En principe, les contrats d’assurance vie sont conclus afin que l’assureur verse un capital ou une rente à un bénéficiaire désigné au cas où le souscripteur décède.
Cependant, les contrats d’assurance vie peuvent aussi consister en une simple opération d’épargne ou de capitalisation ou une donation déguisée, dépourvue de toute volonté de garantir un risque de la part du souscripteur.
En principe, les sommes placées dans un contrat d’assurance vie ou remises au bénéficiaire de l’assurance vie ne font pas partie de l'actif successoral de l’assuré au moment de son décès et ne sont donc pas soumises au rapport successoral ni à réduction.
En effet, l’article L.132-12 du code des assurances dispose que :
« Le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l'assuré. Le bénéficiaire, quelles que soient la forme et la date de sa désignation, est réputé y avoir eu seul droit à partir du jour du contrat, même si son acceptation est postérieure à la mort de l'assuré ».
En outre, l’article L.132-13 du même code dispose que :
« Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.
Ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ».
Par voie de conséquence, lors des opérations de compte, liquidation et partage des successions, les sommes des contrats d'assurance vie n'ont pas à être partagées entre les héritiers, ni à être rapportées à la succession.
Pour éviter que des contrats d’assurance vie ne soient souscrits dans l’unique but d’avantager l’un des héritiers, l’article 843 du code civil dispose que :
« Tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale ».
Ainsi, dans le cadre des opérations de liquidation et partage des successions, il n’est pas rare que les contrats d’assurance vie soient remis en question par des héritiers au nom de l’égalité entre héritiers et du respect de la réserve héréditaire, afin que les sommes investies soient intégrées dans l’actif successoral.
En l’espèce, à la suite du décès de leur mère puis de leur sœur, Monsieur X a assigné son frère, Monsieur Y, en liquidation et partage des deux successions.
La Cour d’appel a jugé que le capital perçu par Monsieur Y au titre du contrat d'assurance-vie souscrit par sa mère défunte sera réintégré à l'actif successoral, au motif que les dispositions de l'article L. 132-13 du code des assurances ne s'appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés financières et patrimoniales.
Les juges d’appel ont constaté que les primes versées représentent l'équivalent du montant des revenus de la souscriptrice pendant plus de vingt et un mois et la quasi totalité des liquidités dont elle disposait sur ses comptes.
Ils ont également relevé que l'opération financière ainsi réalisée ne présentait aucune utilité pour la défunte, compte tenu de son âge et de ses besoins, mais qu'elle lui permettait en revanche, en distrayant une partie des biens de sa succession future, d'avantager son fils Monsieur Y pour lequel le bénéfice de ces sommes constitue une donation déguisée.
Cependant, la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt d’appel en considérant que :
« seul le montant des primes versées devait être réintégré dans l'actif successoral en vue du rapport et de la réduction ».
Par conséquent, le capital de l’assurance vie qui ne provient pas du patrimoine du souscripteur ne saurait donner lieu à rapport ou à réduction lors du partage d’une succession, sauf si la désignation du bénéficiaire du capital du contrat d’assurance vie a été faite par voie testamentaire, comme l’a jugé la Cour de cassation dans un autre arrêt du 10 octobre 2012 (Cass. Civ. I, 10 octobre 2012 n° 11-17891).
En conclusion, le caractère manifestement exagéré des montants des primes de contrats d’assurance vie versés par le défunt de son vivant eu égard à ses facultés permet à l’un des héritiers d’obtenir leur réintégration dans l’actif successoral par voie de justice.
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Anthony Bem
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