Les banques cèdent quasi systématiquement leurs créances auprès de sociétés ou d’organismes de recouvrement.
Pour cause, les banques ne sont pas des sociétés de recouvrement.
Ainsi, elles préfèrent céder leurs créances rapidement et confier à des organismes de recouvrement le soin de recouvrer le règlement de ces créances cédées.
Ces créances peuvent provenir soit de soldes débiteurs de comptes courants, soit de crédits impayés dont la déchéance du terme a été prononcée, soit enfin de décisions de justice de condamnation pécuniaire.
Elles cèdent en réalité des portefeuilles de dettes, c’est-à-dire concrètement un lot de dettes, comprenant des centaines de dettes regroupées en un lot vendu forfaitairement à un prix global aux organismes de recouvrement, avec une décote par rapport au montant de la valeur réelle de du portefeuille de dettes cédées.
En vertu de ces actes de cession de créances, les organismes de recouvrement tentent d’obtenir le paiement de la créance cédée en se retournant contre le débiteur et contre les éventuelles cautions existantes le cas échéant.
Le délai est parfois très long pour avoir des nouvelles de ces organismes de recouvrement qui jouent la montre pour faire augmenter chaque jour qui passe le montant de leur créance grâce à la capitalisation des intérêts ou l’anatocisme.
Le délai de prescription de dix ans leur permet en effet de pouvoir obtenir l’exécution de décision de justice de condamnation au terme de ce laps de temps et même de le faire renouveler d’autant par des tentatives de saisies tous les dix ans.
Ainsi, il arrive que le montant de dettes anciennes soit multiplié par deux ou par trois au bout de dix à cause de l’anatocisme.
Il est donc important pour les débiteurs et les cautions de connaitre les moyens juridiques d’être libérés du paiement de ces dettes en cas de cession de créances.
En effet, l’article L. 214-169 du Code monétaire et financier impose le respect de diverses conditions formelles pour que la cession de créances soit valablement opposable en ce qu’il dispose que :
« L'acquisition ou la cession de créances par un organisme de financement s'effectue par la seule remise d'un bordereau dont les énonciations et le support sont fixés par décret, ou par tout autre mode d'acquisition, de cession ou de transfert de droit français ou étranger. »
Ainsi, pour que la cession de créances soit opposable à un débiteur ou à sa caution, il est nécessaire qu’elle lui soit notifiée par la remise d’un bordereau de cession de créances valable.
Pour être valable, le bordereau de cession de créances doit comporter :
- la dénomination « acte de cession de créances » ;
- la désignation du cessionnaire ;
- la désignation ou l’individualisation des créances cédées ou les éléments susceptibles d’y pourvoir.
S’agissant de l’opposabilité d’une cession de créances envers la caution d’un débiteur, la Cour de cassation a jugé que l’absence de production du bordereau de cession de créances provoquait l’inopposabilité de cette cession aux tiers et donc à la caution d’un emprunteur (Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 février 2007, n°03-11.025).
A titre d’exemple, le 25 septembre 2023, le cabinet BEM a obtenu pour le compte de l’un de ses clients que le tribunal de Dijon déclare la société de recouvrement EOS FRANCE irrecevable à agir en paiement en lieu et place de la banque Crédit Agricole.
En l’espèce, la banque Crédit Agricole a prêté de l’argent à une société dont le dirigeant s’est porté caution du remboursement en cas d’incident.
La société emprunteuse ayant déposé le bilan, la banque a assigné en justice la caution afin d’obtenir sa condamnation au paiement de la dette.
En cours de procédure, la banque a cédé sa créance à la société EOS France qui a repris l’instance introduite par la banque.
Cependant, l’acte de cession de créances produit finalement aux débats par la société de recouvrement ne comportait pas la désignation ou l’individualisation des créances cédées conformément aux exigences légales.
Par conséquent, le tribunal judiciaire de Dijon a déclaré la cession de créances inopposable à la caution intervenue au profit de la société EOS France et jugé que cette dernière société ne disposait pas de qualité à agir contre la caution.
En conséquence, l’action judiciaire qui avait été initiée par la banque Crédit Agricole devant le tribunal judiciaire de Dijon n’aura finalement pas permis à la société de recouvrement d’obtenir la condamnation de la caution au paiement de la dette, grâce à la cession de créances salvatrice intervenue en cours d’instance.
Pour conclure, il convient de garder en mémoire que, lorsqu’une banque cède ses créances, c’est alors l’occasion pour les débiteurs de pouvoir tenter de remettre en cause l’exigibilité de leur dette pour non-respect des conditions de validité et d’opposabilité, de forme et fond, des actes de cession de créances.
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Anthony Bem
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