Selon une étude récente, les français consacrent en moyenne 1h30 par jour sur les réseaux sociaux tels que Facebook, Twitter, Google Plus, LinkedIn, Instagram, etc…
C’est dire leur importance dans la vie des utilisateurs, aussi bien consommateurs que professionnels.
Pourtant, tous ces utilisateurs n’ont pas connaissance de la portée de leurs engagements à l’égard des fournisseurs de services de réseaux sociaux, du seul fait de leur utilisation.
A ce titre, il est intéressant d’observer les conditions générales d’utilisation de 2015 du réseau social Facebook récemment mises à jour, nommées « Déclaration des droits et responsabilités ».
On peut y lire les mentions suivantes en caractères gras :
« En utilisant les Services Facebook ou en y accédant, vous nous donnez l’autorisation de recueillir et d’utiliser les contenus et informations partagés en vertu de notre Politique d’utilisation des données, qui est susceptible d’être mise à jour à l’occasion ».
Autrement dit, pour l’ensemble des internautes, l’utilisation ou l’accès aux services Facebook équivaut à :
- autoriser Facebook à recueillir et à utiliser les contenus et informations partagés ;
- et ce, en vertu de leur politique d’utilisation des données, susceptible d’être mise à jour « à l’occasion ».
Ainsi, outre le droit d’utiliser les données à caractère personnel des utilisateurs, cette clause confère à Facebook le droit de modifier unilatéralement son site ou ses conditions générales d’utilisation quant à la politique d’utilisation de ces données personnelles.
Or, c’est pour appeler à l’élimination de ce type de clauses imposées aux utilisateurs que la Commission des clauses abusives a récemment formulé une recommandation visant les services de réseaux sociaux (Recommandation n° 2014-02 relative aux contrats proposés par les fournisseurs de services de réseaux sociaux, 7 novembre 2014).
Cette recommandation s’applique aux utilisateurs consommateurs et non professionnels.
En effet, la Commission des clauses abusives est partie du constat que :
« l’examen des multiples modèles de conventions habituellement proposées par les fournisseurs professionnels de services de réseautage social à leurs cocontractants consommateurs ou non-professionnels a conduit à déceler des clauses dont le caractère abusif au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation peut être relevé ».
Pour mémoire, l’article L. 132-1 du code de la consommation définit les clauses abusives comme celles « qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ».
Ainsi, parmi ses critiques, la Commission considère que de nombreuses clauses contenues dans ce type de contrat sont abusives.
Il convient donc d’exposer quelques exemples de clauses abusives relevées par la Commission.
La clause faisant « présumer le consentement du consommateur ou du non-professionnel aux modifications unilatérales des conditions générales d’utilisation », telle que celle précitée des CGU 2015 de Facebook, est considérée comme abusive.
De même, la clause prévoyant, en cas de litige, « que l’utilisateur est obligé de saisir une juridiction d’arbitrage étrangère sauf disposition contraire aux conditions générales d’utilisation » est dite abusive.
A cet égard, il est important de rappeler que, le 23 mars 2012, la Cour d’appel de Pau a déclaré « non écrite la clause attributive de compétence aux tribunaux de Californie contenue dans les conditions générales d’utilisation du site Internet Facebook opposée par la société Facebook mc » à un utilisateur consommateur (CA Pau, 23 mars 2012, n°12/1373).
Pourtant, il convient de souligner que cette clause figure toujours dans les CGU 2015 de Facebook aux termes desquelles il est indiqué que :
« Vous porterez toute plainte, action en justice ou contestation (« action ») afférente à cette Déclaration ou à Facebook exclusivement devant un tribunal américain du Northern District de Californie ou devant un tribunal d’État du comté de San Mateo, et vous acceptez de respecter la juridiction de ces tribunaux dans le cadre de telles actions. (…) ».
Aussi, la Commission s’est prononcée sur les clauses relatives aux données personnelles des clients.
Par exemple, la clause prévoyant « sans respecter les dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, un consentement implicite au traitement par le professionnel des données à caractère personnel des consommateurs ou des non-professionnels » est qualifiée d’abusive.
Précisément, la Commission renvoie ainsi à l’article 7 de la loi précitée, qui dispose que : « Un traitement de données à caractère personnel doit avoir reçu le consentement de la personne concernée ou satisfaire à l'une des conditions » prévues par cette loi.
De plus, la Commission recommande l’élimination des clauses prévoyant la conservation des données à caractère personnel du consommateur ou du non-professionnel « sans aucune limitation de durée ou pour une durée qui excède celle nécessaire aux finalités du traitement ».
En effet, le 13 mai 2014, la Cour de justice de l’Union européenne a consacré le droit à l’oubli en permettant la suppression des données à caractère personnel sous certaines conditions (CJUE, 13 mai 2014, Google Spain SL, Google Inc. / Agencia Española de Protección de Datos, Mario Costeja González, C-131/12) et il est désormais possible de demander en justice le droit au déréférencement de ses données à caractère personnel sous certaines conditions et selon certains critères (TGI de Paris, ordonnance du 16 septembre 2014; TGI de Paris, ordonnance de référé, 19 décembre 2014).
Par ailleurs, la Commission n’approuve pas la clause laissant croire au consommateur ou au non-professionnel « qu’il ne dispose d’aucun droit de rétractation en cas de fourniture d’un contenu numérique sur un support non matériel, sans recueillir son renoncement exprès à ce droit ».
De même concernant les clauses exonératoires de responsabilité du fournisseur de services du réseau social telle que la clause prévoyant « d’exonérer le professionnel de toute responsabilité, y compris en cas de blessures corporelles ou de décès du consommateur ou du non-professionnel résultant de l'utilisation de son site », la Commission réclame leur suppression.
Enfin, il est intéressant de souligner que la Commission considère que le service rendu par l’opérateur du réseau social n’est pas gratuit en ce que l’utilisateur, s’il ne paye pas ces services, lui fournit une contrepartie par l’apport de ses « données, informations et contenus qu’il dépose, consciemment ou non, à l’occasion de l’utilisation du réseau social ».
En cela, la Commission qualifie d’abusive la clause « affirmant que les services proposés sont gratuits ».
Ceci est une évolution sur la réflexion de ces nouveaux outils de communication.
Enfin, bien que n’ayant pas de force obligatoire, cette recommandation permet aux utilisateurs de mieux comprendre la portée de leurs engagements et appelle à être davantage attentif aux clauses contenues dans les contrats proposés par les fournisseurs de services de réseaux sociaux pour le cas échéant faire valoir ses droits en cas de contentieux avec un réseau social.
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Anthony Bem
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