 14-13437).
L'acquisition d’un bien immobilier durant le mariage est juridiquement traitée sous l'angle de la communauté ou de l'indivision selon que le couple est marié ou divorcé.
La communauté et l'indivision sont deux notions juridiques distinctes mais qui ont pour effet commun que le bien immobilier appartienne simultanément à deux personnes qui exercent les mêmes des droits de propriété sur celui-ci.
Or, le droit de propriété se subdivise en réalité en plusieurs droits distincts, dont celui de pouvoir librement occuper le bien immobilier.
En l'espèce, des époux ont divorcé et des difficultés sont survenues lors de la liquidation et le partage de leur communauté.
L'épouse demandait que son ex époux soit condamné à lui verser indemnité d’occupation du bien dont il était tous deux copropriétaires ou coindivisaires.
En effet, pour mémoire, l’article 815-9 alinéa 2 du Code civil dispose que l’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité.
Les juges de première instance et d'appel ont estimé que l'époux était redevable d’une indemnité d’occupation au profit de l’indivision post-communautaire pour une somme de près de 80.000 €, alors même que les pièces versées aux débats par les parties ne témoignaient pas de la jouissance exclusive du bien par l'époux.
Cependant, la cour de cassation a CASSE ET ANNULE l'arrêt d'appel en jugeant que :
« en statuant ainsi, par des motifs inopérants, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l’occupation de l’immeuble indivis par M. X... excluait celle par Mme Y..., la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».
Il en découle que les juges doivent obligatoirement rechercher si l’occupation d'un bien en indivision par un époux excluait ou non celle de l'autre.
Autrement dit, l’indemnité d’occupation n’est pas due si l’occupation du bien immobilier par un indivisaire n’exclut pas la jouissance de celui-ci par les autres indivisaires.
Pour pouvoir juger qu'un bien est à l’usage exclusif d'un indivisaire les juges doivent relever l'existence d'élément permettant d’établir l’exclusivité de cette occupation.
Selon la jurisprudence, la jouissance privative d’un bien indivis résulte de l’impossibilité de droit ou de fait pour les coindivisaires d’user de la chose.
Si tel est le cas, une indemnité doit être versée par l'occupant.
Le montant de l'indemnisation d'occupation est en principe égal à la valeur locative du bien sur la période considérée, affectée d’un correctif à la baisse en raison du caractère précaire de l’occupation.
De plus, conformément aux dispositions de l’article 815-10 du Code civil, aucune demande de paiement ne sera recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l’être.
Dans le cas d’une indivision post-communautaire, le délai de cinq ans ne court que du jour où le jugement de divorce est passé en force de chose jugée.
Ainsi, lorsque la demande a été présentée plus de cinq ans après la date à laquelle le jugement de divorce a acquis force de chose jugée, l’indemnité d’occupation due ne peut porter que sur les cinq dernières années qui précèdent la demande.
La jouissance exclusive du bien immobilier peut être prouvée notamment par des attestations, des pièces de la procédure mais aussi des actes dont les assignations en divorce et en liquidation où il peut apparaître la domiciliation à l’adresse du bien.
Toutefois, l’adresse mentionnée dans les actes de procédure ne caractérise pas en soi la jouissance du même bien à titre privatif.
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Anthony Bem
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