Le 13 mars 2024, la Cour de cassation a rappelé que les cautions sont libérées de leur cautionnement quand la banque n’a pas respecté son obligation légale de s'enquérir de la situation patrimoniale d’une caution avant la souscription du cautionnement et que celui-ci est disproportionné à ses revenus et patrimoine au jour de son engagement (Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 mars 2024, n° 22-19.900).
Les banques sollicitent de manière quasi systématique de la part des dirigeants d’entreprises qu’ils garantissent personnellement le remboursement des prêts accordés à leur société.
Cependant, les cautions disposent de nombreux arguments juridiques pour tenter de faire annuler leur cautionnement.
Par exemple, la loi prévoit que les banques et créanciers professionnels ne peuvent pas valablement se prévaloir d'un contrat de cautionnement qui serait disproportionné aux biens et revenus de la caution au jour de la conclusion de son engagement (article L. 341-4 du code de la consommation).
Le cas échéant, la disproportion d’un cautionnement entraînera l’annulation de la dette de la caution.
Or, les banques ne sont pas tenues de vérifier les déclarations fournies par la caution dans sa fiche de renseignements.
En l’espèce, la banque Crédit Mutuel a consenti à une société un crédit de trésorerie à durée indéterminée.
Afin de garantir le remboursement de ce crédit, la banque a obtenu la signature d’un cautionnement solidaire de la part du dirigeant de la société emprunteuse.
La société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné en paiement la caution.
La caution lui a opposé en défense la disproportion manifeste de son cautionnement par rapport à ses biens et revenus.
En effet, pour être opposable à la caution, la fiche de renseignements patrimoniaux doit être établie à une époque contemporaine de la conclusion du cautionnement.
La fiche ne peut donc pas être faite antérieurement ni postérieurement à la conclusion du cautionnement.
De même, la fiche de renseignements doit être dépourvue d'anomalies apparentes sur les informations déclarées par la caution.
Si la fiche ne présente pas d’anomalies apparentes, la caution ne pourra pas utilement se prévaloir contre la banque de ces anomalies pour tenter d’échapper au paiement de sa dette.
Autrement dit, la caution ne peut pas contester son engagement en invoquant que sa situation financière était en réalité moins favorable que celle déclarée dans la fiche de renseignements patrimoniaux.
Dans cette affaire, la banque a produit aux débats une fiche de renseignements de la caution relative à ses revenus et charges annuels et à son patrimoine afin de justifier de la proportionnalité du cautionnement litigieux.
Toutefois, la fiche de renseignements a été établie plus d’un mois après la conclusion du cautionnement.
La banque n’a pas respecté l’obligation légale de s'enquérir de la situation patrimoniale de la caution avant la souscription du cautionnement.
Les juges ont donc estimé que la banque ne pouvait pas valablement se prévaloir des déclarations faites par la caution dans cette fiche de renseignements pour apprécier la disproportion manifeste du cautionnement litigieux.
En conséquence, la caution a pu utilement contester cette fiche de renseignements signée postérieurement à son cautionnement et justifier de la disproportion de cet engagement, de sorte qu’elle s’est retrouvée libérée de sa dette.
Il résulte de cette affaire que les cautions disposent de nombreux moyens juridiques pour se défendre utilement contre les banques lorsque ces dernières les poursuivent en justice afin d’obtenir leur condamnation au paiement des dettes de leur entreprise.
L’analyse des documents de la banque et de la situation patrimoniale des cautions permet souvent de remettre en cause la validité des cautionnements.
Pour mémoire, contrairement aux idées reçues, on gagne contre les banques non pas parce qu’on est fort mais parce qu’elles sont faibles.
Cela sera notamment le cas lorsqu’elles ne respecteront pas les prescriptions légales et les obligations jurisprudentielles de vérification de la solvabilité des dirigeants auxquels elles demandent de se porter cautions.
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Anthony Bem
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