Dans le cadre des prêts professionnels, les banques sécurisent souvent le remboursement des crédits qu’elles octroient à leurs clients ; en sollicitant une garantie supplémentaire de remboursement auprès de la Banque Publique d’Investissement (ci-après BPI, anciennement OSEO).
La garantie de la BPI a été mise en place par l’Etat, afin de soutenir le développement des PME et TPE en France.
Ainsi, en cas de défaut de remboursement d’un prêt par une société emprunteuse, la banque est assurée de pouvoir efficacement recouvrer tout ou partie de sa créance auprès de la BPI ou auprès d’une « banque de financement ».
Cependant, le cas échéant les banques ont alors une obligation d’information envers les emprunteurs sur les modalités de fonctionnement de la garantie BPI ou des contre-garanties obtenues auprès d’une « banque de financement ».
En effet, les emprunteurs doivent être pleinement informés des modalités de mise en œuvre de ces garanties particulières.
Ces contre-garanties ne bénéficient en réalité qu’aux banques prêteuses et non aux sociétés emprunteuses.
Afin de pouvoir justifier d'avoir rempli leur obligation d’information, les banques doivent produire soit les conditions générales de la BPI signées par l’emprunteur, soit un document explicitant la nature et l’objet de la garantie BPI.
Or, à l’analyse des dossiers des banques, il est fréquent de constater que les conditions générales de la BPI ne sont pas signées et qu’aucun document n’explicite la nature ni l’objet de la garantie BPI.
En l’espèce, dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt de la Cour de cassation du 12 juin 2024, la banque Crédit Agricole a obtenu une garantie de la société BPI France afin de garantir le remboursement d’un prêt consenti à une société commerciale.
En raison des échéances impayées de la société, la banque a prononcé la déchéance du terme du prêt et a assigné en justice l’emprunteuse afin d’obtenir sa condamnation au paiement de l’intégralité du crédit.
Cependant, la société emprunteuse a invoqué le manquement de la banque à son obligation d’information concernant le rôle et le mécanisme de la garantie BPI, lors de la souscription du crédit.
En effet, conformément à l’article 1231-1 du code civil, la « banque dispensatrice de crédit est tenue d'une obligation d'informer l'emprunteur sur les modalités de mise en œuvre d'une garantie souscrite au profit de celle-ci. »
Autrement dit, les banques sont tenues d’informer les emprunteurs de ce que la garantie de BPI bénéficie seulement aux banques et non aux emprunteurs, quand bien même ce sont ces derniers qui payent les frais de garantie.
Le 12 juin 2024, la Cour de cassation a considéré que :
- une clause contractuelle de prêt relative aux modalités de mise en œuvre des garanties souscrites au profit de la banque n’est pas « subsidiaire » ;
- la clause contractuelle n’était pas « parfaitement claire » s’agissant des modalités de mise en œuvre des garanties souscrites au profit de la banque
- et donc que la banque dispensatrice de crédit n’a pas respecté son obligation particulière d’information envers l’emprunteur. (Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 juin 2024, pourvoi n° 23-11.630)
Cette décision impose concrètement aux banques, de fournir à leurs clients une notice d’information complète et précise sur les modalités de mise en œuvre des garanties souscrites au profit de celles-ci.
À défaut, les emprunteurs peuvent obtenir l’annulation du crédit ou la diminution de leur dette de crédit par compensation avec des dommages-intérêts au titre du manquement de la banque à son obligation d’information.
Toutefois, il convient par ailleurs de souligner que les propres notices d’information de la BPI soumises à signatures par les banques à leurs clients sont pour le moins obscures sur lesdites modalités de prise en charge de la garantie BPI ainsi que s’agissant de celles de règlement des banques par la BPI.
Ainsi, la production de telles notices par les banques ne saurait être valable, en principe et en tout état de cause, pour permettre aux banques de justifier avoir correctement rempli leur obligation d’information envers leurs clients.
Par conséquent, il convient de garder en mémoire qu’en présence d’une garantie de remboursement de prêt, telle que celle accordée par la BPI, les emprunteurs peuvent utilement tenter de mettre en jeu la responsabilité de la banque qui les poursuit en paiement pour diminuer le montant de leur dette.
En outre, la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de juger que le manquement de la banque à une telle obligation d’information constitue un dol, vice du consentement.
En effet, le 25 juin 2015, la Cour de cassation a jugé que le manquement d’une banque à une obligation précontractuelle d’information d’un client suffit à caractériser un dol, dès lors qu’un tel manquement intentionnel provoque une erreur déterminante du consentement du client. (Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 25 juin 2015, n°14-18486)
De la même manière, la Haute Cour a déjà eu l’occasion de juger qu’une caution personnelle pouvait utilement invoquer les manœuvres dolosives de la banque pour obtenir l’annulation du contrat de cautionnement à défaut d’avoir été informée sur les modalités de garantie de remboursement de prêt de la BPI. (Cour de cassation, Première chambre civile, 19 février 1974, n°73-10416 ; Cour de cassation, chambre commerciale. 7 février 1983, n° 81-15339)
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Anthony Bem
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