Pour mémoire, selon le Code de procédure civile, l’Huissier de justice doit respecter des diligences particulières afin que la signification d'actes accomplie par celui-ci soit valable.
Ainsi, en principe, la signification des actes de procédure doit être effectuée à personne.
Toutefois, lorsque la personne à qui l’acte de l'huissier de justice doit être signifié n’a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connu, l’huissier peut alors établir un procès-verbal de recherches infructueuses aux termes duquel il précise les diligences qu'il a accompli pour rechercher le destinataire de l’acte.
Ce procès-verbal de recherches infructueuses est appelé "PV 659", en référence à l'article du code de procédure civile qui le prévoit.
Le 4 décembre 2014, la cour de cassation a précisé les renseignements que doit comporter le PV de recherches infructueuses (Cour de Cassation, 2ème Chambre Civile, 4 décembre 2014, pourvoi n°13-26413)
En l’espèce, une personne a été condamné à payer une somme d'argent, par jugement du tribunal de grande instance.
Le jugement était réputé contradictoire car le requis n’avait pas comparu à l'audience.
La signification de l'assignation et du jugement avait en effet été faite, en vain, à la dernière adresse connue de l’intéressé qui n’y habitait plus.
De même, l’Huissier de justice avait vainement adressé une lettre recommandée avec accusé de réception qui était revenue à son Etude avec la mention "non réclamée" et "boite non identifiable".
Les actes de signification en question ont donc été délivrés sous forme d'un procès-verbal de recherches infructueuses de la part de l’Huissier.
En effet, l'article 659 du Code de Procédure Civile prévoit que les huissiers peuvent établir un PV de recherches infructueuses quand la personne a déménagé sans laisser d'adresse et que les recherches ne permettent pas de toucher personnellement le destinataire.
Suite à la saisie-attribution de créance entre les mains d’un tiers l'intéressé a fait appel du jugement devant la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence.
Le juge de la mise en état près la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence a été saisi par le créancier d'un incident d’irrecevabilité de l'appel.
Aux termes de sa décision, le juge a considéré que la signification du jugement par l'huissier était valable car l'appelant ne justifiait nullement que le créancier connaissait l'adresse de son domicile réel ni qu’il était en mesure de le connaître aisément.
Dans la droite lignée de l'arrêt rendu par la Cour d'appel, la Cour de Cassation a jugé que :
« Mais attendu qu’ayant constaté que l’Huissier de justice avait mentionné dans le PV de recherches infructueuses qu’il s’était rendu à la dernière adresse connue de M F., qu’il avait à cette occasion recueilli des renseignements dont il résultait que ce dernier était parti sans laisser d’adresse alors que les recherches effectuées auprès de ses voisins et à la mairie étaient restées vaines et relevé que l’intéressé ne justifiait pas que la Compagnie C. connaissait son domicile réel ni qu’elle était en mesure de le connaître aisément, la Cour d’Appel en a exactement déduit que l’irrégularité de l’acte de signification n’étant pas établie, la nullité n’était pas encourue ».
Il ressort de cette décision que la validité des significations réalisées par les huissiers de justice est conditionnée à
- l'interrogation du voisinage ;
- la consultation de l’annuaire téléphonique ;
- le déplacement à la mairie pour consultation des listes électorales, à la Poste, au Commissariat, à la Gendarmerie, à l’ordre professionnel auquel appartient éventuellement l’intéressé, auprès de l’Administration fiscale, auprès du Registre du Commerce et des Sociétés, etc ;
- la recherche du lieu de travail.
Ainsi, la simple consultation du concierge de l’ancien immeuble du destinataire est insuffisante pour justifier un PV de recherches infructueuses (Cour de cassation, 2ème chambre civile, 5 juillet 2006 n°03-19032).
Malheureusement, au cas présent, le demandeur au pourvoi avait tardé à invoquer l’absence de mentions de l’Huissier sur la recherche du lieu de travail, de sorte que ce moyen de droit n'a pas pu être pris en considération.
Enfin, l'intéressé invoquait le fait que sa nouvelle adresse avait pu être trouvée ultérieurement en interrogeant le service central gestionnaire du fichier des comptes bancaires près la Banque de France, le fichier "Ficoba", lorsqu’il s’était agi de lui signifier une procédure de saisie-attribution ce qui, pour lui, traduisait des diligences insuffisantes de la part de l'huissier.
Or, la recherche via ce fichier ne peut avoir lieu que dans le cadre des opérations d’exécution avec un titre exécutoire et non au stade de la signification de la décision à exécuter.
De plus, en principe, ce fichier n'informe que sur les comptes bancaires détenus et non les adresses personnelles mises à jour de leurs détenteurs.
Au-delà du fait que la signification n'a pas pu être utilement remise en cause, cet arrêt est important en ce qu'il rappelle les démarches devant être obligatoirement réalisées par les huissiers pour conditionner la validité de leur opération.
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Anthony Bem
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