Il existe quelques sociétés spécialisées dans le rachat des dettes douteuses auprès des banques et établissements financiers.
Ainsi, les dettes irrécouvrables ou compliquées à recouvrer sont quasiment toujours cédées à des sociétés spécialisées en rachat et recouvrement de créances.
C’est ainsi que des sociétés telles que MCS ou Intrum Justitia rachètent des portefeuilles de dettes à des établissements.
Ces portefeuilles contiennent des dizaines voire des centaines de dettes rachetées à bas prix par ceux-ci.
Ainsi, le 27 avril 2021, la Cour d'appel de Poitiers, a rejeté la demande de condamnation au paiement formulée par la société intrum Justitia pour défaut de respect du formalisme de la signification de la cession de créance au débiteur principal. (Cour d’Appel de Poitiers, 27 avril 2021, n° 19/03922)
En l’espèce, la banque Crédit Mutuel a consenti à une SCI un prêt destiné à l’acquisition d’une maison d’habitation.
A la suite d’incidents de paiement, la banque a prononcé la déchéance du terme et a engagé une procédure de saisie immobilière du bien affecté hypothécairement à son profit.
L’immeuble a été adjugé mais il restait un reliquat de dette.
Déclarant venir aux droits de la banque, à la suite d’une cession de créances, la société Intrum Justitia Debt Finance, devenue société Intrum Debt Finance, a demandé à la société puis à ses associés le paiement du solde exigible du prêt.
La société Intrum a assigné en justice les associés mais le tribunal a débouté Intrum de l’ensemble de ses demandes.
En effet, les associés de la SCI ont soutenu que l’action de la société Intrum est irrecevable, faute de qualité à agir, dès lors que celle-ci ne démontre pas être cessionnaire de la créance.
La Cour d’appel rappelle à cet égard que selon les dispositions de l’article 1689 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, « dans le transport d’une créance, d’un droit ou d’une action sur un tiers, la délivrance s’opère entre le cédant et le cessionnaire par la remise du titre ».
Selon l’article 1690 ancien du code civil, le cessionnaire n’est saisi à l’égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur.
Il résulte de cet article que sont des tiers, au sens de ce texte, ceux qui, n’ayant pas été parties à l’acte de cession, ont intérêt à ce que le cédant soit encore créancier.
Ainsi, l’opposabilité de la cession de créance aux associés de la SCI était subordonnée au respect des formalités de l’article 1690 du code civil, et il était donc nécessaire d’obtenir l’acceptation de la cession par le débiteur cédé dans un acte authentique, ou de faire signifier la cession à la SCI par acte d’huissier.
Or, par contrat, la banque Crédit Mutuel a cédé à la société Intrum Justitia un portefeuille de 422 créances douteuses, qui comporte en annexe la référence, avec le nom, et en regard le montant de la dette.
Cette référence correspond à celle figurant dans l’encart 'Références’ sur l’offre préalable de prêt émise par la banque.
Par conséquent, le bordereau de cession de créance était conforme aux dispositions de l’article D 214-27 du code monétaire et financier, comportant la date de réalisation, mentionnant le montant de la créance, le nom du débiteur et la nature de la créance ainsi que la signature du cédant et du cessionnaire.
Cependant, bien que valable, la cession de créance était inopposable à la SCI.
En effet, la cession de créance n’a pas été signifiée, de sorte que la société Intrum ne peut agir en paiement à l’encontre des associés de la SCI.
La société Intrum pouvait également démontrer que la SCI, débiteur cédé, avait su et accepté la cession de créance de façon certaine et non équivoque, ou qu’un acte de procédure l’en avait informée de manière précise, que ce soit par une assignation en paiement ou par voie de conclusions.
Or, elle ne produit aucun acte susceptible de caractériser l’acceptation de la cession par la SCI.
La société Intrum a certes fait procéder à la signification de la cession de créances aux associés mais pas à la SCI qui n’a pas eu connaissance de manière précise de la cession de créance.
Dans ce contexte, la Cour d’appel a jugé que la société Intrum n’est donc pas valablement saisie de la créance, ni du droit d’agir en justice contre les associés, qui en est l’accessoire.
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Anthony Bem
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