Le législateur sanctionne donc lourdement la conduite en état d'ivresse manifeste ou sous l’empire d’un état alcoolique et laisse aux forces de l’ordre la liberté de contrôler les conducteurs susceptibles d’être sous l’empire d’un état alcoolique ou d’une ivresse manifeste.
Selon la jurisprudence de la cour de cassation, « l'ivresse manifeste est un fait matériel qui peut être constaté à l'aide du témoignage des sens sans qu'il soit nécessaire que le rapport qui l'atteste, relate à l'appui des signes particuliers » (Cour de cassation, chambre criminelle, 24 avril 1990, no 89-81.515).
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Autrement dit, l'ivresse manifeste est laissée à l’appréciation des sens.
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Même en l'absence de tout signe d'ivresse manifeste, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende :
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Le fait de conduire un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang égale ou supérieure à 0,80 gramme par litre ou par une concentration d'alcool dans l'air expiré égale ou supérieure à 0,40 milligramme par litre.
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Même en l'absence de tout signe d'ivresse manifeste, est puni d’une contravention de la quatrième classe le fait de conduire un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par :
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1° Une concentration d'alcool dans le sang égale ou supérieure à 0,20 gramme par litre ou par une concentration d'alcool dans l'air expiré égale ou supérieure à 0,10 milligramme par litre et inférieure à 0,80 gramme par litre ou par une concentration d'alcool dans l'air expiré égale ou supérieure à 0,40 milligramme par litre
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2° Une concentration d'alcool dans le sang égale ou supérieure à 0,50 gramme par litre ou par une concentration d'alcool dans l'air expiré égale ou supérieure à 0,25 milligramme par litre et inférieure à 0,80 gramme par litre ou par une concentration d'alcool dans l'air expiré égale ou supérieure à 0,40 milligramme par litre.
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Au regard des circonstances, les policiers ou les gendarmes peuvent donc présumer que le conducteur d'un véhicule est sous l'emprise de l'alcool et il leur appartient alors de lui faire subir les épreuves de dépistage d’imprégnation alcoolique à l’aide d’appareils de mesure tel que l’éthylomètre.
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L’éthylomètre est un appareil homologué qui permet d’établir la preuve de l'état alcoolique, exprimé en milligrammes par litre d'air expiré.
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La loi fixe un seuil légal autorisé à ne pas franchir, ainsi qu’une marge d’erreur maximale tolérée.
Selon un arrêté du 8 juillet 2003 relatif au contrôle des éthylomètres, les erreurs maximales tolérées applicables sont :
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- 0,032 mg/l pour les concentrations en alcool dans l'air inférieures à 0,400 mg/l ;
- 8 % de la valeur mesurée pour les concentrations égales ou supérieures à 0,400 mg/l et inférieures ou égales à 2,000 mg/l ;
- 30 % de la valeur mesurée pour les concentrations supérieures à 2,000 mg/l.
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Toutefois, pour les éthylomètres ayant fait l'objet d'un certificat d'examen de type en application des exigences prévues par les textes mentionnés à l'article 25, les erreurs maximales tolérées, en plus ou en moins, sont égales à 15 % de la concentration mesurée pour les concentrations supérieures ou égales à 1,000 mg/l et inférieures ou égales à 2,000 mg/l.
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Pour les autres concentrations mesurées, les erreurs maximales tolérées indiquées précédemment s'appliquent.
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Par ailleurs, il était communément admis que l’interprétation des mesures de la concentration d’alcool dans l’air expiré effectuées au moyen d’un éthylomètre constitue pour le juge une faculté et non une obligation (Cour de cassation, chambre criminelle, 24 juin 2009, n°09-81.119, 18 février 2015, n°14-80.828).
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Cette possibilité offerte aux juges entraînait une différence entre les individus qui doivent se soumettre à l’éthylomètre.
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Par conséquent, le principe selon lequel des personnes se trouvant dans des conditions semblables et poursuivies pour les mêmes infractions doivent être jugées selon les mêmes règles, n’était pas respecté, contrairement aux dispositions de l’article 1er partie préliminaire du Code de procédure pénale.
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De façon à y remédier, la Haute juridiction administrative impose aux Préfets l’obligation de vérifier qu’il a bien été fait application de la marge d’erreur et, le cas échéant de l’appliquer avant de prononcer une mesure de suspension de permis de conduire en raison du dépassement du taux légal d’alcool (Conseil d’État, le 14 février 2018, n°407914).
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De la même manière, le 26 mars 2019, la Cour de cassation a annulé une condamnation à défaut de prise en compte de la marge de d’erreur lors d’un dépistage d’imprégnation alcoolique positif (Cour de cassation, chambre criminelle, 26 mars 2019, n°18-94.900).
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Aux termes de cet arrêt, la Cour de cassation a posé le principe selon lequel :
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« le juge, lorsqu’il est saisi d’une infraction pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique, doit vérifier que, dans le procès-verbal qui fonde la poursuite, il a été tenu compte, pour interpréter la mesure du taux d’alcool effectuée au moyen d’un éthylomètre, des marges d’erreur maximales ».
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L’argument tenant à la marge d’erreur est donc opérant puisque le taux retenu peut varier selon la marge d’erreur réglementaire et partant de là la nature de l’infraction reprochée, à savoir un délit ou une contravention.
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Ainsi, à défaut de prise en compte de la marge d’erreur de l’éthylomètre, les personnes prévenues de conduite sous l’empire d’un état alcoolique peuvent utilement se défendre devant les juges en contestant le dépistage d’imprégnation alcoolique positif et ainsi tenter d’échapper aux sanctions.
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Anthony Bem
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