Le législateur a mis en place la technique de déclaration d’insaisissabilité pour éviter la saisine de certains biens de l’entrepreneur individuel par les créanciers professionnels.
L’efficacité d’une telle mesure peut s’apprécier à l’occasion d’une procédure collective.
Ainsi en est-il de l’arrêt de la cour de cassation en date du 05 avril 2016 (chambre commerciale de la cour de cassation, 05 avril 2016, N° 14-24640).
Dans cet arrêt, la chambre commerciale de la cour de cassation a adopté la solution suivant laquelle la déclaration d'insaisissabilité d'un immeuble appartenant à un débiteur en liquidation judiciaire est inopposable à un créancier titulaire d’une sûreté réelle, qui peut donc faire procéder à la saisie de l’immeuble sans autorisation du juge-commissaire.
En l’espèce, une personne après avoir fait publier une déclaration notariée d’insaisissabilité a été mise en liquidation judiciaire le 28 juin 2011.
Par la suite, elle est condamnée par un jugement du 06 janvier 2011 à payer à son créancier une certaine somme pour la mauvaise exécution, en 2008, d’un contrat.
Le 19 juin 2012, le créancier a inscrit une hypothèque judiciaire sur l’immeuble déclaré insaisissable, puis signifié au débiteur un commandement valant saisie de l’immeuble
Pour rappel, une hypothèque judiciaire est un droit réel immobilier accessoire à une créance à garantir, dans le but d’octroyer au créancier non payé à l’échéance le droit de saisir le bien immobilier.
Le 30 juin 2014, la cour d’appel de Grenoble a déclaré irrecevable la procédure de saisie immobilière et a ordonné la radiation du commandement aux fins de saisie immobilière.
En effet, la cour d’appel a estimé que :
- La circonstance que l’immeuble du débiteur ait fait l’objet, avant l’ouverture de la liquidation judiciaire, d’une déclaration d’insaisissabilité n’autorise pas le créancier hypothécaire à s’abstenir de saisir le juge-commissaire d’une demande de vente aux enchères publiques en application des dispositions de l’article L. 642-18 et R. 642-22 et suivants du code de commerce ;
- Ces articles ne peuvent en aucun cas être abrogés.
Cette décision de la cour d’appel a été censurée par la chambre commerciale de la cour de cassation, au visa des articles L. 526-1 et L. 643-2 du code de commerce, car :
- Un créancier titulaire d’une sûreté réelle, à qui la déclaration d’insaisissabilité d’un immeuble appartenant à un débiteur en liquidation judiciaire est inopposable en application de l’article L.526-1 du code de commerce, peut faire procéder à sa vente sur saisie ;
- Le créancier ne doit pas poursuivre cette procédure d’exécution dans les conditions prévues par l’article L. 643-2 du code de commerce, dans la mesure où ledit article concerne le cas où un créancier se substitue au liquidateur n’ayant pas entrepris la liquidation des biens grevés dans les trois mois de la liquidation ; Dès lors, il ne s’agit pas du cas où le liquidateur est légalement empêché d’agir par une déclaration d’insaisissabilité qui lui est opposable ;
- Le créancier peut faire procéder à la saisie de l’immeuble sans autorisation du juge-commissaire, puisqu’il n’est pas question dans ce cas d’une opération de liquidation judiciaire.
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Anthony Bem
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