Pour mémoire, chaque auteur dispose de droits d’auteur sur sa création, son œuvre de l’esprit.
En effet, l’article 111-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que :
« l'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous ».
Il en résulte que le créateur bénéficie d’une protection sur son œuvre sans formalité et du seul fait de sa création.
Il en va autrement de la cession des droits patrimoniaux d’auteur dont la validité est soumise à certaines mentions obligatoires prévues à l’article L. 131-3 alinéa 1er du code de la propriété intellectuelle.
Ce texte dispose que : « la transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession et que le domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée ».
Autrement dit, la cession de droits d’auteur doit délimiter le domaine d’exploitation de chaque droit cédé, à savoir :
- son étendue
- sa destination
- son lieu
- sa durée
A défaut, la transmission des droits d’auteur est sans effet.
Par ailleurs, la Cour de cassation a jugé que « l'existence d'un contrat de travail conclu par l'auteur d'une oeuvre de l'esprit n'emporte aucune dérogation à la jouissance de ses droits de propriété incorporelle, dont la transmission est subordonnée à la condition que le domaine d'exploitation des droits cédés, soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée » (Cass. Civ. I, 16 décembre 1992, n° 91-11.480).
Ainsi, il convient de souligner que ces conditions de validité s’imposent à tout créateur d’une œuvre, y compris au salarié auteur.
C’est précisément ce qu’est venu rappeler la Cour de cassation le 7 janvier 2015 (Cass. soc., 7 janvier 2015, n°13-20.224).
En l’espèce, Madame X a été embauchée par l'établissement public à caractère industriel et commercial la Cité de la musique (EPICCM) en qualité de coordonnatrice de productions audiovisuelles.
Aux termes d’un avenant à son contrat de travail, Madame X a cédé ses droits de propriété intellectuelle afférents à sa contribution sur la musique savante du XXème siècle.
Cependant, suite à la rupture de son contrat de travail, Madame X a demandé à son ancien employeur le paiement de dommages et intérêts pour atteinte à ses droits patrimoniaux d’auteur attachés aux huit résumés qu’elle avait effectué.
Les juges d’appel ont considéré « qu'il résulte de l'article 8 de l'avenant au contrat de travail que l'intéressée a cédé à titre exclusif et gracieux ses droits de propriété intellectuelle afférents à sa contribution, que cette cession en ce qu'elle est attachée à l'exécution de son contrat de travail n'est pas globale ».
Cependant, la Cour de cassation a cassé la décision des premiers juges en déclarant :
« (…) qu'il résulte de l'article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle que la transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession et que le domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée. »
Autrement dit le fait que le salarié cède « à titre exclusif et gracieux ses droits de propriété intellectuelle » sans aucune précision ne permet pas de délimiter le domaine d’exploitation des droits cédés à l’employeur dans son étendue, sa destination, son lieu et sa durée.
Ainsi, la Cour de cassation a rappelé d’une part, que l’article L.131-3 du code de la propriété intellectuelle doit s’appliquer strictement à toute cession de droits d’auteur, y compris à celle conclue entre le salarié et son employeur, et, d’autre part, que toute clause de cession trop générale est réputée sans effet.
Par conséquent, l’employeur doit établir un contrat de cession dans lequel chaque droit d’auteur cédé de son salarié est bien délimité afin de s’assurer le droit de les exploiter sans risquer d’être condamné pour contrefaçon de droits d’auteur et au paiement de dommages et intérêts dont le montant peut être important dans certains cas.
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Anthony Bem
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