Si Google constitue aujourd’hui l’un des sites internet les plus utilisés au monde, voire le plus utilisé, c’est principalement grâce à son moteur de recherche qui permet de trouver des contenus en tout genre tels que des photos, des vidéos, des pistes audios et diverses informations sur un sujet, une personne ou une entreprise.
En effet, dans le capharnaüm que constitue Internet, les moteurs de recherche tels que Google sont d’une utilité essentielle, car sans eux l’accès aux divers sites internet et aux informations qu’ils contiennent serait difficile, voire impossible, sauf pour l’internaute à connaitre l’adresse internet exacte des sites à consulter (l’URL).
Ainsi, il n’est pas étonnant que le terme « googliser » soit entré dans le langage courant pour désigner l’action d’interroger un moteur de recherche sur le nom d'une personne ou d’une entreprise pour obtenir l'ensemble des informations la concernant diffusées sur Internet.
Comme n’importe quel autre moteur de recherche, Google indexe en continu et de façon automatique tous les contenus mis en ligne sur internet.
Ces informations peuvent résulter d’articles de presse, de commentaires publiés sur un forum ou un site d’information, d’articles publiés sur un blog, d’avis publiés par des clients, ou d’informations diffusées sur un réseau social tel que Facebook ou Twitter.
Or, de telles informations sont susceptibles de porter atteinte à l’E-réputation de la personne concernée, surtout dans un contexte où les sites internet sont de plus en plus consultés afin de rechercher des informations sur les individus, que ce soit dans un contexte personnel ou professionnel.
Il peut s’agir en effet de se renseigner sur une relation d’affaires, un collègue, un voisin, un proche, un conjoint, un client, un candidat à l'emploi, à un logement ou à un crédit.
A titre d’exemple, dès lors qu'une personne est citée dans une décision de justice diffusée sur internet, et dans la mesure où cette décision aura été indexée par un moteur de recherche, elle deviendra directement accessible à tout internaute qui aura interrogé le moteur de recherche sur le nom de cette personne, alors même que tel n'était pas l'objet de la recherche.
Dans ce contexte, la question se pose de savoir quels sont les moyens juridiques dont dispose une personne pour obtenir la suppression de ses nom et prénom du référencement internet, afin de préserver son E-réputation.
La réponse à cette question est fournie notamment par la loi Informatique et Libertés du 6 janvier 1978 dont l’article 1er dispose que l’informatique « ne doit porter atteinte ni à l'identité humaine, ni aux droits de l'homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques. »
A cet effet, cette loi prévoit de nombreux droits pour protéger les personnes des dangers liés à la publication sur internet de leurs données à caractère personnel.
Pour mémoire, les données à caractère personnel sont définies comme « toute information relative à une personne physique identifiée, directement ou indirectement, par référence (…) à un ou plusieurs éléments qui lui sont propres. »
Il s’agit par exemple du prénom et du nom patronymique d’une personne, de son numéro de téléphone, de son adresse email ou encore de son adresse postale.
Au titre des droits garantis par la loi Informatique et Libertés, le droit d’opposition permet à toute personne physique de « s’opposer, pour des motifs légitimes, à ce que des données à caractère personnel la concernant fassent l’objet d’un traitement. »
Dès lors, une personne dont les données personnelles sont mentionnées dans un article de presse, un commentaire publié sur un forum, un avis publié par un client ou un article diffusé sur un blog est en droit de demander la suppression de telles données auprès du site internet concerné.
C’est ainsi que dans un arrêt du 15 décembre 2011, la cour d’appel de Montpellier a donné gain de cause à un internaute intervenant sous pseudonyme sur un forum de discussion qui se plaignait de la révélation à son insu de son nom, son prénom, sa ville et son adresse e-mail, associés à des éléments de sa vie privée facilement accessibles via les moteurs de recherche.
En l’espèce, la cour d’appel de Montpellier a retenu que l’internaute en question était fondé, à raison de l’atteinte à sa vie privée, à demander la suppression de son nom et de son prénom par application de l’article 38 de la loi Informatique et Libertés qui énonce que « toute personne a le droit de s’opposer, pour des motifs légitimes, à ce que des données à caractère personnel la concernant fasse l’objet d’un traitement. » (Cour d’appel de Montpellier, 5ème chambre, section A, 15 décembre 2011)
Plus récemment, le 28 janvier 2014, le tribunal de commerce de Paris a accueilli la demande d’une personne qui soutenait que l’affichage automatique et systématique des termes négatifs par la fonctionnalité Google Suggest en association avec ses nom et prénom constituait un traitement de ses données à caractère personnel réalisé sans son accord et ayant pour effet de jeter un discrédit et de porter atteinte à son image, à sa réputation professionnelle ainsi qu’à son activité commerciale.
Par voie de conséquence, le tribunal de commerce de Paris a jugé que cette personne était fondée à se prévaloir de son droit d’opposition pour obtenir la suppression de l’association systématique de son nom et des termes attentatoires à sa réputation et a condamné Google à procéder à cette suppression. (Tribunal de commerce de Paris, 28 janvier 2014, n° RG : 2013000519)
Il en résulte donc que le droit d’opposition consacré par la loi Informatique et Libertés peut être revendiqué par toute personne souhaitant s'opposer à ce qu'une requête lancée sur son nom par un moteur de recherche permette à quiconque de prendre connaissance d’informations la concernant.
Outre Google, cette décision devrait pouvoir être invoquée à l’encontre d’autres moteurs de recherche tels que 123people ou Yatedo qui fournissent, à partir de la saisie des nom et prénom d’une personne, des informations concernant cette dernière diffusées sur divers sites internet tels que Facebook ou Twitter.
Par ailleurs, la loi Informatique et Libertés garantit un droit de rectification qui permet à toute personne d’exiger que soient « rectifiées, complétées, mises à jour, verrouillées ou effacées les données à caractère personnel la concernant, qui sont inexactes, incomplètes, équivoques, périmées, ou dont la collecte, l'utilisation, la communication ou la conservation est interdite. »
Il résulte des développements qui précèdent que la loi Informatique et Libertés du 6 janvier 1978 constitue un solide fondement juridique pour obtenir la suppression de ses nom et prénom du référencement internet, aux côtés d’autres actions telle que l’action en diffamation.
Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).
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Anthony Bem
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