Pour qu’une mesure d’exécution soit ordonnée, la loi prévoit que le créancier doit préalablement disposer d’un titre exécutoire, à savoir :
- soit une décision de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif qui ont force exécutoire ;
- soit les actes, les jugements étrangers et les sentences arbitrales déclarés exécutoires ;
- soit les extraits de procès-verbaux de conciliation entre les parties et homologués par le juges.
Parmi les différentes mesures d’exécutions envisageables, l’huissier de justice peut, par exemple, procéder à la saisie-conservatoire ou la saisie vente de biens mobiliers ou immobiliers.
Par ces mesures, l’huissier de justice peut mettre la main sur les biens pour se faire payer à hauteur du montant de sa créance.
Tel est le cas lorsqu’aux termes d’un jugement, un débiteur est condamné à payer une somme d’argent à un créancier.
Le 6 juillet 2017, la Cour de cassation a eu à connaitre d’une affaire relative à une locataire débitrice d’une somme d’argent, au profit de son bailleur, au titre de loyers impayés et qui a été expulsé.
En l’espèce, un huissier de justice s’était déplacé au domicile de la locataire pour procéder à la saisie-conservatoire de ses meubles.
Cependant, ayant été prévenue de la mesure de saisie-conservatoire diligentée à son encontre, la locataire avait vidé son domicile de l’ensemble des meubles et quitté les lieux.
L’huissier de justice a décidé de procéder à la reprise du logement en changeant les serrures.
Ainsi, par cette mesure, le bailleur va récupérer son local par le biais d’un huissier de justice lorsque le locataire a quitté le logement sans donner congé et sans restituer les clefs.
A cet égard, la loi du 6 juillet 1989 n°89-362 tendant à améliorer les rapports locatifs impose aux huissiers de justice de mettre en demeure le locataire de justifier qu’il occupe toujours le logement avant de dresser un procès-verbal de reprise des lieux.
A défaut, le procès-verbal de reprise des lieux de l’huissier n’est pas valable et la reprise des lieux est illicite de sorte que le locataire est en droit d’obtenir le cas échéant l’indemnisation de ses préjudices subis au titre de celle reprise illégale.
Or, en l’espèce, l’huissier de justice n’avait pas mis en demeure la locataire de justifier l’abandon de son domicile.
De plus, aucun juge n’était intervenu pour prononcer la résiliation du contrat de bail.
Le bail était donc toujours d’actualité et l’absence de la locataire ne pouvait constituer un abandon de domicile justifiant la reprise du logement par l’huissier de justice.
Dans ce contexte, la locataire a assigné l’huissier de justice en indemnisation du préjudice subi par la reprise illicite de son logement.
Les juges d’appel ont cru pouvoir débouter la locataire de sa demande indemnitaire au seul motif qu’elle ne rapportait pas la preuve de l’existence d’un préjudice pour obtenir l’indemnisation de la reprise illégale.
Néanmoins, la Cour de cassation a censuré l’arrêt d’appel et donné raison à la locataire en jugeant que :
« la seule constatation d'une reprise illicite d'un logement ouvre droit à réparation » (Cour de cassation, 1ère Chambre civile, 6 juillet 2017, n°16-15.752)
Ainsi, selon la Cour de cassation, la responsabilité de l’huissier est engagée automatiquement et de plein droit dans le cadre de la reprise illicite d’un logement, à défaut de respect du formalisme et des conditions posées par la loi précitée.
En conclusion, il est important de rappeler que l’huissier de justice est tenu de disposer d’un titre véritablement exécutoire (quant aux modalités de signification du titre au débiteur) et de respecter scrupuleusement les dispositions légales afférentes à chaque mesure d’exécution, sauf à engager sa responsabilité professionnelle le cas échéant.
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Anthony Bem
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