Toute personne qui détient des biens à l'étranger ou qui modifie son Etat de résidence devrait se poser la question des incidences de ses choix personnels ou patrimoniaux sur sa succession future.
Ainsi, le 4 juillet 2015, de nouvelles règles successorales qui ont été adoptées par le règlement européen n°650/2012 sont entrées en vigueur le 16 août 2015 et s’appliquent aux successions ouvertes depuis le 17 août 2015.
Ces nouvelles règles successorales ont pour objectif de résoudre les difficultés liées à l’enchevêtrement des législations des différents Etats présentant parfois de fortes divergences, lors du règlement de la succession d’une personne.
Jusqu’à présent, le droit international privé proposait deux systèmes pour régler les conflits juridiques entre les réglementations successorales internationales :
- la scission (le cas de la France et du Royaume-Uni principalement) où la loi applicable est celle de la dernière résidence habituelle du défunt pour les biens mobiliers et les actifs financiers tandis que, s'agissant des immeubles, la loi du pays où ils sont situés s’applique ;
- l’unité (appliquée en Allemagne, en Espagne, en Italie et au Portugal), où la loi applicable pour l’ensemble des biens est celle du dernier domicile du défunt ou bien celle de sa nationalité.
Le nouveau règlement vient remplacer ces deux anciens régimes successoraux en offrant trois nouvelles options :
- par principe, même s’il s’agit d’un Etat extérieur à l’Union Européenne (UE), la loi applicable à la totalité de la succession peut être celle de l’Etat où la personne a sa résidence habituelle au moment de son décès. La notion de résidence habituelle suppose l'existence d'un lien étroit et stable avec l’Etat concerné. Un tel lien est caractérisé par la durée et la régularité de la présence du défunt dans l’Etat concerné ainsi que les conditions et les raisons de cette présence. En cas de résidence alternée, s'appliquera la loi de l'Etat présentant « des liens manifestement plus étroits » avec le défunt en tenant compte d’indices tels que la nationalité du défunt, la localisation de sa famille et de son patrimoine ;
- par exception, lorsque la personne décède, la loi qui peut prévaloir est celle d’un autre Etat où il s’avère que la personne a manifestement entretenu des liens plus étroits ;
- par option, la personne, via une « disposition à cause de mort », peut choisir de son vivant la loi applicable d’un des Etats dont elle possède la nationalité pour régler sa succession. Cette désignation de loi applicable, qui peut être effectuée sous la forme d'un testament, permet de maintenir la même loi successorale malgré les changements successifs de résidence. Ainsi la loi applicable à la succession d'un français qui s'établit en Italie et y décède est la loi française pour autant qu'il ait établi une désignation de loi applicable. A défaut ce sera la loi italienne.
La possibilité de désignation de la loi successorale applicable est intéressante pour les personnes amenées à changer de résidence ou qui réalisent des investissements dans plusieurs Etats en ce qu’elle leur permet de choisir la loi successorale qui sera applicable à leur succession, que ce soit en fonction du lieu de leur résidence ou de celui de leurs investissements.
La possibilité de désignation de la loi successorale applicable permet aussi de faciliter le règlement de sa succession, en ce qu'elle soumet à la loi d'un même Etat à la fois son régime matrimonial, ses donations et sa succession.
Néanmoins, bien qu’il régisse tous les aspects de la succession (lieu d’ouverture, liquidation, partage, quotité disponible, réserve héréditaire, etc...), ce nouveau système successoral exclut explicitement toute application pour des raisons autres que la cause de mort telles que la donation, les régimes matrimoniaux ou encore pour des motifs fiscaux et administratifs.
De plus, dans l’hypothèse où la résidence habituelle du défunt n’est pas située dans un pays de l’UE, par dérogation au principe, il est nécessaire de préciser que les juridictions d’un Etat membre peuvent également être compétentes pour statuer sur l’ensemble de la succession de ce dernier :
- si au moins une partie de ses biens successoraux est située dans cet Etat de l’UE (cette condition étant impérative) ;
- soit dans le cas où la personne possédait la nationalité de cet Etat membre au moment de son décès ;
- soit à la condition que sa résidence habituelle antérieure se trouvait dans cet Etat membre. Toutefois, il est nécessaire que, au moment de la saisine de la juridiction compétente, il ne se soit écoulé plus de cinq ans depuis le changement de cette résidence habituelle.
Par ailleurs, une compétence dite subsidiaire est prévue pour les juridictions de l’Etat membre dans lequel se trouve une partie des biens successoraux de la personne défunte.
Concrètement, dans cette hypothèse, les juridictions ne pourront statuer que sur la succession de ces seuls biens.
De plus, un certificat successoral européen (CSE) a été créé.
Le certificat successoral européen permet aux héritiers et légataires de faire valoir dans un autre Etat membre toutes les informations utiles à leur succession telles que la légitimité de leur statut, leur quote-part ainsi que la liste des biens déterminés par la procédure successorale leur revenant de plein droit et, ce, sans aucune autre formalité.
Assimilable à un « passeport européen » de la succession, le certificat successoral européen est recevable et reconnu par tous les Etats membres et ne nécessite aucun recours en justice.
Le certificat successoral européen constitue aussi un élément de preuve pour les exécuteurs testamentaires ainsi que pour les administrateurs successoraux.
Sa délivrance se fait auprès des autorités compétentes de chaque pays de l’UE, en France : le notaire.
Pour conclure, la loi successorale pouvant être choisie, il convient de se poser la question de savoir si les dispositions prévues par la loi successorale correspondent aux objectifs poursuivis en matière de transmission du patrimoine et de protection des proches.
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Anthony Bem
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