Le droit des successions est le droit qui règle les conflits entre les membres d'une même famille qui héritent d'un de leurs parents ou entre ces derniers et d'autres héritiers du défunt (en cas de remariage ou d'autres liens de filiation).
Le combat consiste essentiellement à obtenir l'annulation des testaments, legs ou donations afin de rendre plus égal le partage successoral ou afin d’obtenir leur réintégration en valeur dans la masse de l’actif de la succession à partager.
C’est dans ce contexte que se pose la question de la preuve des testaments, legs ou donations.
Pour mémoire, l'article 9 du code civil dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée ».
En l'espèce, suite au décès de leurs parents, un frère et deux sœurs se retrouvent en indivision successorale.
Le frère découvre alors une lettre écrite par son beau-frère qui mentionne l’existence d’une donation immobilière rapportable consentie de leur vivant par les parents au profit de l’une des sœurs.
Il décide donc de produire aux débat ce document afin d'obtenir le rapport à la succession de l’immeuble évoqué.
Par une application stricte du droit au respect de la vie privée et du secret des correspondances, les juges de première instance et d'appel ont considéré que la production de cette missive viole l'intimité de la vie privée et le secret à défaut de disposer des autorisations des deux soeurs et de son rédacteur.
Les juges du fond ont donc ordonné le retrait de cette lettre des débats.
Toutefois, la cour de cassation a cassé et annulé cette position en jugeant que :
« en statuant ainsi, sans rechercher si la production
litigieuse n'était pas indispensable à l'exercice de son droit à la preuve, et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ».
Implicitement, il convient de conclure que pour les juges de la cour de cassation, la production d'une missive portant donation immobilière rapportable à la succession serait « indispensable à l'exercice de son droit à la preuve et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence » dans le cadre des procédure de liquidation successorale.
Cette affaire illustre la conciliation parfois difficile entre les différents droits des parties au procès.
En tout état de cause, les juges ne peuvent accueillir ni rejeter les demandes dont ils sont saisis, la liquidation des droits successoraux, sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions et même, comme en l'espèce, si ces éléments relèvent de la vie privée ou sont couverts par le secret des correspondances.
En effet, il aurait été choquant que, en matière de droit des successions et de preuve des libéralités, ce type de document ne puisse pas être valablement utilisé par les parties afin de démontrer les donations rapportables faites par le défunt au profit d'un cohéritier.
Pour conclure, il convient de se souvenir que, selon la jurisprudence, l’atteinte proportionnée au droit au respect de la vie privée ne peut pas faire obstacle au droit des parties au procès de rapporter la preuve d'un élément de fait essentiel pour le succès de leu prétentions.
Une question sans réponse demeure : comment s'évalue la proportion de l'atteinte au droit au respect de la vie privée par rapport aux droits en cause et au but recherché ?
La jurisprudence ne manquera certainement pas d'y répondre.
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Anthony Bem
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