La liberté d’expression est un droit fondamental garanti par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen par la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales. Dans le milieu professionnel, que ce soit dans l’entreprise ou en dehors de celle-ci, les salariés jouissent du droit à la liberté d’expression.
Deux articles abordent cette liberté d’expression du salarié :
- L’article L. 2281-1 du Code du travail qui dispose que :
« Les salariés bénéficient d'un droit à l'expression directe et collective sur le contenu, les conditions d'exercice et l'organisation de leur travail. »
- L’article L. 2281-3 du Code du travail qui dispose que :
« Les opinions que les salariés, quelle que soit leur place dans la hiérarchie professionnelle, émettent dans l'exercice du droit d'expression ne peuvent motiver une sanction ou un licenciement. »
Néanmoins, il existe des restrictions à l’exercice de la liberté d’expression des salariés.
Ces restrictions doivent être justifiées par la tâche à accomplir du salarié et proportionnées au but recherché.
En effet, la Cour de cassation a jugé que : « L'exercice de la liberté d'expression ne peut donc constituer une faute qu'à la condition d'avoir dégénéré en abus ». (Cour de Cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2011 référence RG°09-72054).
Cet abus, déjà abordé dans l’un des articles de ce blog, est commis par le salarié lorsque celui-ci tient des propos injurieux, diffamatoires, vexatoires ou excessifs. (Cour de Cassation, Chambre sociale, 19 février 2014, référence RG°12-29.458).
Lorsque le salarié émet des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs, son licenciement est justifié par une cause réelle et sérieuse.
C’est sur ces critères que la Cour de cassation est venue ajouter une précision dans un arrêt du 23 septembre 2015 (Cour de cassation, Chambre sociale, 23 septembre 2015, 14-14021)
En l’espèce, le délégué général d’une association a été licencié pour cause réelle et sérieuse suite à des propos qu’il a tenu envers un certain nombre d'interlocuteurs internes et extérieurs de l’association.
Selon la cour d’appel de Paris, les propos tenus par le salarié caractérisaient un manquement à l’obligation de loyauté à laquelle il était tenu et un comportement en « graves contradictions avec les fonctions confiées ».
L’obligation de loyauté découle de l’obligation de bonne foi qui s’impose de manière générale dans toute relation contractuelle.
Ainsi, concrètement l’obligation de loyauté peut se traduire dans le fait de :
- ne pas exercer d’autres activités professionnelles qui concurrencent l’employeur,
- ne pas utiliser, à des fins personnelles, du matériel mis à la disposition du salarié par l’employeur,
- ne pas tenir de propos préjudiciables envers l’employeur ou l’entreprise.
Dans ce contexte, la Cour de cassation a cassé et annulé la décision de la cour d’appel car cette dernière n’a pas caractérisé « l'existence, par l'emploi de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, d'un abus dans l'exercice de la liberté d'expression dont jouit tout salarié ».
Il découle de cette décision que l’abus de la liberté d’expression du salarié doit être juridiquement caractérisé.
Pour pouvoir justifier un licenciement, les propos tenus par le salarié doivent être :
- injurieux,
- diffamatoires,
- excessifs.
Il appartient donc à l’employeur qui souhaite se séparer de l’un de ses employés de prouver le manquement à l’obligation de loyauté et le caractère abusif des propos tenus par le salarié.
Enfin, il convient de rappeler que les impressions d’écran ne valent pas preuve en cas de contentieux judiciaire.
La preuve de propos illicites tenus sur internet suppose en effet la réalisation d’un constat d’huissier spécialisé dans ce type d’acte particulier pour disposer d’une preuve irréfutable de la diffusion des propos litigieux.
A défaut, le salarié pourra contester son licenciement et demander l’indemnisation du préjudice subi contre son employeur pour licenciement abusif.
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Anthony Bem
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