Les participants de TV réalité bénéficient du droit du travail mais ne sont pas des artistes

Publié le 01/05/2013 Vu 8 474 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

Le 24 avril 2013, la Cour de cassation a jugé que les participants à une émission de télé réalité sont liés par un contrat de travail à la société de production, peu importe la dénomination donnée à leur contrat par les parties, et qu’ils ne sont pas des artistes (Cass. Civ. I, 24 avril 2013, numéros de pourvoi 11-19091 et suivants ; Erwan X et autres / société TF1 production et autres)

Le 24 avril 2013, la Cour de cassation a jugé que les participants à une émission de télé réalité sont

Les participants de TV réalité bénéficient du droit du travail mais ne sont pas des artistes

En l'espèce, Monsieur X et cinquante-deux autres personnes (les participants) ont participé au tournage du programme audiovisuel dit de « téléréalité » « L’Ile de la Tentation », saison 2003, 2004, 2005, 2006 ou 2007, produite par la société Glem, devenue TF1 production.

Le concept de l’émission L’Île de la tentation était quatre couples non mariés et non pacsés, sans enfant, testent leurs sentiments réciproques lors d’un séjour d’une durée de douze jours sur une île exotique, séjour pendant lequel ils sont filmés dans leur quotidien, notamment pendant les activités (plongée, équitation, ski nautique, voile, etc...) qu’ils partagent avec des célibataires de sexe opposé.

A l’issue de ce séjour, les participants font le point de leurs sentiments envers leur partenaire.

Il n’y a ni gagnant, ni prix.

Les participants ont saisi la juridiction prud’homale pour voir requalifier le « règlement participants » qu’ils avaient signé en contrat de travail à durée indéterminée, se voir reconnaître la qualité d’artiste-interprète et obtenir le paiement de rappels de salaire et de diverses indemnités.

Les juges d'appel ont requalifié la participation d’un candidat à une émission de télé réalité  et le contrat « règlement participants » en contrat de travail car la prestation du candidat était accomplie sous la subordination de la société TF1 production et « avait pour finalité la production d’un bien ayant une valeur économique »

La cour d'appel a donc condamné la société TF1 production au paiement de diverses sommes à titre de rappels de salaire, de dommages-intérêts pour rupture abusive et pour non-respect de la procédure de licenciement.

A titre liminaire, la cour de cassation a rappelé le principe selon lequel :

« lexistence dune relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination quelles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée lactivité des travailleurs ».

Mais surtout, la cour de cassation a validé la positon des juges d'appel en jugeant que :

« Et attendu quayant constaté quil existait entre les membres de l’équipe de production et les participants un lien de subordination caractérisé par lexistence dune « bible » prévoyant le déroulement des journées et la succession dactivités filmées imposées, de mises en scènes dûment répétées, dinterviews dirigées de telle sorte que linterviewé était conduit à dire ce qui était attendu par la production, que ce lien de subordination se manifestait encore par le choix des vêtements par la production, des horaires imposés allant jusqu’à vingt heures par jour, lobligation de vivre sur le site et limpossibilité de se livrer à des occupations personnelles, linstauration de sanctions, notamment pécuniaires en cas de départ en cours de tournage, soit, en définitive, lobligation de suivre les activités prévues et organisées par la société de production, que les participants se trouvaient dans un lien de dépendance à l’égard de la société, dès lors, séjournant à l’étranger, que leurs passeports et leurs téléphones leur avaient été retirés, que la prestation des participants à l’émission avait pour finalité la production dun bien ayant une valeur économique, la cour dappel, qui a caractérisé lexistence dune prestation de travail exécutée sous la subordination de la société TF1 production, et ayant pour objet la production dune « série télévisée », prestation consistant pour les participants, pendant un temps et dans un lieu sans rapport avec le déroulement habituel de leur vie personnelle, à prendre part à des activités imposées et à exprimer des réactions attendues, ce qui la distingue du seul enregistrement de leur vie quotidienne, et qui a souverainement retenu que le versement de la somme de 1 525 euros avait pour cause le travail exécuté, a pu en déduire que les participants étaient liés par un contrat de travail à la société de production ».

Ainsi, peu importe la dénomination donnée aux contrats des participants aux tournages d'émission de TV réalité telles que L’Île de la tentation, ces participants sont liés par un contrat de travail ce qui leur accorde des droits et une protection particulière.

De même, il importe peu que le contrat conclu par le candidat avec la production antérieurement au tournage prévoit qu’il participe au programme à des fins personnelles et non à des fins professionnelles et ne perçoit de rémunération qu’au titre d’une éventuelle exploitation commerciale ultérieure de divers attributs de sa personnalité.

Par ailleurs, les participants reprochaient aux juges d'appel de leur avoir dénié la qualité d’artiste-interprète et de les avoir débouté de leurs demandes formées sur ce fondement.

En effet, selon la cour d'appel, la qualité d’« artiste-interprète » suppose l’incarnation d’un rôle.

Or, elle a estimé que les participants à l’émission n’avaient aucun rôle à jouer ni aucun texte à dire, qu’il ne leur était demandé que d’être eux-mêmes et d’exprimer leurs réactions face aux situations auxquelles ils étaient confrontés.

Ainsi, l’article L. 212-1 du code de la propriété intellectuelle qui prévoit que l’artiste-interprète ou exécutant est la personne qui représente, chante, récite, déclame, joue ou exécute de toute autre manière une œuvre littéraire ou artistique, un numéro de variétés, de cirque ou de marionnettes ne leur était pas applicable.

L’interprétation artistique ne consiste pas simplement en un jeu d’improvisation, plus ou moins libre, guidé par une équipe de tournage, suivant un schéma narratif et une trame scénaristique imposée.

À cet égard, la cour de cassation s'est rangée du côté des juges d'appel en considérant que :

« les participants à l’émission en cause navaient aucun rôle à jouer ni aucun texte à dire, quil ne leur était demandé que d’être eux-mêmes et dexprimer leurs réactions face aux situations auxquelles ils étaient confrontés et que le caractère artificiel de ces situations et de leur enchaînement ne suffisait pas à leur donner la qualité dacteurs ; quayant ainsi fait ressortir que leur prestation nimpliquait aucune interprétation, elle a décidéà bon droit que la qualité dartiste-interprète ne pouvait leur être reconnue».

Il résulte de cette décision que les participants à une émission dite de « téléréalité » ne fournissent pas une prestation qui ait pour objet la production d’une œuvre de fiction télévisuelle et ne sont donc pas des acteurs.

Par conséquent, les participants ne peuvent pas bénéficier de rémunérations supplémentaires au titre des droits d’artistes.

Je suis à votre disposition pour toute action aux coordonnées indiquées ci-dessous ou pour répondre à vos questions en cliquant ici.

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01

Email : abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1435 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1435 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles