La présence indispensable de l’avocat en garde à vue

Publié le 18/11/2022 Vu 4 879 fois 0
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Pourquoi l’intervention de l’avocat est-elle indispensable dans le cadre d’une mesure de garde à vue ?

Pourquoi l’intervention de l’avocat est-elle indispensable dans le cadre d’une mesure de garde à vue ?

La présence indispensable de l’avocat en garde à vue

Il résulte de la combinaison des articles 63-1 et 63-3-1 du Code de procédure pénale que toute personne placée en garde doit pouvoir bénéficier du droit d’être assistée par un avocat pendant toute la durée de cette mesure, et cela, dès son commencement.

En théorie, la garde à vue est une mesure privative de liberté qui se trouve au confluent de deux intérêts potentiellement conflictuels : la recherche de la manifestation de la vérité et la protection des droits du suspect placé en garde à vue.

Bien que la présence de l’avocat ne soit qu’une simple faculté offerte au suspect, elle est essentielle en pratique pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, pour des raisons juridiques.

En effet, l’article 63-4-1 du Code de procédure pénale énonce que le gardé à vue ou son conseil a le droit de consulter les pièces suivantes :

➢ le certificat médical lorsque le suspect a été examiné par un médecin pendant la garde à vue ;

➢ les procès-verbaux d’audition de garde à vue ;

➢ le procès-verbal établi par un officier de police judiciaire constatant la notification des droits du suspect au tout début de la GAV

Ces pièces permettent de vérifier si les enquêteurs ont bien respecté l’ensemble des droits du gardé à vue, dont ceux énumérés à l’article 63-1 du Code de procédure pénale à savoir :

– le droit d’être informé de la qualification, de la date et du lieu présumés de l'infraction qu'elle est soupçonnée d'avoir commise ou tenté de commettre ;

– le droit d’être informé de la durée de la mesure et de la ou des prolongations dont celle-ci peut faire l'objet :

– le droit de faire prévenir un proche et son employeur ;

– le droit d'être examiné par un médecin ;

– le droit d'être assisté par un interprète ;

– le droit de garder le silence ;

– le droit de présenter des observations au procureur de la République ou le cas échéant, au juge des libertés et de la détention, lorsque ce magistrat se prononce sur l'éventuelle prolongation de la garde à vue, tendant à ce qu'il soit mis fin à cette mesure ;

– le droit d’être assisté par un avocat.

La méconnaissance d’un droit du gardé à vue par un enquêteur entraîne la nullité de la mesure de garde à vue et des auditions qui se sont déroulées durant ce laps de temps.

En principe, la mesure de garde à vue s’exécute sous le contrôle de l’autorité judiciaire, en l’espèce le procureur de la République. 

Cependant, ce dernier ne peut pas vérifier réellement en pratique si les droits du suspect ont été respectés. 

Par conséquent, seul l’avocat peut contrôler pleinement la régularité de la mesure de garde à vue.

De plus, l’intervention de l’avocat en garde à vue est indispensable pour des raisons stratégiques.

En effet, conformément à l’article 63-4 du Code de procédure pénale, le suspect placé en garde à vue bénéficie du droit à un entretien préalable avec son avocat sur les faits qu’il est soupçonné d'avoir commis ou tenté de commettre.

Cet entretien avec l’avocat s’avère indispensable puisqu’il va conseiller son client sur la stratégie à adopter pendant les auditions de garde à vue.

Or, pendant cette mesure privative de liberté, ni le client, ni son avocat n’ont accès aux pièces du dossier.

Le client ne peut donc s’en remettre qu’à l’expérience et à l’efficacité de son avocat pour choisir une stratégie protégeant du mieux possible ses intérêts.

Ses choix se résument à plusieurs options : soit de garder le silence, soit de répondre partiellement, soit de parler.

L’intervention de l’avocat va permettre de conseiller son client sur le comportement à adopter pendant le déroulement de son audition.

Enfin, il y a la raison psychologique.

En effet, la présence de l’avocat apporte un vrai soutien psychologique au client.

Pour mémoire, l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme énonce que :

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

Sur ce fondement, l’Etat français est régulièrement condamné en raison des conditions insalubres dans lesquelles s’effectue une garde à vue.

Ainsi, le 22 novembre 2021, saisi par des associations d’avocats, le Conseil d’Etat a constaté l’existence d’un dysfonctionnement structurel en matière de salubrité des locaux de garde à vue (CE, ord., 22 novembre 2021, n°456924).

De surcroît, la présence de l’avocat aux côtés de son client lors des auditions avec les enquêteurs permet de prévenir tout abus de ces derniers dans les droits de son client.

À cet égard, en application de l’article 63-4-2 du Code de procédure pénale, la personne gardée à vue peut demander à son avocat de l’assister à ses auditions et confrontations.

Aussi, dans l’arrêt Selmouni contre France du 28 juillet 1999, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour violation de l’article 3 de la CESDH à la suite d’une garde à vue sans avocat au cours de laquelle le suspect a été frappé, notamment au moyen d'une batte de baseball, et agressé sexuellement par des policiers.

En outre, l’article 63-4-3 du Code de procédure pénale permet à l’avocat de poser des questions aux enquêteurs à l’issue de chaque audition ou confrontation.

Face au refus de l’officier de police judiciaire de répondre à ses questions, l’avocat peut saisir le procureur de la République en lui soumettant ses observations écrites (Cass. crim. 20 nov. 2013, n° 13-84.280).

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Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
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