Internet: accessibilité aux CGV et informations du contrat en ligne par le client "cyber-acheteur"

Publié le Modifié le 05/01/2013 Vu 3 883 fois 0
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Lors d'un achat en ligne, il est fréquent que les CGV ou les CGU soient accessibles et acceptées, au moment de la commande, par un clic pour cocher une case. Mais le 5 juillet 2012, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a fixé les nouvelles modalités d’informations que doivent respecter les sites d’e-commerce afin de communiquer et faire accepter leurs conditions générales de vente à leurs acheteurs (CJCE, troisième chambre, 5 juillet 2012, affaire C‑49/11, Content Services Ltd / Bundesarbeitskammer).

Lors d'un achat en ligne, il est fréquent que les CGV ou les CGU soient accessibles et acceptées, au moment

Internet: accessibilité aux CGV et informations du contrat en ligne par le client

 En matière de commerce en ligne, la loi pour confiance dans l'économie numérique du 21 juin 2004 (LCEN) et une directive communautaire du 20 mai 1997 (directive 97/7) ont consacré un devoir d'information des cyber-vendeurs envers les cyber-acheteurs, parties faibles dans les rapports contractuels conclus à distance.

Ce devoir d’information se concrétise par une obligation de communication des conditions générales de ventes (CGV) ou des conditions générales d’utilisation (CGU).

La finalité de la directive 97/7 est de faire bénéficier les consommateurs d’une protection étendue, en leur conférant certains droits en matière de contrats à distance et d’éviter que l’utilisation de techniques de communication à distance conduise à une diminution de l’information fournie au consommateur.

En l’espèce, la société Content Services, société à responsabilité limitée de droit anglais, exploitant une succursale à Mannheim (Allemagne), propose différents services en ligne sur son site Internet.

Par ce site, il est possible notamment de télécharger des logiciels gratuits ou des versions d’essai de logiciels payants.

Pour pouvoir utiliser ledit site, les internautes doivent remplir un formulaire d’inscription.

Lorsqu’ils passent leur commande, ces derniers doivent, en cochant une case désignée dans le formulaire, déclarer qu’ils acceptent les clauses générales de vente et qu’ils renoncent à leur droit de rétractation.

Les informations prévues aux articles 4 et 5 de la directive 97/7, en particulier celles concernant le droit de rétractation, ne sont pas directement présentées aux internautes, qui peuvent toutefois les visualiser en cliquant sur un lien figurant sur la page qu’ils remplissent pour la conclusion dudit contrat.

La conclusion d’un contrat d’abonnement avec Content Services est impossible si ladite case n’a pas été cochée.

Après avoir transmis sa commande, l’internaute concerné reçoit de Content Services un courriel comportant un renvoi à une adresse Internet, assorti d’un nom d’utilisateur et d’un mot de passe.

Ce courriel indique, en outre, à l’internaute que, après avoir communiqué le nom d’utilisateur et le mot de passe, il accédera immédiatement au contenu du site Internet et qu’il doit conserver les données relatives à l’accès à ce site dans un lieu sûr.

Ledit courriel ne comporte aucune information sur le droit de rétractation.

Les informations relatives à ce droit ne peuvent être obtenues que par un lien transmis par ce même courriel.

Par la suite, l’internaute reçoit de Content Services une facture, pour un accès aux contenus du site Internet pendant douze mois, d’un montant de 96 euros.

Cette facture rappelle que l’internaute concerné a accepté de renoncer à son droit de rétractation et qu’il n’a donc plus la possibilité de résilier le contrat d’abonnement.

La procédure au principal a été engagée par la Bundesarbeitskammer, organisation chargée de la protection des consommateurs et ayant son siège à Vienne (Autriche), qui conteste la pratique commerciale de Content Services au motif que celle-ci viole plusieurs règles du droit de l’Union et du droit national en matière de protection des consommateurs.

Content Services, qui a succombé devant le Handelsgericht Wien, a attaqué le jugement rendu par cette juridiction devant l’Oberlandesgericht Wien.

