L’occupation d’un immeuble par un héritier du défunt avant sa mort constitue elle un avantage qui peut être pris en compte dans le cadre du règlement de la succession ?
Pour mémoire, l’article 893 du Code civil prévoit que « la libéralité est l’acte par lequel une personne dispose à titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d’une autre personne ».
Le testament est un exemple de libéralité.
Juridiquement, le testament est l’acte par lequel le testateur exprime ses dernières volontés notamment quant à la répartition de ses biens et de ses actifs après sa mort.
Ils peuvent revêtir :
- la forme d’un acte authentique, c'est-à-dire reçu par un notaire et deux témoins ;
- la forme d’un acte sous seing privé, c'est-à-dire un acte conclu en privé sans présence d’un notaire, et qui doit être entièrement rédigé, daté et signé de la main de son auteur (le testateur).
Les libéralités peuvent aussi provenir des profits ou avantages qu’un héritier a obtenu de la part du défunt, durant sa vie.
Or, les avantages procurés aux héritiers, telle que la jouissance, sans contrepartie financière, d’un appartement, d’une maison ou de tout autre bien immobilier, doivent être « rapportés » en valeur lors de la liquidation de la succession.
A cet égard, la Cour de cassation a estimé, le 8 novembre 2005, que :
« Même en l’absence d’une intention libérale établie, le bénéficiaire d’un avantage indirect en doit compte à ses cohéritiers » (Cour de cassation, Chambre civile 1, 8 Novembre 2005, pourvoi n°03-13890).
De plus, le 18 janvier 2012, la Haute Cour a précisé que :
« Seule, une libéralité qui suppose un appauvrissement du disposant dans l’intention de gratifier son héritier, est rapportable à la succession » (Cour de cassation, Chambre civile 1, 18 janvier 2012, pourvoir n°09-72542).
Ainsi, l’avantage doit nécessairement entrainer un appauvrissement de la part du donateur.
Surtout, les testaments peuvent aussi prévoir les questions des avantages procurés aux héritiers durant leur vie, telle que la jouissance, gratuite, sans contrepartie financière, d’un appartement, d’une maison ou de tout autre bien immobilier.
A cet égard, la première Chambre Civile de la Cour de cassation a jugé, le 19 mars 2014, que l’héritier qui a bénéficié gratuitement de l’appartement d’un défunt a bien tiré un avantage indirect de la part de ce dernier, dont il doit rapporter la valeur au moment du règlement de la succession, conformément aux dernières volontés du défunt inscrites dans son testament (Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 mars 2014, pourvoi n°13-14139).
En effet, les personnes peuvent organiser le sort de l’occupation de leurs biens immobiliers par leurs héritiers dans le cadre de testament, afin notamment de prévoir le sort des avantages en nature consentis.
Les héritiers peuvent avoir jouit gratuitement de l’appartement de leurs parents de leur vivant.
Mais l’avantage tiré de cette occupation peut être « rapporté » à sa succession, notamment si un testament le prévoit expressément ou selon le droit commun.
En conséquence, il convient de souligner que le rapport d’un avantage indirect à la succession n’est pas automatique et dépend de la volonté des défunts de faire que leur valeur soit rapportable ou non au moment de leur succession.
Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
01 40 26 25 01
abem@cabinetbem.com