Pour mémoire, la période d’essai doit permettre à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, conformément aux dispositions de l’article L. 1221-20 du code du travail.
En l’espèce, M. X a été engagé en qualité de directeur d’un magasin « Champion », catégorie cadre, suivant contrat de travail à durée indéterminée prévoyant une période d'essai de six mois renouvelable une fois.
Bien que la période d'essai ait été renouvelée, l'employeur a notifié au salarié la rupture de sa période d'essai quasiment à son terme.
Selon M. X, la rupture du contrat de travail par l'employeur après l'expiration de la période d'essai devait produire les effets d'un licenciement.
M. X a don saisi la juridiction prud'homale afin d’obtenir la condamnation de son employeur à lui verser des dommages-intérêts pour rupture abusive, l’indemnité compensatrice de préavis et ses congés payés afférents.
La cour d’appel a débouté le salarié de sa demande compte tenu que la convention collective nationale du commerce de gros et de détail à prédominance alimentaire, applicable, stipule dans son article 2 de l'annexe III intitulé « cadres » que la durée normale de la période d'essai est fixée à 3 mois, sauf accord particulier entre les parties pour une durée différente pouvant atteindre 6 mois, renouvelable une fois après accord entre les parties.
Ainsi, selon les juges d’appel la durée de la période d'essai fixée dans le contrat de travail de 6 mois renouvelable est strictement conforme aux dispositions conventionnelles applicables et n'est pas excessive eu égard non seulement à la qualification professionnelle du salarié mais également à la finalité de la période d'essai qui est de permettre l'évaluation de ses compétences, de sa capacité à diriger, à prendre en main la gestion d'un magasin dans son ensemble et à "manager" l'ensemble du personnel.
La cour de cassation n’a pas été de cet avis et a cassé et annulé l’arrêt d’appel en considérant au contraire que « est déraisonnable, au regard de la finalité de la période d'essai et de l'exclusion des règles du licenciement durant cette période, une période d'essai dont la durée, renouvellement inclus, atteint un an, la cour d'appel a violé la convention internationale susvisée ».
Cette décision est fondée sur les dispositions de l'article 2-2, b) de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail qui prévoit que la durée de la période d'essai doit être fixée d'avance et être raisonnable.
Ainsi, malgré l’accord des parties sur la durée de la période d’essai, les juges s’arrogent le pouvoir de considérer que la rupture d’un salarié durant la période d’essai s’analyse en un licenciement aux torts de l’employeur lorsque cette durée est « déraisonnable », peu importe le travail dont il s’agit.
En effet, il conviendra de relever avec intérêt que le principe posé par la Haute Cour ne fait absolument pas référence à la mission de travail du salarié objet du contrat de travail, ni aux nécessités du recrutement, ni enfin à la formation ou au statut du salarié.
En outre, il convient de rappeler que l'article L.1221-19, 3° du Code du travail, issu de la loi du 25 juin 2008, prévoit que le contrat de travail à durée indéterminée peut comporter une période d'essai dont la durée maximale est, pour les cadres, de quatre mois.
L'article L.1221-21, 3° du même Code, toujours issu de la loi du 25 juin 2008, dispose que la période d'essai peut être renouvelée une fois si un accord de branche étendu le prévoit et que la durée de la période d'essai, renouvellement compris, ne peut alors dépasser huit mois pour les cadres.
Ainsi, la période de six mois renouvelable une fois pour les cadres dépassait, de façon illicite, la durée maximale de huit mois renouvellement compris prévue pour les cadres par cette loi, quand bien même cette période eut été prévue par une convention collective.
Par conséquent, la durée de l'essai devra toujours être bien inférieure à un an pour éviter toute censure de la part des juges et, en tout état de cause, être en proportion avec le temps nécessaire pour l'employeur d'éprouver un employé en fonction de sa catégorie professionnelle (Cass. Soc., 7 janvier 1992, n° 88-45393).
Je suis à votre disposition pour toute information ou action.
PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01
Email : abem@cabinetbem.com