L’Oberlandesgericht Wien indique que, en l’espèce, les informations relatives au droit de rétractation ne figurent pas dans le courriel de confirmation lui-même et ne peuvent être obtenues que par un lien transmis par ce courriel.

Or, un site Internet pourrait être modifié à tout moment et, par conséquent, il ne serait pas, durablement, à la disposition du consommateur.

Estimant que l’interprétation des dispositions de la directive 97/7 est nécessaire pour trancher le litige dont il est saisi, l’Oberlandesgericht Wien a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante:

«Suffit-il, pour satisfaire lexigence posée par larticle 5, paragraphe 1, de la directive [97/7], selon laquelle un consommateur doit recevoir confirmation des informations qui y sont mentionnées sur un support durable à sa disposition et auquel il a accès, à moins que ces informations ne lui aient déjà été fournies lors de la conclusion du contrat sur un support durable à sa disposition et auquel il a accès, que cette information soit accessible au consommateur au moyen dun hyperlien sur le site Internet de lentrepreneur, qui figure dans un texte dont le consommateur doit indiquer quil en a pris connaissance en cochant une case pour pouvoir sengager dans un rapport contractuel?»

Autrement dit, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 5, paragraphe 1, de la directive 97/7 doit être interprété en ce sens qu’une pratique commerciale qui consiste à ne rendre accessibles au consommateur les informations prévues à cette disposition que par un hyperlien sur un site Internet de l’entreprise concernée satisfait aux exigences de ladite disposition.

Selon le droit de l’Union, les considérants 9, 11, 13, 14 et 22 de la directive 97/7 énoncent:

«9)      [...] le contrat à distance se caractérise par l’utilisation d’une ou de plusieurs techniques de communication à distance; [...] l’évolution permanente de ces techniques ne permet pas d’en dresser une liste exhaustive mais nécessite de définir des principes valables même pour celles qui ne sont encore que peu utilisées ; [...]

11)      [...] l’utilisation de techniques de communication à distance ne doit pas conduire à une diminution de l’information fournie au consommateur; [...] il convient donc de déterminer les informations qui doivent être obligatoirement transmises au consommateur, quelle que soit la technique de communication utilisée ; [...] 

13)      [...] l’information diffusée par certaines technologies électroniques a souvent un caractère éphémère dans la mesure où elle n’est pas reçue sur un support durable; [...] il est nécessaire que le consommateur reçoive par écrit, en temps utile, des informations nécessaires à la bonne exécution du contrat ;

14)      [...] le consommateur n’a pas la possibilité in concreto de voir le produit ou de prendre connaissance des caractéristiques du service avant la conclusion du contrat; [...] il convient de prévoir un droit de rétractation, sauf disposition contraire dans la présente directive ; [...] 

22)      [...] dans l’utilisation des nouvelles technologies, le consommateur n’a pas la maîtrise de la technique; [...] il est donc nécessaire de prévoir que la charge de la preuve peut incomber au fournisseur ».

L’article 4 de cette directive, intitulé «Informations préalables», prévoit:

« 1. En temps utile avant la conclusion de tout contrat à distance, le consommateur doit bénéficier des informations suivantes:

a)      identité du fournisseur et, dans le cas de contrats nécessitant un paiement anticipé, son adresse ;

b)      caractéristiques essentielles du bien ou du service ;

c)      prix du bien ou du service, toutes taxes comprises ;

d)      frais de livraison, le cas échéant ;

e)      modalités de paiement, de livraison ou d’exécution ;

f)      existence d’un droit de rétractation, sauf dans les cas visés à l’article 6 paragraphe 3 ;

Les informations visées au paragraphe 1 à distance utilisée, dans le respect, notamment, des principes de loyauté en matière de transactions commerciales et des principes qui régissent la protection des personnes frappées d’incapacité juridique selon leur législation nationale, telles que les mineurs [...] »

Ces informations doivent en outre apparaître sans équivoque, être fournies de manière claire et compréhensible par tout moyen adapté à la technique de communication.

Par ailleurs, l’article 5 de ladite directive, intitulé « Confirmation écrite des informations », dispose:

 «1. Le consommateur doit recevoir, par écrit ou sur un autre support durable à sa disposition et auquel il a accès, confirmation des informations mentionnées à l’article 4 paragraphe 1 points a) à f), en temps utile lors de l’exécution du contrat et au plus tard au moment de la livraison en ce qui concerne les biens non destinés à la livraison à des tiers, à moins que ces informations n’aient déjà été fournies au consommateur préalablement à la conclusion du contrat par écrit ou sur un autre support durable à sa disposition et auquel il a accès ».

L’article 6 de la directive 97/7, intitulé «Droit de rétractation», prévoit:

« 1.      Pour tout contrat à distance, le consommateur dispose d’un délai d’au moins sept jours ouvrables pour se rétracter sans pénalités et sans indication du motif [...]

3.      Sauf si les parties en ont convenu autrement, le consommateur ne peut exercer le droit de rétractation prévu au paragraphe 1 pour les contrats:

– de fourniture de services dont l’exécution a commencé, avec l’accord du consommateur, avant la fin du délai de sept jours ouvrables prévu au paragraphe 1 [...] »

La Cour de justice de l'Union européenne a relevé que les consommateurs, avant la conclusion d’un contrat à distance, ne peuvent accéder aux informations relatives, notamment, au droit de rétractation qu’en cliquant sur un lien qui renvoie à une partie du site Internet de Content Services et qu’après avoir passé leur commande, ces consommateurs reçoivent de Content Services un courriel qui ne contient aucun renseignement à l’égard de ce droit, mais dans lequel figure un lien vers le site Internet de Content Services sur lequel certaines informations concernant le droit de rétractation peuvent être obtenues.

En vertu de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 97/7, le consommateur doit recevoir, par écrit ou sur un autre support durable à sa disposition et auquel il a accès, une confirmation des informations pertinentes en temps utile, à moins que celles-ci ne lui aient été déjà fournies préalablement à la conclusion du contrat par écrit ou sur un tel autre support.

Il ressort de ladite disposition que, lorsqu’un professionnel met à la disposition du consommateur certaines informations préalablement à la conclusion du contrat, autrement que par écrit ou sur un support durable à la disposition du consommateur et auquel ce consommateur a accès, ce professionnel a l’obligation de confirmer les informations pertinentes par écrit ou sur un tel autre support.

Ainsi, « lorsque les informations qui se trouvent sur le site Internet du vendeur ne sont rendues accessibles que par un lien communiqué au consommateur, ces informations ne sont ni «fournies» à ce consommateur ni «reçues» par celui-ci, au sens de larticle 5, paragraphe 1, de la directive 97/7.

[…] il ne ressort pas du dossier que le site Internet du vendeur auquel renvoie le lien indiqué au consommateur permet à ce dernier de stocker des informations qui lui sont personnellement adressées de manière telle quil puisse y accéder et les reproduire telles quelles pendant une durée appropriée en dehors de toute possibilité de modification unilatérale de leur contenu par le vendeur ».

En réponse à la question préjudicielle, la Cour de justice de l'Union européenne a conclu que :

« une pratique commerciale qui consiste à ne rendre accessibles les informations prévues à cette disposition que par un hyperlien sur un site Internet de lentreprise concernée ne satisfait pas aux exigences de ladite disposition, dès lors que ces informations ne sont ni «fournies» par cette entreprise ni «reçues» par le consommateur, au sens de cette même disposition, et quun site Internet tel que celui en cause au principal ne peut être considéré comme un «support durable» au sens dudit article 5, paragraphe 1 ».

Il ressort de cette décision que les sites de commerce en ligne à destination du public communautaire sont dorénavant obligés d’adresser, par courriel sous format PDF, à leurs acheteurs leurs conditions générales de vente ou d’utilisation afin de pouvoir se prévaloir, le cas échéant, du respect de leur obligation d’information envers leurs clients et, par la même occasion, de leurs rendre opposables leur conditions générales.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

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Anthony Bem
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