Responsabilité de la banque pour soutien abusif en cas de crédit personnel consenti à un dirigeant de société déficitaire pour renflouer celle-ci

Publié le Modifié le 14/09/2020 Vu 3 016 fois 0
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Les banques ne peuvent pas prêter des fonds de manière totalement libres à leurs clients.

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Responsabilité de la banque pour soutien abusif en cas de crédit personnel consenti à un dirigeant de société déficitaire pour renflouer celle-ci

Elles doivent notamment vérifier préalablement la solvabilité de leurs emprunteurs, sauf à engager leur responsabilité sur le fondement de la notion de « soutien abusif » et d’avoir le cas échéant à les indemniser de leurs préjudices subis.

Ainsi, le 15 juin 2020, la cour d’appel d’Agen a sanctionné une banque pour soutien abusif d’une société suite au prêt consenti personnellement à son dirigeant pour les besoins de financement de celle-ci (CA Agen, ch. civ., 15 juin 2020, n° 17/01303).

En l’espèce, la banque Société Générale a consenti un prêt personnel à un artisan pour les besoins du refinancement de son entreprise, afin de la renflouer.

Les échéances de remboursement du prêt sont restées impayées et la banque a prononcé la déchéance du terme du crédit, c’est à dire demander le payement intégral et immédiat de prêt à l’emprunteur défaillant.

Or, l’emprunteur était bénéficiaire du revenu de solidarité active (RSA) et n'a pas signé la fiche des informations personnelles que la conseillère a remplie unilatéralement et qu'elle n’a pas cru nécessaire de lui communiquer.

La fiche de renseignements à l'appui du dossier de demande de prêt indiquait un seul revenu mensuel de 855 euros, soit le seuil de pauvreté en France.

En ajoutant les charges des mensualités de prêt, le taux d'endettement de l’emprunteur était de 46,19 %.

C’est dans ce contexte que l’emprunteur a assigné la banque devant le tribunal de grande instance pour la voir condamner à l’indemniser des préjudices subis suite au manquement à son devoir de d'information, de mise en garde et de conseil.

En effet, l'entreprise était confrontée à un résultat négatif et avait ses comptes bancaires à la même agence que son dirigeant de sorte que la banque ne pouvait ignorer la situation financière difficile de la société.

La banque société Générale ne pouvait donc pas ignorer, dès avant les versements de fonds, qu'elle consentait un crédit équivalent à un prêt à la consommation à un dirigeant d'entreprise qui n'était plus en état de dégager un revenu personnel de son activité professionnelle et qui serait amené à consommer tout ou partie du montant du prêt comme son revenu de substitution.

La cour d’appel a jugé que « la banque qui consent une opération de crédit, au dirigeant d'une société en grande difficulté, ayant pour objet ou pour effet de renflouer celle-ci, participe ainsi à une opération de soutien abusif par personne interposée et doit mettre en garde ce dirigeant, quand il est non averti, des risques qu'il encourt ».

Dans ce contexte, les juges d’appel ont considéré qu’« Indépendamment de l'insincérité de la fiche d'information, la Société Générale a manqué à son devoir de mise en garde ».

Il résulte de cette affaire que la banque qui consent un crédit personnel au dirigeant d'une société en difficulté pour renflouer celle-ci engage sa responsabilité pour soutien abusif comme si elle avait prêté de l’argent à la société elle-même.

Il est aussi important de souligner que la qualité de gérant de société ne confère pas automatiquement le statut d'emprunteur averti et qu’il appartient donc à la banque de prouver que l'emprunteur est averti des conséquences du crédit pour se dégager juridiquement de toute responsabilité.

La cour d’appel a rappelé que la preuve de l'existence de la chance perdue de ne pas souscrire un crédit périlleux incombe au demandeur en réparation et que la réparation de la perte de chance doit être « mesurée à la chance et elle ne peut être égale, ni encore moins supérieure, à l'avantage qu'aurait procuré la chance si elle s'était réalisée ».

Ainsi, les juges évaluent au cas par cas sur la base des éléments et pièces produits aux débats par l’emprunteur, sa détermination à se procurer le crédit convoité et la chance de ne pas risquer avoir à engager ses biens et patrimoine.

Par conséquent, il convient de garder en le mémoire qu’en cas de soutien abusif de sociétés par les banques ou de défaut de mise en garde des emprunteurs sur les conséquences financièrement périlleuses des crédits accordés, ceux-ci disposent d’un droit à l’octroi de dommages et intérêts en réparation de leur perte de chance de ne pas contracter l'emprunt litigieux.

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Anthony Bem
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