La loi du 4 mars 2002, relative à l’autorité parentale, a consacré la résidence alternée afin de permettre, d'une part, aux parents de continuer à assurer tous deux leurs fonctions parentales après leur séparation et, d'autre part, à l’enfant de continuer à maintenir des liens avec chacun de ses parents.
Ainsi, en cas de divorce ou de séparation des parents, il est possible d’aménager la résidence de l'enfant et le temps de partage de ses domiciles, entre celui de son père et celui de sa mère.
Depuis cette loi de 2002, la résidence alternée a évolué de manière sensible.
En effet, interrogé au sujet de la résidence alternée, le ministère de la justice a présenté, par réponse ministérielle du 18 août 2013, des études statistiques montrant que la proportion de résidence alternée homologuée ou prononcée par les juges aux affaires familiales est passée de 8,8 % à 14,9% entre 2003 et 2012, soit une augmentation de 6 points en près de dix ans.
Ces mêmes études statistiques montrent aussi que le taux de demande de résidence alternée est passé de 10,3 % à 17,8% entre 2003 et 2012, soit une augmentation de 7 points.
En outre, toujours d’après la réponse ministérielle, en 2012, près de 95 % des résidences en alternance fixées résultent d'un accord des parents.
En cas de désaccord entre les parents, la résidence en alternance est prononcée par le juge dans 50 % des situations.
Cependant, si ces chiffres semblent positifs, beaucoup considèrent que le nombre de décisions de justice concluant à la résidence alternée en cas de désaccord entre les parents reste très faible et que dans la majorité des cas la garde revient à la mère.Â
Pour ces défenseurs de la résidence alternée, celle-ci devrait être la solution par défaut en cas de séparation des parents pour lutter "contre l'état d'injustice dont sont victimes en grande majorité des pères", selon Nicolas Moreno, cofondateur du Collectif pour la coparentalité (Copco).
En témoignent l’actualité de ces derniers mois et les récentes manifestations de "pères en colère" dont certains sont montés sur des grues ou en haut de cathédrale.
Il semblerait que ces appels aient été entendus par le Rassemblement Démocratique et Social Européen (RDSE), groupe à majorité Parti Radical de Gauche (PRG), qui a présenté un amendement visant à modifier l’article 373-2-9 du code civil.
Pour mémoire, dans sa version actuelle, l’article 373-2-9 du code civil dispose que :
« En application des deux articles précédents, la résidence de l'enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l'un d'eux.
A la demande de l'un des parents ou en cas de désaccord entre eux sur le mode de résidence de l'enfant, le juge peut ordonner à titre provisoire une résidence en alternance dont il détermine la durée. Au terme de celle-ci, le juge statue définitivement sur la résidence de l'enfant en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l'un d'eux. »
L’amendement adopté, le 18 septembre 2013, envisage de remplacer le deuxième alinéa de l’article 373-2-9 du code civil par quatre alinéas ainsi rédigés :
« À défaut d’accord, en cas d’autorité parentale conjointe, le juge examine prioritairement, à la demande d’un des parents au moins, la possibilité de fixer l’hébergement de l’enfant de manière égalitaire entre ses parents.
« En cas de désaccord entre les parents, le juge entend le parent qui n’est pas favorable au mode de résidence de l’enfant en alternance au domicile de chacun de ses parents, exposant les motifs de son désaccord au regard de l’intérêt de l’enfant. La préférence est donnée à la résidence en alternance paritaire. La décision de rejet de ce mode de résidence doit être dûment exposée et motivée.
« Le non-respect par le conjoint de son obligation parentale d’entretien définie à l’article 371-2, d’obligation alimentaire définie aux articles 205 à  211 et de la pension alimentaire remet en cause la décision de résidence en alternance.
« Le tribunal statue, en tout état de cause, par un jugement spécialement motivé, en tenant compte des circonstances concrètes de la cause et de l’intérêt des enfants et des parents. »
En d’autres termes, l’amendement vise à rendre prioritaire la résidence alternée des enfants, de sorte qu’en cas de désaccord entre les parents la résidence alternée puisse être imposée au parent qui ne le souhaiterait pas.Â
L’objectif affiché par les auteurs de l’amendement est d’ailleurs sans ambiguïté :
« Bien que la loi ait progressivement établi l’autorité parentale conjointe, force est de constater que dans le cadre des affaires de divorce, la garde des enfants revient à la mère dans une très grande majorité des cas. Si la justice ne doit pas pouvoir imposer la résidence alternée des enfants en cas de divorce, rien, en revanche, ne doit pouvoir l’empêcher lorsqu'un des parents la demande. Il relève de l'intérêt de l'enfant d'être éduqué par ses deux parents dans une proportion équilibrée.
C'est le sens de cet amendement qui se justifie pleinement dans le cadre d'un projet de loi sur l'égalité entre les femmes et les hommes. L'article 2 réforme le complément de libre choix d'activité pour favoriser un partage plus équilibré des responsabilités parentales. Cet amendement poursuit également cet objectif. »
Cela revient à faire de la résidence alternée un principe, ce qu'avait refusé la Cour de cassation en 2007 en jugeant que la fixation à titre provisoire de la résidence alternée n'avait rien d'obligatoire en cas de désaccord des parents. (Cass. Civ. I, 19 septembre 2007, n°07-12116)
L’amendement revient également à inverser la charge de la preuve, de sorte que ce sera au parent qui souhaite s'opposer à la résidence paritaire de justifier sa position.
Réagissant à cet amendement, de nombreuses voix se sont élevées, principalement dans le monde médical, pour dénoncer les risques que la généralisation de la résidence alternée ferait courir aux enfants les plus jeunes, dont des effets désorganisateurs pour le psychisme des jeunes enfants.
Même si l’on ne peut ignorer qu'il existe des cas où la résidence alternée n'est pas adaptée à l'enfant ni aux parents, c'est au cas par cas que le juge déterminera ce qui correspond le mieux à l'intérêt de l'enfant.
Et à cet effet, le juge dispose d'un certain nombre d’éléments objectifs prévus par le législateur et la jurisprudence pour garantir l’intérêt de l’enfant : le maintien des repères de l’enfant ; l’entente des parents ; l’âge de l’enfant ; le principe de non-séparation de la fratrie ; la proximité des domiciles des parents ; la possibilité d’un hébergement adapté dans l’une et l’autre résidence ; les capacités éducatives et affectives des parents, etc…
Pour l'heure, il ne semble pas qu'il y ait une systématisation de la garde en faveur des mères.
Bien que les juges fassent preuve de pragmatisme au cas par cas, l'absence de communication entre les parents joue un rôle prépondérant dans le choix du mode de garde de l'enfant.
Or, certains parents l'ont bien compris et, de manières subtile et vicieuse, font tout pour éviter une communication paisible et pacifiée avec l'autre parent dans le but d'obtenir du juge qu'il refuse la garde alternée.
Bien que la garde alternée doive être instituée en tant que principe, chaque situation est différente et le rôle d'appréciation des faits par le juge aux affaires familiales est et restera primordial.
A cet égard, le rôle de l'avocat consistera essentiellement à permettre au juge d'avoir une vision la plus complète et précise de l'intérêt de l'enfant.Â
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Anthony Bem
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