Les atteintes à la vie privée d'une personne sont sanctionnées de manière générale par la loi et la jurisprudence depuis plus d'un siècle.
Le texte de référence est l'article 9 du code civil selon lequel « chacun a droit au respect de sa vie privée » (seul texte de droit connu de ma mère qui, en réponse à ses questions trop insistantes, se le voit invoquer tel un joker).
La puissance de ce texte est sans limite car il trouve à s'appliquer à chaque technologie nouvelle.
Ainsi, avec l'apparition de l'appareil photo et le développement des caméras vidéos est né le droit à l’image.
La reconnaissance du droit à l’image a accentué la tentation, pour tout individu, personne connue ou anonyme, de protéger son image personnelle, au nom du droit au respect de la vie privée.
En effet, aujourd’hui encore, le droit à l’image d'une personne est protégé sur le fondement du droit au respect à la vie privée.
Ces deux droits sont toutefois autonomes et distincts même s'ils trouvent souvent à s'appliquer ensemble au profit de la victime qui perçoit alors une double indemnisation le cas échéant.
Le droit à l'image représente ainsi un droit personnel à part entière faisant partie du patrimoine juridique de chacun, comme le droit au respect de la vie privée.
Or, ces droits dits personnels ou de la personnalité connaissent une nouvelle jeunesse avec l'évolution actuelle des technologies, des drones et de l'internet.
A titre d'exemple, s'agissant du droit de l'internet, les droits au respect de la vie privée et à l'image se manifestent au travers du droit à l'oubli et au déréférencement de contenus en ligne.
De plus, la captation d'images par Google et les drones, la géo localisation et le traitement des données à caractère personnel trouvent des limites légales grâce notamment à ces droits.
Cependant, si les contentieux se multiplient et évoluent juridiquement, il est important de se rappeler que l'application de ces droits personnels connait quelques rares exceptions :
- en cas de consentement implicite de la part de la personne concernée (1) ;
- en cas d'événement d’actualité (2).
- en cas d'activités publiques (3).
1) L'absence d'atteinte aux droits au respect de la vie privée ou à l’image en cas de consentement implicite de la part de la personne concernée
Les juges considèrent dans certaines situations qu'il existe un consentement implicite de la part de la personne à la diffusion de sa photographie ou d'une vidéo la représentant.
En effet, les juges ont déduit l'existence d'un consentement implicite lorsque les circonstances de la prise de vue rendent évident le fait que le sujet ne pouvait pas ignorer la diffusion qui allait nécessairement être faite de la photographie ou de la vidéo litigieuse.
Sur ce dernier point, il convient toutefois de relativiser la portée d'un consentement implicite de la personne concernée dans la mesure où celui-ci ne vaut que pour le contexte de publication très particulier ayant permis d'apprécier un consentement tacite.
Dans la mesure où l'appréciation du consentement implicite ressort d'une analyse aux cas par cas des contenus litigieux et des circonstances de la prise de vue, il peut difficilement être généralisé sous forme une règle absolue.
2) L'absence d'atteinte aux droits au respect de la vie privée ou à l’image en cas d'événement d’actualité
L'atteinte à la vie privée ou au droit à l’image connaît une exception lorsqu'il s'agit d'un événement d’actualité.
Ainsi, une photographie représentant une personne et illustrant un article relatant un événement d’actualité peut ne pas constituer une atteinte à la vie privée ou au droit à l’image de la personne représentée.
Progressivement, la notion d’un droit à l'information du public sur les sujets d'actualité est apparue en jurisprudence.
Ainsi, il a été jugé que le droit à l’image ne peut pas faire échec à
la diffusion d’une photographie rendue nécessaire pour les besoins de l’information.
Toutefois, il convient de souligner que cette dérogation à la protection des droits à la vie privée et à l’image n'est admis qu'à la condition que :
- le cliché soit en adéquation avec l’article qu’il illustre, c'est à dire être concrètement “en relation directe avec l’événement” et ne pas avoir été détournée.
- la photographie soit respectueuse de la dignité de la personne et non dévalorisante ou humiliante (par elle même ou sa légende d'accompagnement).
- le moment de publication de l’article et du cliché est concomitant à celui de la survenance de l'événement qu'ils sont censés illustrer, même si une republication peut en être fait pour les nécessités du droit à l’information.
- l’événement relaté soit important. L'appréciation de l'importance de l'événement est laissée à la subjectivité des juges.
Ainsi, les droits au respect de la vie privée et à l’image ne permettent pas de s'opposer systématiquement à la diffusion de clichés illustrant un événement d'actualité.
3) L'absence d'atteinte aux droits au respect de la vie privée ou à l’image dans le cadre d'activités publiques
Les droits au respect de la vie privée et à l’image ne permettent pas de s'opposer systématiquement à la diffusion de clichés.
En effet, quand ils sont pris dans le cadre d'activités publiques, les photographies, vidéos ou représentations peuvent être publiquement diffusées.
Elles sont concrètement considérées comme abandonnées juridiquement.
Il en ira notamment ainsi concernant des personnes dites publiques qui jouissent d'un traitement spécial.
Ces dernières sont considérées comme ayant tacitement accordé leur autorisation de publication de leur image par leur le seul exercice de leurs fonctions publiques.
Les juridictions ont rétrécies la notion de sphère privée des personnages publics, lesquels sont présumés renoncer à leur droit à l’image pour tout cliché pris dans le cadre de leurs activités publiques ou officielles, pour la satisfaction du besoin légitime d’information du citoyen.
Les juges appréhendent ainsi la frontière de la vie privée en fonction de la notoriété des personnes (Cour d'appel de Paris, 6 juillet 1965, Picasso c/ Calmann-Lévy)
Par conséquent, les notions d'"activité publique" et de "personne publique" ont permis de faire sortir des informations hors du domaine de la vie privée et des images hors de la protection du droit à l'image.
A cet égard, la vie professionnelle et les activités professionnelles peuvent aussi dans certains cas échapper à la vie privée.
La distinction entre le domaine privé et public de la vie d’une personne relève nécessairement d'une appréciation subjective par les juges au cas par cas.
Il est néanmoins jugé que le seul fait d'être salarié d'une société ne donne pas d'autorisation générale et absolue à l'employeur de publier des clichés représentant ses employés.
Il existe ainsi un contentieux judiciaire entre les salariés et employeurs sur l'usage de leur image comme de leur œuvre, qui intervient en général après le départ de l'employé de la société.
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Anthony Bem
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