Licenciement pour harcèlement moral d'un salarié qui a traité son collègue de « biloute »

Publié le 02/02/2015 Vu 5 584 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

Le licenciement d’un salarié pour avoir traité son collègue de travail de « biloute » est-il justifié ?

Le licenciement d’un salarié pour avoir traité son collègue de travail de « biloute » est-il justifié

Licenciement pour harcèlement moral d'un salarié qui a traité son collègue de « biloute »

Le 30 novembre 2005, la Cour d’appel de Douai a jugé que le licenciement d'un salarié qui traitait son collègue de travail de « biloute » était justifié car ce comportement constituait un harcèlement moral (Cour d'appel de Douai, 30 novembre 2005, n°05/2005).

En l’espèce, un salarié avait pris l’habitude de traiter un collègue de travail de « biloute ».

Or, ce dernier a perçu ce propos comme insultant et s'est estimé victime de harcèlement moral au travail.

Dans ce contexte la victime s'est plaint auprès de son supérieur hiérarchique.

Bien que l’employeur ait réitéré une demande de cesser ce type de comportement auprès de l'auteur, le salarié a persisté et a été licencié.

Celui-ci a contesté son licenciement devant le Conseil des prud'hommes.

La Cour d’appel a estimé que ce licenciement était justifié car d’une part, ce comportement a nécessité l’intervention de l’employeur causant un trouble sérieux dans l’entreprise et, d’autre part, le salarié a persisté dans son comportement en usant de cette expression injurieuse de manière répétitive (Cour d'appel de Douai, 30 novembre 2005, n°05/2005).

Pour mémoire, selon les articles L.1152-1 du code du travail et L. 222-33-2 du code pénal, les faits de harcèlement moral sont définis comme « des agissements répétés » subis par le salarié ayant « pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

Dès lors, la qualification de harcèlement moral nécessite trois conditions cumulatives :

- des agissements répétés,

- ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail,

- susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Ainsi, l’existence d'un harcèlement moral au travail suppose la preuve de la matérialité des agissements répétés pour être caractérisé.

A ce titre, le 15 avril 2008, les juges en on déduit que : « un fait unique ne peut caractériser un harcèlement moral » (Soc. 15 avr. 2008, n° 07-40.290).

Par ailleurs, le harcèlement moral peut prendre différentes formes, notamment celle de harcèlement à connotation sexuelle précisément qualifiée de harcèlement sexuel.

A cet égard, il est important de préciser que la loi n°2012-954 du 6 août 2012 a créé l’article 222-33 du code pénal pour définir et sanctionner pénalement le délit de harcèlement sexuel.

Ainsi, selon ce texte, le harcèlement sexuel est une infraction pouvant être constituée par :

- « le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante » ;

- « le fait, même non répété, d'user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers ».

En l’espèce, ce texte n’existait pas à l'époque des faits et la notion de harcèlement sexuel n’était pas définie de manière autonome par rapport à celle de harcèlement moral.

Ainsi, la Cour d’appel a d’abord estimé que le terme « biloute » ne constituait pas une insulte à caractère sexuel puisqu’il est couramment utilisé dans la région Nord-Pas-de-Calais sans cette connotation.

Toutefois, la Cour d’appel a estimé que le licenciement du salarié était justifié, compte tenu de :

- la répétition de l’utilisation de ce terme à l’égard de son collègue ;

- la nature outrageante des propos ;

- la persistance du comportement du salarié ;

- la demande contraire réitérée du supérieur hiérarchique.

En conséquence les juges ont estimé que l’ensemble de ces éléments constituait une forme de harcèlement moral d’un salarié et justifiait le licenciement du salarié qui en était l'auteur.

Par ailleurs, l’article L 1152-4 du code du travail dispose que :

« L'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

Les personnes mentionnées à l'article L. 1152-2 sont informées par tout moyen du texte de l'article 222-33-2 du code pénal. »

A ce titre, la Chambre sociale de la Cour de cassation a déclaré que : « l'employeur est tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, notamment en matière de harcèlement moral et que l'absence de faute de sa part ne peut l'exonérer de sa responsabilité » (Cass. Soc. 21 juin 2006, n°05-43914).

Dès lors, il est impératif à l’employeur d’agir sans délai si un salarié l’informe des agissements de harcèlement par un autre salarié à son encontre, sauf à aggraver sa responsabilité.

Enfin, il est important de souligner que le salarié victime d'harcèlement moral au travail n'est pas tenu de rapporter la preuve de l'existence du harcèlement en tant que tel mais simplement de faits laissant présumés qu'il existerait des faits de harcèlement.

En effet, en cas de contentieux judiciaire, la charge de la preuve est inversée et il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'il n'existe pas d'harcèlement.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris

01 40 26 25 01
abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1435 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1435 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles