Pour mémoire, le code monétaire et financier prévoit que les prestataires de services d’investissement et les établissements bancaires ont l’obligation de s’enquérir de la situation financière de leurs clients, de leur expérience en matière d'investissement et de leurs objectifs en ce qui concerne les services demandés.
Cette obligation doit être exécutée en tenant compte de la compétence professionnelle, en matière de services d'investissement, de la personne à laquelle le service d'investissement est rendu.
Cette obligation se justifie par le fait que c’est seulement en procédant à l’évaluation de la situation financière de ses clients, de leur expérience et de leurs objectifs d’investissement, que la banque pourra leur fournir un conseil adapté.
Il s’agit ainsi de protéger la partie réputée faible en lui évitant de signer un engagement préjudiciable à ses intérêts, qu’il s’agisse d’un adhérent à une assurance-vie, d’un emprunteur ou d’une caution.
De ce fait, lorsque le banquier n’évalue pas la situation financière de son client, mais oriente son choix vers un placement qui ne correspond pas aux objectifs de son client, il doit en assumer les conséquences financières négatives et les pertes, sans pouvoir prétendre utilement que le client a été avisé des risques encourus.
En l’espèce, des époux dirigeant une société ont adhéré à un contrat d’assurance-vie souscrit par une banque auprès d’une société d’assurance en versant une prime initiale.
Suite à la dévalorisation du capital qu’ils ont investi, les époux ont assigné la banque en responsabilité et en paiement de dommages-intérêts en soutenant que la banque avait manqué à ses devoirs d'information et de mise en garde relativement à ces opérations d'investissement.
La cour d’appel a rejeté les demandes des époux en estimant qu’en raison de leurs activités professionnelles, ces derniers n'étaient pas des investisseurs profanes mais avertis, même si leurs activités ne traduisaient pas nécessairement des compétences en matière de services d'investissement.
Cependant, la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt d’appel en posant le principe selon lequel :
« le banquier qui fait souscrire à ses clients un investissement, est tenu de s'enquérir de leur situation financière, de leur expérience en matière d'investissement ainsi que de leurs objectifs en ce qui concerne les services demandés, en tenant compte de leur compétence professionnelle en matière de services d'investissement, et de leur fournir une information adaptée en fonction de cette évaluation. »
En conséquence, la Cour de cassation a censuré les juges du fond pour avoir rejeté les demandes des époux en se fondant sur « des motifs impropres à établir que la banque avait procédé, lors de la conclusion du contrat, à l'évaluation de la situation financière des époux, de leur expérience en matière d'investissement et de leurs objectifs en ce qui concernait leur adhésion au contrat litigieux, et qu'elle leur avait fourni une information adaptée en fonction de cette évaluation. »
Il résulte donc de cette décision que le banquier qui n’aurait pas procédé lors de la conclusion d’un contrat à l’évaluation de la situation financière de son client, de son expérience en matière d’investissement et de ses objectifs et ne lui aurait pas fourni une information adaptée, peut voir sa responsabilité engagée.
Les clients des banques disposent ainsi de solides moyens juridiques susceptibles de leur permettre d’obtenir l’indemnisation de leurs préjudices en cas de pertes financières résultant du manquement de la banque à son obligation de conseil et de se renseigner sur la situation financière de ses clients, de leur expérience et de leurs objectifs d’investissement.
Cet arrêt est extrêmement important en pratique car il met à la charge des prestataires de services d’investissement et des établissements bancaires une double obligation envers leur client :
- D’une part, l’obligation de se renseigner tant sur leur expérience en matière d’investissement que sur les objectifs poursuivis, qui peut se traduire par une nouvelle obligation : celle d’évalutation ;
- D’autre part, l’obligation de rapporter la preuve de la fourniture d’une « information adaptée en fonction de cette évaluation. ».
Au travers de cette jurisprudence se confirme un peu plus le courant protectionniste des clients consommateurs profanes et la tendance au durcissement des charges qui incombent aux professionnels de la banque, du crédit et des investissements.
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Anthony Bem
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