Mandat d'arrêt européen : conditions du refus de la remise d'un français auprès d'un Etat étranger

Publié le 07/09/2012 Vu 11 333 fois 0
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Le 8 août 2012, la chambre criminelle de la Cour de cassation a refusé de procéder à la remise d'un français, interpellé en France et poursuivi en Italie pour fourniture de substances stupéfiantes en réunion, en exécution d'un mandat d'arrêt européen (Cass. Crim., 8 août 2012, n° 12-84760). Cette décision est l'occasion de rappeler les conditions de validité du mandat d'arrêt européen et les motifs légaux de refus d'exécution du mandat d'arrêt européen par les autorités françaises.

Le 8 août 2012, la chambre criminelle de la Cour de cassation a refusé de procéder à la remise d'un franç

Mandat d'arrêt européen : conditions du refus de la remise d'un français auprès d'un Etat étranger

1) La remise d'une personne recherchée conditionnée au respect des règles de forme par le mandat d'arrêt européen

Le législateur a inscrit dans le code de procédure pénale diverses conditions afin que le mandat d'arrêt européen puisse faire l'objet d'une remise par les autorités françaises.

Tout d'abord, le mandat d'arrêt européen, par ses mentions propres, doit contenir :

- l'identité et la nationalité de la personne recherchée ;

- la désignation précise et les coordonnées complètes de l'autorité judiciaire dont il émane ;

- l'indication de l'existence d'un jugement exécutoire, d'un mandat d'arrêt ou de toute autre décision judiciaire ayant la même force selon la législation de l'Etat membre d'émission ;

- la nature et la qualification juridique de l'infraction ;

- la date, le lieu et les circonstances dans lesquels l'infraction a été commise ainsi que le degré de participation à celle-ci de la personne recherchée ;

- la peine prononcée, s'il s'agit d'un jugement définitif, ou les peines prévues pour l'infraction par la loi de l'Etat membre d'émission ainsi que, dans la mesure du possible, les autres conséquences de l'infraction.

Ainsi, toutes les précisions doivent être données sur l'infraction poursuivie, sa date et sa localisation, comme sur l'implication de l'intéressé dans sa commission.

De plus, l'article 695-23 du code de procédure pénale prévoit que l'infraction reprochée doit faire l'objet d'une réciprocité présumée, c'est à dire que l'infraction présumée soit réprimée tant dans le pays étranger qu'en France.

En outre, le mandat d'arrêt européen doit être régulier et suffire à fonder la demande formée par l'autorité requérante.


2) Les motifs obligatoires et facultatifs de refus d'exécution du mandat d'arrêt européen

Les articles 695-22 et 695-24 du code de procédure pénale prévoient une liste de motifs obligatoires et facultatifs de refus d'exécution du mandat d'arrêt européen par les juges français.

L'exécution d'un mandat d'arrêt européen est refusée dans les cas suivants :

1° Si les faits pour lesquels il a été émis pouvaient être poursuivis et jugés par les juridictions françaises et que l'action publique est éteinte par l'amnistie ;

2° Si la personne recherchée a fait l'objet, par les autorités judiciaires françaises ou par celles d'un autre Etat membre que l'Etat d'émission ou par celles d'un Etat tiers, d'une décision définitive pour les mêmes faits que ceux faisant l'objet du mandat d'arrêt européen à condition, en cas de condamnation, que la peine ait été exécutée ou soit en cours d'exécution ou ne puisse plus être ramenée à exécution selon les lois de l'Etat de condamnation ;

3° Si la personne recherchée était âgée de moins de treize ans au moment des faits faisant l'objet du mandat d'arrêt européen ;

4° Si les faits pour lesquels il a été émis pouvaient être poursuivis et jugés par les juridictions françaises et que la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise ;

5° S'il est établi que ledit mandat d'arrêt a été émis dans le but de poursuivre ou de condamner une personne en raison de son sexe, de sa race, de sa religion, de son origine ethnique, de sa nationalité, de sa langue, de ses opinions politiques ou de son orientation ou identité sexuelle, ou qu'il peut être porté atteinte à la situation de cette personne pour l'une de ces raisons.

