Dieudonné a le palmarès des décisions de condamnation en justice : Cour de cassation, Conseil d’Etat, tribunaux correctionnels et la Cour européenne des droits de l’homme depuis le 10 novembre 2015.
La Cour de cassation et le Conseil d’Etat ont déjà eu l'occasion de condamner Dieudonné pour injure raciale envers les personnes d'origine ou de confession juive (Cass. Crim., 16 octobre 2012, N°11-82866) et ont interdit son spectacle pour risques sérieux d'atteintes à la dignité humaine par le Conseil d’Etat (Conseil d’Etat, Ministre de l'Intérieur c/ Société Les Productions de la Plume et M. Dieudonné M'Bala M'Bala, 9 janvier 2014, n° 374508).
Plus récemment, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a dû se prononcer sur la condamnation de Dieudonné M’Bala M’Bala, pour injure publique envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, en l’espèce les personnes d’origine ou de confession juive en France (CEDH, M’Bala M’Bala c. France, 10 novembre 2015, n° 25239/13).
En l’espèce, lors de son spectacle en décembre 2008, Dieudonné a invité Robert Faurisson, universitaire condamné à plusieurs reprises pour ses thèses négationnistes et révisionnismes concernant l’existence des chambres à gaz dans les camps de concentration.
Dieudonné lui fit remettre par un acteur portant le pyjama rayé évoquant celui des déportés juifs, avec une étoile jaune cousue portant la mention « juif », le « prix de l’infréquentabilité et de l’insolence ».
Ce prix était matérialisé par un chandelier coiffé de trois pommes.
Les juridictions françaises et la Cour de cassation n'ont pas jugé que l'humour de Dieudonné relevait de la liberté d'expression mais comme des propos incitant à la haine raciale qui justifiait sa condamnation pour injure publique envers des personnes d’origine ou de confession juive.
Après avoir épuisé les recours en France, Dieudonné a cru pouvoir saisir la Cour européenne des droits de l’homme le 10 avril 2013, en invoquant les articles 7 (pas de peine sans loi) et 10 (liberté d’expression).
Dieudonné prétendait de manière totalement absurde et fantaisiste « avoir cherché à démontrer qu'en France, toute allusion à la Shoah qui ne va pas dans le sens du respect imposé est vécue comme une agression, tandis que la contestation d'autres génocides est tolérée ».
Toutefois selon la CEDH, Dieudonné ne pouvait pas valablement invoquer la protection de la liberté d’expression car « il ne s’agissait pas d’un spectacle qui, même satirique ou provocateur, relèverait de la protection de l’article 10 de la Convention : dans les circonstances de l’espèce, il s’agissait de l’expression d’une idéologie qui va à l’encontre des valeurs de la Convention, à savoir la justice et la paix. »
Au contraire, selon la Cour, il s’agissait « d’une démonstration de haine et d’antisémitisme, ainsi que d’une remise en cause de l’holocauste. Travestie sous l’apparence d’une production artistique, elle est aussi dangereuse qu’une attaque frontale et abrupte. »
La Cour européenne des droits de l’homme a ainsi jugé que cette partie du spectacle de Dieudonné ne pouvait pas bénéficier de la protection accordée par la liberté d'expression et a déclaré, à la majorité, la requête de Dieudonné comme irrecevable.
Si peu ont été sensibles au fait que des membres de la famille de l'un des terroristes des attentats du Bataclan à Paris, du 13 novembre 2015, étaient au même moment que l'attaque en train de voir le spectacle de Dieudonné, on ne peut s'empêcher de repenser aux termes de l'arrêt qui parle de son spectacle comme "d’une démonstration de haine et d’antisémitisme", "sous l’apparence d’une production artistique, elle est aussi dangereuse qu’une attaque frontale et abrupte" ... Quelle ironie tragique.
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Anthony Bem
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