Contrairement au chèque, la lettre de change ne peut être émise en blanc ou au porteur.
Autrement dit, le nom du bénéficiaire doit obligatoirement être mentionné sur la lettre de change.
Or, en l’absence d’une mention obligatoire, le principe est que le titre ne vaut pas lettre de change.
Néanmoins, la jurisprudence admet une possibilité de régularisation du nom du bénéficiaire.
En effet, au termes d'un arrêt du 16 juin 2009, la Cour de cassation a jugé que la lettre de change, qui ne comporte pas le nom du bénéficiaire, peut donner lieu à régularisation à la condition que celle-ci intervienne avant la présentation au paiement (Cass. Com., 16 juin 2009, n°08-14589).
En outre, lorsque certaines mentions font défaut et que le titre est nul comme lettre de change, il peut parfois être requalifié en billet à ordre.
Une telle requalification est cependant exclue en l’absence d’indication du bénéficiaire, puisque le nom du bénéficiaire est aussi une mention obligatoire du billet à ordre, de sorte que son absence est, là aussi, sanctionnée par la nullité.
Dès lors que le titre ne vaut ni comme lettre de change ni comme billet à ordre, le bénéficiaire ne saurait se prévaloir des règles spécifiques du droit cambiaire relatives à l’aval, c’est-à-dire l’engagement donné par une personne pour garantir le paiement d’une lettre de change.
Dans une telle situation, le bénéficiaire doit donc apporter la preuve d’un engagement de caution.
En l’espèce, le dirigeant d’une société a émis une lettre de change au profit d’une société X en paiement de travaux effectués par cette dernière pour le compte de sa société.
Présentée à l’encaissement, la lettre de change est revenue impayée.
La société X a alors assigné en paiement le dirigeant en sa qualité d'avaliste.
Mais, le dirigeant a fait valoir que la lettre de change était nulle, faute de mention du nom du bénéficiaire, et qu'il ne s'était jamais engagé en qualité d'avaliste : aucune mention « bon pour aval » ni aucune signature ne figurait dans la case « aval ».
Ces arguments ont été accueillis par la Cour d’appel qui a rejeté les demandes de la société X.
La Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel en retenant d’abord que le nom du bénéficiaire ayant été laissé en blanc sur le titre, il appartenait à la société X de faire la preuve, suivant le droit commun, de l'engagement de caution souscrit par le dirigeant.
Au surplus, la Cour de cassation a considéré que la signature du dirigeant, qui n'était accompagnée d'aucune autre mention, ne pouvait valoir ni comme cautionnement ni comme commencement de preuve d'un tel engagement en l'absence de tout autre élément le corroborant.
Il résulte donc de cette décision qu’il est de l’intérêt des commerçants souhaitant utiliser des effets de commerce tels que la lettre de change ou le billet à ordre de faire appel aux services d’un avocat spécialisé pour les conseiller sur le formalisme rigoureux de tels effets ainsi que sur les sanctions attachées aux éventuelles irrégularités qui pourraient les affecter.
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Anthony Bem
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