Le principe jurisprudentiel est qu'en cas de confusion de patrimoines entre deux ou plusieurs sociétés, le redressement ou la liquidation judiciaire de l'une peut être étendu à l’autre ou aux autres sociétés, notamment compte tenu de l’absence d’autonomie financière et de l’existence de relations financières anormales entre elles (Cass. Com., 14 janvier 2004).
En l'espèce, l’opération avait consisté à créer une SCI pour acquérir des immeubles au moyen d’emprunts et de les louer à une société commerciale y exerçant son activité.
Ainsi, une SARL, dont le gérant M. Y était également gérant d’une société civile immobilière (SCI) et titulaire de 80 % de son capital, a été mise en redressement puis liquidation judiciaires.
Alors que le seul objet de la SCI était la gestion d’un bien immobilier exploité par la SARL, la SCI s’était abstenue, pendant six ans, de recouvrer les loyers dus par la SARL, laissant s’accroître une dette importante.
A la suite de travaux effectués entre 2001 et 2006, dans le cadre de locaux appartenant à la SCI mais que la SARL occupait antérieurement sans être titulaire d'un bail commercial, cette dernière a facturé à la SCI ces prestations qui n'ont pas été réglées et n'ont fait l'objet d'aucune procédure de recouvrement.
En principe, ce montage caractérise l’existence de relations privilégiées mais ne suffit pas à établir la confusion des patrimoines des deux sociétés.
Cependant, les juges d'appel saisis du recours ont prononcé l'extension de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL à l'encontre de la SCI (Cour d'appel de Toulouse du 14 décembre 2010).
C'est ainsi que la SCI à saisi la cour de cassation d'un pourvoi.
La SCI soutenait que l'existence de relations financières anormales entre deux sociétés, à la supposer établie, est insuffisante, en l'absence de démonstration d'une volonté systématique de privilégier une structure au détriment de l'autre, pour caractériser la confusion des patrimoines.
Ainsi, selon la SCI la cour d'appel n'aurait pas caractérisé l'imbrication des patrimoines des deux sociétés ni la volonté systématique de la SARL de privilégier la SCI et aurait privé sa décision de base légale.
Mais, la Cour de cassation n’a pas retenu cet argument en jugeant qu’il existait « une spoliation sur plusieurs années au préjudice de la société Aludecor qui l'a acceptée au mépris d'un abus de bien social commis au profit de la SCI 2000 détenue à 80 % par M. Y ».
Par conséquent, la cour de cassation a estimé que :
- en l'absence de bail commercial entre les deux sociétés et la charge des travaux et prestations facturées par la société commerciale s'avérant purement fictif et de circonstance, il est impossible de distinguer entre deux patrimoines que l'on oppose ou que l'on cherche à distinguer fictivement ;
- les prétendues créances de la SCI sur la société commerciale étaient destinées à sauvegarder un patrimoine immobilier et à créer l'espérance de paiements complémentaires sur le passif d'une liquidation judiciaire qui s'avérait inéluctable ;
- « par leur conjonction l'existence de flux financiers anormaux durant plusieurs années entre les deux sociétés [sont] constitutifs de la confusion des patrimoines »
En conclusion, les juges considèrent que la confusion de patrimoines est constituée par l’existence de relations ou de flux financiers anormaux entre deux sociétés et l’imbrication d’éléments actifs et de passifs composant leurs patrimoines.
L’effet sera l’extension de la procédure collective de l’une à l’égard de l’autre c'est-à-dire, pour l’essentiel, le paiement des créanciers de la société faisant l’objet de la procédure collective avec le patrimoine de la société in bonis.
Pour mémoire, le cas échéant, les créanciers doivent déclarer leurs créances dans une seule procédure car il y a unicité des procédures du fait des imbrications qui rendent impossible la dissociation entre les différents patrimoines.
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Anthony Bem
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