Pour mémoire, l’article 564 du code de procédure civile dispose que :
« A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
Toutefois, l’article 565 du code de procédure civile dispose que les prétentions ne sont pas nouvelles – et sont donc pleinement recevables – dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, c’est-à-dire qu’elles visent à obtenir en faveur de celui qui les émet une satisfaction équivalente à celle à laquelle tendaient la ou les prétentions initiales.
Un débat existe sur la possibilité des parties au procès de formuler en appel des demandes nouvelles, c’est-à-dire non formulées en première instance.
Cependant, le 5 mai 2021, la Cour de cassation a jugé que les parties à un procès peuvent soumettre en appel de nouvelles prétentions pour opposer compensation. (Cass, com., 5 mai 2021, n° 19-18.016).
En l’espèce, la Banque Populaire a ouvert un compte courant au profit d’une société dont le dirigeant s’est rendu caution des engagements de la société envers la banque.
La banque a consenti à la société un prêt dont plusieurs échéances sont demeurées impayées alors que le compte courant présentait aussi un solde débiteur.
Dans ce contexte, la banque a prononcé la déchéance du terme des contrats et a assigné la société et la caution en paiement.
La caution a été condamnée en appel car la cour d’appel a, tout à la fois, considéré qu’elle n’était pas valablement saisie de la demande indemnitaire fondée sur le manquement de la banque à son devoir de mise en garde pour cause de demande nouvelle en appel et, statuant au fond, débouté la caution de ladite demande en raison de l’absence de faute de la banque et, partant, d’un tel manquement.
En effet, la caution a formé pour la première fois en cause d’appel une demande reconventionnelle tendant à voir reconnaître le manquement commis par la banque à son obligation de mise en garde, condamner celle-ci au paiement de dommages et intérêts d’un montant équivalent à la somme par elle réclamée et prononcer la compensation de sa dette avec les dommages et intérêts dus par la banque.
Autrement dit, la caution a demandé aux juges, pour la première fois en cause d’appel, de condamner la banque au paiement de dommages-intérêts d’un montant équivalent à la somme par elle réclamée et de prononcer la compensation de sa dette avec les dommages et intérêts dus par la banque.
Cependant, les juges d’appel ont estimé que la demande de la caution relative au non-respect du devoir de mise en garde par la banque était une demande nouvelle en appel et donc irrecevable.
Pour dire que cette demande est irrecevable, la cour d’appel s’est bornée à constater qu’elle n’avait pas été formée devant le premier juge, qu’elle ne tendait pas aux mêmes fins que les demandes initiales, qu’elle n’était pas virtuellement comprise dans les demandes et défenses soumises au premier juge, n’en constituant ni leur accessoire ni la conséquence ni le complément.
Néanmoins, la Cour de cassation a considéré la demande reconventionnelle de la caution afin de mettre en jeu la responsabilité de la banque tendant à obtenir compensation entre les dommages-intérêts réclamés et les sommes demandées recevable en appel même si elle est formée pour la première fois en cause d’appel.
Ainsi, la caution peut formuler de nouvelles demandes devant le juge d’appel ne tendait pas aux mêmes fins que les demandes initiales, qu’elle n’était pas virtuellement comprise dans les demandes et défenses soumises au premier juge, n’en constituant ni leur accessoire ni la conséquence ni le complément ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé a violé l'article 564 du code de procédure civile.
La Cour de cassation a néanmoins cassé et annulé l’arrêt d’appel en posant le principe selon lequel :
« la demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts formée par la caution pour manquement de la banque à son obligation de mise en garde était recevable en appel comme tendant à opposer compensation à concurrence du montant auquel elle pouvait être condamnée au titre de la demande en paiement présentée par la banque ».
Il résulte de cette décision que les personnes poursuivies en qualité de caution par leur banque peuvent utilement demander pour la première fois aux juges d’appel de constater par exemple le non-respect du devoir de mise en garde par cette dernière et de condamner la banque de ce chef.
Le cas échéant, les cautions pourront obtenir la condamnation de la banque au paiement de dommages-intérêts, même si cette demande constitue une demande nouvelle formulée pour la première fois en appel.
En tout état de cause, il résulte de cette affaire que la demande reconventionnelle en responsabilité tendant à obtenir une compensation entre les dommages-intérêts réclamés et les sommes demandées à titre principal est recevable en appel.
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Anthony Bem
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