Le 4 mars 2015, la Cour de cassation a jugé que :
« le cautionnement souscrit par un des deux époux marié sous le régime de la communauté de biens ne peut engager les biens communs du couple qu'à la condition que l'autre époux ait donné son consentement exprès » (Cour de cassation, première chambre civile, 4 mars 2015, Référence RG° 14-11567).
En l'espèce, par acte authentique, passé devant notaire, une société a consenti à une SCI une ouverture de crédit en compte courant afin d’acquérir des terrains et d’y construire des immeubles.
Ce crédit avait été consenti avec :
- l’engagement de caution personnelle et solidaire de M. X, époux commun en biens de Mme Y ;
- une hypothèque sur un des biens immobiliers dont ces époux étaient propriétaires en commun.
A cet égard, il convient de préciser que l'épouse n’est intervenue à l’acte notarié que pour l’affectation hypothécaire d'un bien commun et n’est pas caution.
Sur le fondement de l’acte notarié précité, le créancier a cru pouvoir prendre valablement une inscription d’hypothèque judiciaire provisoire “sur les parts et portions appartenant à M. X” dans un autre bien commun du couple bien visé dans l’acte notarié’’.
L’hypothèque judiciaire provisoire à été convertie en inscription définitive puis publiée.
L’hypothèque judiciaire provisoire est une sûreté.
Autrement dit, l'hypothèque permet de garantir le paiement d'une créance en cas d'impayé par le débiteur de manière amiable et spontanée.
Concrètement en cas de vente du bien immobilier par le débiteur, le créancier est garanti d'être payé puisque le notaire devra verser en priorité à ce dernier le montant de sa garantie avant de distribuer le prix de vente au débiteur.
Or, la loi et la jurisprudence réglementent à la fois les modalités procédurales, les délais et les conditions des hypothèques.
L'épouse a assigné le créancier inscrit afin d'obtenir la radiation de l’hypothèque et de l'inscription hypothécaire.
En effet, en l’absence de consentement exprès de l'épouse de M. X, commun en biens, celle-ci n’a pas engagé tous les biens communs par le seul cautionnement souscrit par l'époux.
De plus, les parts et portions de chacun des époux sur un bien commun ne sont pas identifiables tant que la communauté n’est pas été dissoute.
Les juges ont accueilli favorablement cette demande car :
- d'une part, l’acte de prêt ne comprenait que l’hypothèque d’un seul bien commun et non celui sur lequel l'inscription hypothécaire avait été prise ;
- l'épouse n’avait pas expressément consenti au cautionnement personnel souscrit par son époux.
Dans ce contexte, la cour de cassation a considéré que « celui-ci [l'époux] n’avait pas engagé les biens communs par ce cautionnement » et validé la radiation de l’hypothèque judiciaire provisoire inscrite abusivement.
Il résulte de cette décision que le prêteur ne peut pas valablement prendre, en garantie de l’engagement de caution du mari pris pendant le mariage, une hypothèque sur l’immeuble qui appartenait en commun aux époux au moment du cautionnement souscrit par le mari.
Le régime de la communauté légale permet en principe aux époux de n'engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt.
De manière exceptionnelle, les biens communs et les revenus des époux peuvent être engagés par un cautionnement ou un emprunt de l'un des deux, à la condition que ces engagements aient été contractés avec le consentement exprès de l’autre conjoint.
En conclusion, il conviendra de garder en mémoire qu'à défaut de consentement expresse des deux époux au cautionnement personnel souscrit par l'un d'eux, celui-ci n'a pas engagé les biens communs par ce cautionnement, de sorte que le créancier ne peut pas prendre d'inscription sur un bien commun des époux.
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Anthony Bem
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