Les recours contre le refus de vente de produits ou services entre professionnels commerçants

Publié le 16/12/2012 Vu 16 015 fois 0
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Si en principe un professionnel est libre de refuser de vendre ses produits ou services, le refus de vente peut cependant donner lieu à sanction et indemnisation des professionnels auquel il porte préjudice.

Si en principe un professionnel est libre de refuser de vendre ses produits ou services, le refus de vente peu

Les recours contre le refus de vente de produits ou services entre professionnels commerçants

En vertu de la loi n° 96-588 du 1er juillet 1996 sur la loyauté et l'équilibre des relations commerciales, dite loi Galland, tout professionnel (producteur, industriel, commerçant ou artisan) est libre de vendre ou de ne pas vendre un bien ou un service à un autre professionnel.

Cependant, cette liberté a des limites.

Si en principe, un professionnel n'a pas à se justifier pour refuser la commande d'un client notoirement insolvable, le client solvable victime d'un refus de vente préjudiciable de la part d’une autre entreprise pourra agir en responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et demander des dommages-intérêts devant le juge civil.

Par ailleurs, si une entreprise détient sur son marché une position dominante, anticoncurrentielle, son refus de vendre injustifié constituera un abus sanctionné au titre des articles L 420-1  et L 420-2 du Code de commerce.

En effet, l’article L420-1 du Code de commerce prohibe même par l'intermédiaire direct ou indirect d'une société du groupe implantée hors de France, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu'elles tendent à :

1° Limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises ;

2° Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ;

3° Limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique ;

4° Répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.

De plus, l’article L420-2 du Code de commerce dispose que :

« Est prohibée, dans les conditions prévues à l'article L. 420-1, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées ».

Pour qu'il y ait abus de position dominante au sens de l'article L. 420-2, trois conditions cumulatives doivent être réunies : l'existence d'une position dominante (1), une exploitation abusive de cette position (2) et un objet ou un effet restrictif de concurrence sur un marché (3).

1) L'existence d'une position dominante

La notion de position dominante n'est pas définie par les textes.

Cependant, la jurisprudence a consacré une définition élaborée par les autorités et juridictions communautaires : "la position dominante concerne une position de puissance économique détenue par une entreprise qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché en cause en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure appréciable vis à vis de ses concurrents, de ses clients et, finalement, des consommateurs".

La position dominante s'entendant sur un marché de produits ou de services déterminé, l'appréciation d'une telle position passe inévitablement par une définition préalable du marché pertinent, ce qui impose de mesurer le degré de substituabilité des produits ou services susceptibles de constituer ledit marché.

Le simple constat de la forte part de marché d'une entreprise ne permet pas de conclure à lui seul à l'existence d'une position dominante.

En revanche, si l'entreprise concernée dispose d'une avance technologique telle qu'elle lui permet d'augmenter ses prix sans craindre une érosion de sa clientèle, cette entreprise peut être considérée comme étant en position dominante.

Il en va de même d'une entreprise qui détient des marques d'une très forte notoriété auprès des consommateurs, au point que les distributeurs ne peuvent se passer de ces marques.

Le cas de position dominante le plus caractérisé est la position de monopole, a fortiori si cette situation n'est pas ponctuelle (cas où une entreprise est la première à intervenir sur un marché émergent) mais résulte de la difficulté pour d'autres opérateurs d'entrer sur le marché (existence de barrières de nature réglementaire, technologique ou autres...).

2) L'exploitation abusive d'une position dominante

L'article L. 420-2 précité prévoit une liste non limitative de pratiques susceptibles de constituer un abus de position dominante (le refus de vente, les ventes liées, les conditions de vente discriminatoires ou la rupture des relations commerciales au motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées).

La notion d'abus de position dominante recouvre deux notions différentes :

  • Les abus illicites par eux-mêmes. Il s'agit des comportements qui contreviennent déjà à une définition juridique.

Dès lors qu'ils sont mis en ouvre par une entreprise en position dominante, de tels comportements sont constitutifs d'abus au sens de l'article L. 420-2 du Code de commerce.

Relèvent notamment de cette catégorie les pratiques énumérées au premier alinéa de l'article L. 420-2 ainsi que tout autre comportement visé plus généralement par le régime jurisprudentiel de la concurrence déloyale.

  • Les comportements qui ne sont abusifs que parce que l'entreprise occupe une position dominante.

Certaines pratiques considérées comme admissibles du point de vue de la concurrence lorsqu'elles émanent d'entreprises ne détenant qu'une faible position sur leur marché et étant de ce fait soumises à une concurrence effective, deviennent anticoncurrentielles lorsqu'elles émanent d'une entreprise en position dominante.

D'une manière générale, sont considérés comme abusifs tous les comportements excédant les limites d'une concurrence normale de la part d'une entreprise en position dominante et qui ne trouvent d'autre justification que l'élimination des concurrents effectifs ou potentiels ou l'obtention d'avantages injustifiés (pratiques d'éviction des concurrents, dispositions contractuelles imposées aux partenaires économiques qui renforcent le pouvoir de l'entreprise dominante sur le marché, toutes formes de pratiques commerciales à l'égard des clients ou concurrents de l'entreprise dominante visant à l'octroi ou au maintien d'avantages injustifiés, pratiques de prix prédateurs.).

3) Un objet ou un effet restrictif de concurrence sur un marché

La jurisprudence de la Cour de cassation prévoit que seule une atteinte sensible à la concurrence peut caractériser une pratique anticoncurrentielle.

Il faut donc que les abus de position dominante aient des effets, actuels ou potentiels suffisamment tangibles.

En outre, l'infraction d'abus de position dominante ne peut être constituée que s'il y a un lien de causalité entre le pouvoir de domination de l'entreprise qui en est à l’origine et l'abus qui lui est imputé.

Ainsi, l'effet anticoncurrentiel peut se produire sur un autre marché de produits ou de services que celui sur lequel l'entreprise concernée occupe une position dominante.

Le cas échéant, l'Autorité de la concurrence peut prononcer des injonctions et infliger des sanctions proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'entreprise sanctionnée ou du groupe auquel l'entreprise appartient et à l'éventuelle réitération de pratiques.

Le montant maximum de la sanction est de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en oeuvre.

Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante.

Par ailleurs, l'article L. 420-6 du Code de commerce sanctionne d’un emprisonnement de quatre ans et d'une amende de 75000 euros le fait, pour toute personne physique de prendre frauduleusement une part personnelle et déterminante dans la conception, l'organisation ou la mise en oeuvre de pratiques visées aux articles L. 420-1 et L. 420-2 précités.

Ainsi, une juridiction pénale peut être saisie de ces faits afin de poursuivre et condamner les personnes physiques auteurs des faits précités.

Il ressort de ce qui précède que, selon les situations, différents types de recours juridiques sont possibles contre le refus de vente entre professionnels commerçants.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

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Anthony Bem
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