En l'espèce, deux concubins avaient constitué une société civile immobilière (SCI) dont ils étaient cogérant et associés à parts égales.
Suite à la rupture de leur relation personnelle, l'ex concubin a souhaité obtenir judiciairement la dissolution de leur société.
Pour ce faire il a invoqué, d'une part, une mésentente avec son associée et, d'autre part, un défaut de gestion par cette dernière.
En effet, l'intention de collaborer et la volonté de poursuivre ensemble l’œuvre commune qui doivent obligatoirement animer les associés (l’affectio societatis) implique non seulement un esprit de collaboration mais aussi le droit, pour chaque associé, d’exercer un contrôle sur les actes des personnes chargées d’administrer la société.
Bien que l'affectio societatis soit une notion qui n’ait pas été expressément définie dans l’article 1832 du Code civil, elle est un des éléments constitutifs du contrat de société.
Autrement dit, il ne peut y a avoir de société sans affectio societatis.
Pour mémoire, l'article 1832 du code civil envisage la notion juridique de "société" comme suit :
« La société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d'affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter.
Elle peut être instituée, dans les cas prévus par la loi, par l'acte de volonté d'une seule personne.
Les associés s'engagent à contribuer aux pertes. »
Par ailleurs, la jurisprudence définie l'affectio societatis comme la volonté qu'ont les associés de « collaborer de façon effective à l’exploitation dans un intérêt commun et sur un pied d’égalité » (Cass. Com., 3 juin 1986).
Ainsi, se posait la légitime question de savoir si une mésentente personnelle entre associés, engendrant la disparition de l’affectio societatis, pouvait justifier ou non la dissolution de leur société ?
Un début de réponse se trouve dans l’article 1844-7 5° du code civil qui prévoit que la dissolution anticipée de la société peut-être prononcée judiciairement en cas « de mésentente entre associé paralysant le fonctionnement de la société ».
Un précédent jurisprudentiel a considéré que la disparition de l’affectio societatis reposant sur des difficultés uniquement d’ordre privée ne saurait suffire à obtenir la dissolution judiciaire anticipée d’une société, à moins qu’elle ne « paralyse le fonctionnement normal de la société » (Cass. Civ. I, 18 mai 1994, n°93-15.771).
Dans la droite lignée de cette décision et à la suite des juges d'appel, la cour de cassation a jugé que :
« Mais attendu qu’ayant exactement retenu que la mésentente existant entre les associés et par suite la disparition de l’affectio societatis ne pouvaient constituer un juste motif de dissolution qu’à la condition de se traduire par une paralysie du fonctionnement de la société, la cour d’appel, qui a souverainement relevé que les difficultés rencontrées n’étaient pas suffisamment graves pour paralyser le fonctionnement social, a rejeté à bon droit la demande ».
En effet, la situation de fait de cette affaire était tout de même particulière puisque les deux ex concubins étaient gérants et qu'ainsi les griefs reprochés à l'un auraient pu être couverts par l'intervention de l'autre.
Ainsi, l'un des éléments de fait pris en compte par les juges était notamment que le fonctionnement de la société n’était pas paralysé puisque l’associé, en qualité de cogérant, pouvait assurer les obligations de gestion consistant notamment dans le paiement des dettes sociales.
La paralysie de la société est donc soumise à l'appréciation des juges et dépend des chaque situation.
Il convient donc d'agir en justice, le cas échéant, en ayant préparer au préalable un dossier permettant aux juges de constater l'existence d'une paralysie de fonctionnement de la société et d'un blocage créé du fait de la mésentente entre les associés.
Je suis à votre disposition pour toute information ou action.
PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01
Email : abem@cabinetbem.com