Pour mémoire, les ordonnances, les jugements et les arrêts sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.
L’exécution provisoire est ainsi le droit pour le vainqueur d’un procès de pouvoir faire exécuter la décision de justice rendue en sa faveur alors même qu'elle fait l'objet d'un recours.
Or, les personnes qui se sont portées cautions du remboursement d’un prêt ou d’une dette peuvent être condamnées, en tant sur garant, au payement de sommes qui peuvent être très importantes.
Les effets des décisions de justice rendue en première instance ne sont donc pas suspendus par un appel lorsqu’elles sont assorties de l’exécution provisoire.
Or, les cautions peuvent ne pas être en mesure de pouvoir payer leur condamnation de sorte que leur recours en appel est jugé irrecevable.
Néanmoins, le 15 avril 2021, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a jugé que la caution pouvait ne pas payer sa condamnation de première instance en appel même si le jugement est assorti de l’exécution provisoire, eu égard aux conséquences manifestement excessives entraînées par l’exécution de cette condamnation (Cour d’appel d’Aix-en-Provence, Chambre 3-3, N° RG 20/02419 ).
En l’espèce, un tribunal a condamné solidairement les deux cautions s’une SCI à payer à la Banque Populaire la dette de celle-ci.
Compte tenu que la condamnation de première instance était assortie de l’exécution provisoire, la Banque a saisi le conseiller de la mise en état aux fins de, au visa de l’article 524 du code de procédure civile, radiation du rôle de l’affaire.
La radiation du rôle de l’affaire n’est pas une sanction mais une simple mesure administrative provisoire tendant à sortir le dossier de la liste des affaires en cours.
Au bout de deux ans sans action, paiement ni remise au rôle de l’affaire, celle-ci sera définitivement clôturée (on parle alors de péremption de l’instance).
Pour s’opposer à la demande de radiation du rôle de l’affaire présentée par la banque, les cautions ont fait valoir qu’ils sont dans l’impossibilité matérielle et financière d’exécuter le jugement entrepris.
Pour cause, ils habitent tous les deux un pavillon qui a fait l’objet d’une vente sur adjudication et dont ils sont désormais expulsés.
Ils ont l’un et l’autre des revenus modestes, et cherchent actuellement à se reloger sans avoir pu trouver de solution.
Les cautions ajoutaient que l’exécution aurait des conséquences manifestement excessives« puisque la créance de la banque fixée sur sa demande non contredite en première instance faute de comparution des défendeurs dûment cités ne tient pas compte du produit de la vente du bien immobilier lequel doit s’imputer en déduction et de façon non négligeable sur le montant de la créance, la vente sur adjudication après surenchère ».
Pour ce faire, les juges tiennent compte concrètement de la situation financière personnelle des débiteurs et du montant des condamnations prononcées.
Dans ces conditions, la Banque a été déboutée de sa demande tendant à voir prononcer la radiation du rôle de l’affaire.
Il résulte de cet arrêt que les cautions ou débiteurs peuvent utilement faire suspendre leur condamnation de première instance auprès du première président de la cour d’appel, pendant le temps de la procédure d’appel et ainsi de se défendre utilement pour tenter de faire annuler leur dette par la Cour d’appel.
Cette jurisprudence s’inscrit dans la continuité de l’arrêt du 3 février 2021 du premier Président de la cour d’appel de Paris qui a ordonné la suspension de l’exécution provisoire d’un jugement compte tenu de la situation personnelle obérée de chacun des cautions et des conséquences manifestement excessives que risque d’entraîner l’exécution de la décision de condamnation de première instance (Cour d’appel de Paris, pôle 1 - ch. 5, 3 févr. 2021, n° 20/14642).
Ces décisions permettent de considérer qu’en cas de condamnation dont le montant est équivalent ou supérieur au revenu annuel perçu par le foyer du débiteur, ce dernier pourra utilement invoquer l’existence de conséquences manifestement excessives pour solliciter la suspension de sa condamnation durant le temps de l’appel.
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Anthony Bem
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