Les fichiers d'une entreprise constituent une base de données dont le détournement par un ancien salarié est sanctionnable.
Suite à un litige portant sur le détournement d'un fichier clients, le 20 mai 2010, la cour d'appel de Versailles a, d'une part, défini la notion des fichiers clients (1), d'autre part, rappelé le principe selon lequel leur détournement constitue une faute sanctionnable (2).
1) Une définition jurisprudentielle de la notion des fichiers clients
Pour la cour d'appel de Versailles, les fichiers clients sont des « fichiers d'une entreprise organisés par client et par produit avec historique ciblé des commandes et du taux de marge dégagé ».
En tant que tels, ils représentent des « éléments indépendants et individuellement accessibles et constituent une base de données au sens du Code de la propriété intellectuelle ».
La cour considèrent donc que l'entreprise est seule détentrice de droits sur ces bases de données pour les avoir développées et mis à jour à l'aide d'investissements financiers, matériels et humains.
2) Le détournement du fichier client constitue une faute sanctionnable
Le détournement de fichiers informatiques par un concurrent est toujours motivé par un seul et unique objectif, celui d'obtenir des données et informations commerciales et stratégiques sur des produits, des clients, des fournisseurs, etc…
Le détournement de fichier client peut être sanctionné soit :
- sur le fondement de la responsabilité civile pour concurrence déloyale ;
- sur le fondement de la responsabilité pénale pour abus de confiance, vol ou l'accès prohibé du salarié à un système de traitement de données visé à l’article 323‑1 du Code pénal (sur ce dernier point je vous invite à lire l'article intitulé : "L'intrusion et les atteintes aux systèmes informatiques" : http://www.legavox.fr/blog/maitre-anthony-bem/intrusion-atteintes-systemes-informatiques-3158.htm)
Peu importe le fondement, les juges sanctionnent ces fautes en condamnant leurs auteurs à verser à la société victime des dommages-intérêts, outre devenues peine d'amendes et d'emprisonnement le cas échéant.
Cette sanction n'est pas nouvelle, en effet les juges ont déjà condamné à des dommages et intérêts le salarié démissionnaire d’une entreprise dont il avait concurrencé l’activité au travers de la captation de clientèle opérée « par l’utilisation du logiciel mis en œuvre par l’ancien salarié pour le compte de son ex-employeur, et de fichiers clients détournés » (CA Aix en Provence, juin 2006).
La preuve effective des faits de détournement peut résulter de :
- l’emprunt matériel d’un fichier (photocopies ou enregistrements informatiques),
- attestations de détournement de 72 clients communs sur 82 (CA Paris, décembre 2002),
- un constat d'huissier ayant constaté que le nouvel ordinateur du salarié en faute “contenait des fichiers comportant des données issues, dans une proportion importante, des fichiers correspondants de l’ancien employeur” (CA Paris, juillet 2004).
Enfin, il convient de rappeler qu'il existe des moyens juridiques permettant d'anticiper l’exploitation illicite et future de son fichier clients au profit d’entreprises concurrentes par l'insertion des clauses suivantes dans le contrat de travail :
- clause prévoyant l’obligation de non-concurrence interdisant au salarié l’exploitation du fichier clients ;
- clause spécifique sur la propriété des fichiers et la restitution de leurs supports papier et électronique lors du départ du salarié ;
- clause de secret ou de confidentialité intégrant dans le champ de la confidentialité les données commerciales relatives au fichier clients.
Je suis à votre disposition pour toute information complémentaire et défense de vos intérêts.
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Anthony Bem
Avocat à la Cour
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