Le tribunal de grande instance de Nanterre, dans son jugement du 8 février 2013, a considéré qu’un échange de télécopies entre un établissement de crédit et une collectivité territoriale contenant toutes les caractéristiques essentielles du prêt, à l’exception du taux effectif global (TEG), constituait un véritable contrat de prêt (TGI Nanterre, 8 février 2013, n° 11/03778).
En outre, dans une autre affaire qui opposait une collectivité territoriale à Dexia sur un contrat de prêt structuré, le tribunal de grande instance de Nanterre a considéré que l’article R 313-1 du code de la consommation:
«s'appliquait à tout prêt, sans distinction de nature, et fixait la nature et le mode de calcul du TEG par conversion du taux de période en taux annuel, selon la méthode proportionnelle, laquelle implique que le taux de période et la durée de celle-ci soient connus des parties » et impose, « depuis 1997, que le prêteur précise le taux de période unitaire et la durée de celle-ci, y compris pour les prêts consentis à des personnes morales de droit public ».
N'ayant pas communiqué à la commune le taux de période et sa durée, Dexia n'a pas respecté les prescriptions d'ordre public relatives au TEG dont la sanction est la nullité de la stipulation d'intérêts et la substitution du taux légal au taux contractuel depuis la conclusion du contrat de prêt. (TGI Nanterre, 6e ch., 7 mars 2014, n° 12/06737)
Ces deux décisions du tribunal de grande instance de Nanterre montrent combien les prêts structurés souscrits par les collectivités locales sans mention du TEG, ou avec un TEG erroné peuvent être facilement remis en cause et engendrer des frais considérables pour la banque.
L’échange de télécopies préalable à la signature du contrat, sans mention du TEG, ayant été une pratique courante, ces décisions pourraient être appliquées à un grand nombre de prêts (prêts à la consommation ou prêt immobilier) et font donc peser sur les établissements de crédit concernés un risque financier considérable.
Nous envisagerons ci-après :
- Le taux effectif global (I)
- L’obligation de mention du TEG dans les crédits à la consommation ou immobilier (II)
I. Le taux effectif global (TEG)
Le taux effectif global est une des mentions obligatoires portées à la connaissance du consommateur intéressé par une offre de crédit à la consommation ou immobilier.
Il se définit comme le taux réellement pratiqué pour une opération de crédit déterminée.
La méthode de calcul du taux effectif global est définie à l'article R. 313-1 du code de la consommation, lequel dispose :
« Sauf pour les opérations de crédit mentionnées au 3º de l'article L. 311-3 et à l'article L. 312-2 du présent code pour lesquelles le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires, le taux effectif global d'un prêt est un taux annuel, à terme échu, exprimé pour cent unités monétaires et calculé selon la méthode d'équivalence définie par la formule figurant en annexe au présent code. Le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l'emprunteur.
Le taux de période est calculé actuariellement, à partir d'une période unitaire correspondant à la périodicité des versements effectués par l'emprunteur. Il assure, selon la méthode des intérêts composés, l'égalité entre, d'une part, les sommes prêtées et, d'autre part, tous les versements dus par l'emprunteur au titre de ce prêt, en capital, intérêts et frais divers, ces éléments étant, le cas échéant, estimés.
Lorsque la périodicité des versements est irrégulière, la période unitaire est celle qui correspond au plus petit intervalle séparant deux versements. Le plus petit intervalle de calcul ne peut cependant être inférieur à un mois.
Pour les opérations mentionnées au 3º de l'article L. 311-3 et à l'article L. 312-2, lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre que annuelle, le taux effectif global est obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l'année civile et celle de la période unitaire. Le rapport est calculé, le cas échéant, avec une précision d'au moins une décimale. »
L'indication du TEG doit être faite par écrit pour permettre à l'emprunteur de connaître le coût global du prêt proposé, tous frais compris.
A cet égard, l’alinéa premier de l’article L. 313-2 du code de la consommation dispose :
« Le taux effectif global déterminé comme il est dit à l'article L. 313-1 doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt régi par la présente section. »
Et l’article 1907, alinéa 2 du code civil dispose :
« Le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit ».
Ainsi, la Cour de cassation a jugé que l'indication du taux d'intérêt sur les relevés de comptes ne saurait suppléer l'absence d'un accord écrit mentionnant le taux, même si cette indication n'a fait l'objet d'aucune protestation de la part du client (Cass, civ. I, 17 janv. 1995).