6° si le fait faisant l'objet dudit mandat d'arrêt ne constitue pas une infraction au regard de la loi française sauf si les agissements considérés sont, aux termes de la loi de l'Etat membre d'émission, punis d'une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement ou d'une mesure de sûreté privative de liberté d'une durée similaire et entrent dans l'une des catégories d'infractions suivantes :
- participation à une organisation criminelle ;
- terrorisme ;
- traite des êtres humains ;
- exploitation sexuelle des enfants et pornographie infantile ;
- trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes ;
- trafic illicite d'armes, de munitions et d'explosifs ;
- corruption ;
- fraude, y compris la fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes au sens de la convention du 26 juillet 1995 relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes,
- blanchiment du produit du crime ou du délit ;
- faux monnayage, y compris la contrefaçon de l'euro ;
- cybercriminalité ;
- crimes et délits contre l'environnement, y compris le trafic illicite d'espèces animales menacées et le trafic illicite d'espèces et d'essences végétales menacées ;
- aide à l'entrée et au séjour irréguliers ;
- homicide volontaire, coups et blessures graves ;
- trafic illicite d'organes et de tissus humains ;
- enlèvement, séquestration et prise d'otage ;
- racisme et xénophobie ;
- vols commis en bande organisée ou avec arme ;
- trafic illicite de biens culturels, y compris antiquités et oeuvres d'art ;
- escroquerie ;
- extorsion ;
- contrefaçon et piratage de produits ;
- falsification de documents administratifs et trafic de faux ;
- falsification de moyens de paiement ;
- trafic illicite de substances hormonales et autres facteurs de croissance ;
- trafic illicite de matières nucléaires et radioactives ;
- trafic de véhicules volés ;
- viol ;
- incendie volontaire ;
- crimes et délits relevant de la compétence de la Cour pénale internationale ;
- détournement d'avion ou de navire ;
- sabotage.

En outre, l'exécution d'un mandat d'arrêt européen peut être refusée :

l° Si, pour les faits faisant l'objet du mandat d'arrêt, la personne recherchée fait l'objet de poursuites devant les juridictions françaises ou si celles-ci ont décidé de ne pas engager les poursuites ou d'y mettre fin ;

2° Si la personne recherchée pour l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privatives de liberté est de nationalité française et que les autorités françaises compétentes s'engagent à faire procéder à cette exécution ;

3° Si les faits pour lesquels il a été émis ont été commis, en tout ou en partie, sur le territoire français ;

4° Si l'infraction a été commise hors du territoire de l'Etat membre d'émission et que la loi française n'autorise pas la poursuite de l'infraction lorsqu'elle est commise hors du territoire national.

Enfin, la jurisprudence refuse la remise dans le cadre d’un mandat d'arrêt européen lorsque celle-ci est susceptible d'entraîner des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

En l'espèce, les autorités judiciaires italiennes ont sollicité de la France la remise de Monsieur X, de nationalité française et interpellé en France, en exécution d'un mandat d'arrêt européen.

Dans un premier temps, la chambre d'instruction de la Cour d'appel de Lyon a ordonné sa remise aux autorités italiennes en considérant qu'aucun des motifs obligatoires de refus d'exécution du mandat d'arrêt européen précité ne pouvait être caractérisé.

Cependant, la cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt de la chambre d'instruction au motif que « l'exécution d'un mandat d'arrêt européen est refusé si les faits pour lesquels il a été émis relèvent de la compétence des juridictions françaises et si la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la législation française ».

Ainsi, conformément à l'article 695-22 4° du code de procédure pénale, les juges doivent refuser l'exécution d'un mandat d'arrêt européen si les faits pour lesquels il a été émis relèvent de la compétence des juridictions françaises et si la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la législation.

Je suis à votre disposition pour toute information ou action.

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Anthony Bem
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