L'histoire du harcèlement moral est récente en droit.
Il a fallu attendre la loi du 17 janvier 2002 pour que soit créé le délit pénal de harcèlement moral.
Avant cette loi, les agents et fonctionnaires qui se trouvaient être victimes de harcèlement moral au travail de disposaient d'aucune possibilité de faire condamner pénalement l'auteur de celui-ci.
La première condamnation pénale pour harcèlement moral de la cour de cassation ne remonte qu'à un récent arrêt du 21 juin 2005.
Ces deux évolutions légale et jurisprudentielle ont consacré juridiquement la volonté de reconnaître la gravité des agissements de harcèlement moral au travail à l'encontre de victimes qui sont d'abord victimes car elles travaillent.
La jurisprudence a ainsi consacré le principe selon lequel les faits de harcèlement moral entrent dans le champ d’application de la protection que l’administration est tenue d’assurer à ses agents contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions (CE 12 mars 2010, Commune de Hoenheim, n° 308974).
L’agent qui invoque un harcèlement moral peut bénéficier de la part de l'administration de :
- une assistance juridique,
- engagement de poursuites disciplinaires à l’encontre de l’auteur du harcèlement,
- mesure d’éloignement de l'auteur du harcèlement moral (TA Nice 15 juin 2010, n° 0706362),
- rétablissement dans ses droits de l’agent victime du harcèlement,
- ne prendre aucune mesure de rétorsion contre les agents qui dénoncent les faits,
- la mise en œuvre de la protection fonctionnelle (dont la prise en charge des frais d'avocat).
S'agissant de la protection fonctionnelle, en cas de harcèlement, elle est en pratique impossible à obtenir lorsque le supérieur hiérarchique est l'auteur du harcèlement.
L’auteur du harcèlement est passible d’une sanction professionnelle, susceptible de faire l'objet d'un déplacement et de sanctions judiciaires selon que le juge saisi soit le juge administratif ou pénal.
Il convient en effet de distinguer :
- la plainte pénale pour harcèlement moral qui entraîne la condamnation de l'auteur par le tribunal correctionnel à une sanction pénale d’un an d’emprisonnement et de 15.000 € d’amende (art. 222-33-2 du code pénal) outre celle d'avoir à indemniser les préjudices subis par la victime ;
- la requête portée devant le juge administratif tendant à n'obtenir que la réparation de la victime par la mise en jeu de la responsabilité de l’administration du fait de la faute de service indépendamment de la question de savoir si la hiérarchie a directement contribué au harcèlement ou non, qu’elle ait indirectement contribué à la dégradation des conditions de travail ou qu’elle se soit abstenue d’agir face à de tels agissements.
Selon la jurisprudence constante du Conseil d'Etat, la plus haute juridiction administrative, l’administration ne peut pas valablement atténuer sa responsabilité en raison du comportement de la victime dès lors que le harcèlement est établi.
La plainte pénale n'est pas une action superficielle car elle permet d'obtenir à l'encontre de l’auteur du harcèlement moral une sanction pénale indépendamment de la sanction disciplinaire qui a été prononcée, tout en sachant que dans ce type de situation, l'administration a une curieuse tendance à déplacer le problème plutôt qu'à régler définitivement.
Je pense notamment à ce chef de service du conseil général du département de la Seine Saint Denis (93) dont l'administration avait reconnu les manquements mais que le Département à préféré muter ailleurs grâce à une formation qualifiante plutôt que de le révoquer définitivement de la fonction publique.
Bien que la justice ne soit jamais une science exacte, elle permet de croire que la cause sera entendue.
Pour conclure, il convient de garder en mémoire que l'auteur et l’administration mettent en jeu leur responsabilité du fait de la faute en lien avec le service.
La victime est ainsi en droit d’obtenir la réparation de ses préjudices subis par l'auteur du harcèlement et l'administration, en déposant une plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction et, ce, indépendamment de la sanction disciplinaire prononcée (CAA Versailles, 6 juillet 2006, n° 04VE03517).
Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).
Anthony Bem
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