Par ailleurs, les éléments permettant de déterminer le taux effectif global, conformément à l'article L. 313-1, alinéa 1 du code de la consommation, sont:
- le taux d'intérêt proprement dit, qui correspond à la rémunération du prêteur;
- les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, notamment :
- les frais fiscaux répercutés sur l'emprunteur,
- les primes d'assurance-vie lorsque la souscription de cette assurance a été exigée de l'emprunteur,
- les frais directement payés par l'emprunteur à un intermédiaire.
Toutefois, ne sont pas inclus dans le calcul du TEG :
- les charges liées aux garanties du prêt (C. consom, art. L. 313-1, al. 2).
- les frais d'assurance (CA Paris, 11 janvier 1982), sauf si l'assurance est obligatoire (Cass, crim, 12 octobre 1976 ; Cass, civ. I, 24 novembre 2004, no 02-13.206)
- les frais d'officiers ministériels (exemple les frais du notaire).
II. L'obligation de mention du taux effectif global dans les contrats de crédit à la consommation ou crédit immobilier
La combinaison de L'article L. 313-2 du code de la consommation avec l'article 1907 du code civil a conduit la jurisprudence à préciser que l'obligation d'indication écrite du taux effectif global est une règle d'application générale qui s'applique quelle que soit la forme qu'emprunte la convention de prêt .
Par ailleurs, la Cour de cassation exige que le taux effectif global soit communiqué par écrit à chaque modification du taux, si le taux mentionné dans l'acte de prêt est stipulé variable en fonction du taux de base de la banque. (Cass, civ. I, 19 octobre 2004, no 01-17.091).
En matière de découverts en compte, le préteur (la banque) doit fournir à l’emprunteur une double information à savoir :
- la mention d'un taux effectif global indicatif par un ou plusieurs exemples chiffrés ;
- et la mention du taux effectivement pratiqué par la banque ou l’établissement de crédit.
Ainsi, la chambre commerciale a précisé que :
« en cas d'ouverture de crédit en compte courant, l'obligation de payer dès l'origine les agios conventionnels par application du taux effectif global exige non seulement que soit porté sur un document écrit préalable, à titre indicatif, le taux effectif global, mais aussi que le taux effectif global appliqué soit porté sur les relevés périodiques sans protestations ni réserve ; à défaut de cette première exigence, les agios ne sont dus qu'à compter de l'information régulièrement reçue et à défaut de la seconde exigence, la seule mention indicative de ce taux ne vaut pas, s'agissant d'un compte courant, reconnaissance d'une stipulation d'agios conventionnels » (Cass, com. 20 février 2007, no 04-11.989).
En outre, l'article R. 313-1 du code de la consommation prévoit également l'obligation de communiquer expressément à l'emprunteur le taux de période et la durée de la période (Cass, civ. I, 19 septembre 2007, no 06-18.924).
De même, la Cour de cassation a eu l'occasion de préciser que l'obligation de mention écrite du taux effectif global est une « condition de validité de la stipulation d'intérêts » (Cass, civ. I, 21 janvier 1992, no 90-18.120), de sorte que la fixation écrite du seul taux de l'intérêt conventionnel est insuffisante (Cass, civ. I, 29 juin 2004, no 02-12.598).
Par ailleurs, en application de l'article L. 313-2 du code de la consommation, la méconnaissance de l’obligation de mention écrite du taux effectif global ou TEG est pénalement sanctionnée.
La sanction pénale vise le défaut de mention du taux effectif global et non le défaut de communication expresse du taux de période et la durée de la période.
La sanction consiste en une amende prévue par l'article L. 313-2, alinéa 2, laquelle passe, avec la loi du 17 mars 2014, de 4 500 à 150 000 €.
À ce sujet, il doit être noté que la circulaire d'application de l'article 32 de la loi du 1er août 2003 concernant l'usure prend soin de préciser qu'en dépit du déplafonnement des taux d'intérêts et de la dépénalisation de l'usure pour les personnes morales, la sanction pénale du défaut de mention du taux effectif global continue de recevoir application quelle que soit la nature du prêt, découvert en compte ou crédit classique, et quel que soit le destinataire de la convention de prêt, personne physique ou personne morale.
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Anthony Bem
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