Sur la version française du site américain Tripadvisor, il est indiqué que « Steve Kaufer a co-fondé TripAdvisor en 2000 avec pour mission d'aider les voyageurs à travers le monde à planifier le voyage parfait ».
A ce titre, dans la rubrique « Hôtels pour les destinations les plus recherchées », le site annonce :
« Quel que soit le type d'hôtel que vous préférez, grande chaîne internationale ou petit hôtel de charme, TripAdvisor vous propose des avis objectifs d'authentiques voyageurs sur la plupart des établissements du monde entier. Des millions de personnes viennent ici pour partager leur expérience sur les hôtels, les chambres d'hôtes, etc. Vous aussi, venez donner votre avis et aidez les autres voyageurs à organiser le voyage idéal ».
Autrement dit, les avis du site Tripadvisor se présentent comme étant ceux de vrais voyageurs.
Ainsi, l’internaute doit s’attendre à des informations fiables et objectives pour orienter ses choix.
En l’espèce, après avoir été saisie par une association de consommateurs et une association des professionnels de l’hôtellerie, l’Autorité garante de la concurrence et du marché d’Italie (dite AGCM) a ouvert une enquête sur les avis du site Tripadvisor publiés depuis 2011.Â
A l’issue de l’enquête, l’AGCM en a déduit la « diffusion d’informations trompeuses sur les sources des commentaires ». Â
En effet, l’Autorité a souligné que le site Tripadvisor met en évidence le caractère authentique des commentaires publiés par les utilisateurs notamment pour accroître la confiance des consommateurs.
Cependant, l’enquête a révélé que certains avis provenaient en réalité de professionnels et non de véritables voyageurs.
Dès lors, l’AGCM a estimé qu’il s’agissait de pratiques commerciales trompeuses au sens des articles 20, 21 et 22 du code de la consommation italien.
A ce titre, l’Autorité a ordonné à la société américaine Tripadvisor et sa filiale italienne de payer solidairement une amende administrative de 500.000 euros et de lui transmettre les mesures envisagées pour la suppression du caractère trompeur de l’information sur les sources des avis diffusés par le site.
Cette décision de l’Autorité de la concurrence italienne rappelle que le 1er février 2012 l’Agence de Vérification de la publicité du Royaume-Uni avait ordonné à Tripadvisor de ne plus prétendre ou laisser entendre que tous les commentaires qui apparaissent sur son site internet sont de vrais voyageurs, honnêtes, réels ou de confiance.
Ainsi, la question du caractère sincère des avis n’est pas nouvelle.Â
En France, la diffusion d’avis non sincères sur internet est aussi pénalement sanctionnable (1) et il existe des moyens récents permettant de lutter contre les faux avis publiés sur internet (2).
1) La diffusion d’avis non sincères sur internet pénalement sanctionnable
Le droit de la consommation permet de sanctionner la diffusion de faux avis sur internet qualifiée de pratiques commerciales trompeuses.
Pour mémoire, l’article L 121-1 du code de la consommation dispose que :
« Une pratique commerciale est trompeuse [...] lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur [...].
Une pratique commerciale est également trompeuse [...] lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale ».
Ces pratiques constituent des infractions et sont pénalement sanctionnées d’un emprisonnement de deux ans et/ou d’une amende de 37.500 euros. Cette amende est quintuplée lorsqu’il s’agit de personnes morales telles que des sociétés et peut être portée à 50 % des dépenses de la publicité ou de la pratique constituant le délit.
Outre les peines précitées, le tribunal peut ordonner la publication du jugement ainsi que la diffusion, aux frais du condamné, d'une ou de plusieurs annonces rectificatives.
Dès lors, les sites d’avis de consommateurs sont exposés à de lourdes sanctions en cas de diffusion d’informations trompeuses concernant les sources et le contenu des avis.
2) Les moyens récents de lutte contre la diffusion d’avis non sincères sur internet
La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (dite DGCCRF) joue un rôle important dans la lutte contre les faux avis de consommateurs sur internet.
En effet, celle-ci a été amenée à procéder à une enquête spécifique.
Cette dernière a pu révéler que « le taux d’anomalies (…) est en augmentation : il avoisine les 45%, tous secteurs confondus, pour l’année 2013 ».
Aussi, la DGCCRF est compétente pour mener des investigations lors de litiges concernant des sociétés gestionnaires de sites d’avis de consommateurs.
A titre d’exemple, suite à des investigations de la DGCCRF, le 20 juin 2014 le TGI de Paris a condamné une société gestionnaire d’un site internet à 7.000 euros d’amende, et son gérant à 3000 euros d’amende ainsi qu’à la publication d’un communiqué sur le site internet aux frais du condamné, pour des pratiques commerciales trompeuses à savoir :
- la rédaction et la publication de faux avis de consommateurs rédigés pour partie par une société domiciliée à Madagascar et pour une autre partie par le gérant et des proches de son entourage.
Enfin, l’Association Française de Normalisation (l’AFNOR) a publié en juillet 2014 la norme NF Z 74-501 permettant de lutter contre les faux avis et de certifier les sites internet aux normes.
Toutefois, il s’agit d’une norme volontaire pour fiabiliser le traitement des avis en ligne de consommateurs.
Concrètement cette norme est dépourvue de caractère impératif en tant que telle.
En effet, c’est au gestionnaire de décider de la mise en conformité de son site internet avec la norme NF Z 74-501.
Dans le cas où le gestionnaire s’approprie la norme, celui-ci peut déclarer lui-même respecter la norme.
Le cas échéant le site peut engager sa responsabilité et doit prouver sa conformité en cas de demande de la part d’une autorité.
Aussi, le site peut faire appel à un organisme de certification indépendant, pour vérifier la conformité et en attester notamment auprès des internautes.
Dès lors, il ne s’agit pas d’une démarche répressive mais d’un système d’autorégulation dont le but est d’échapper à toute sanction.
La décision précitée de l’Autorité garante de la concurrence et du marché d’Italie de sanctionner lourdement la société américaine Tripadvisor et sa filiale italienne s’inscrit quant à elle dans une démarche répressive.
Ces décisions démontrent l’importance d’une bonne gestion de leur E-réputation par les professionnels du tourisme, les hôteliers et les restaurateurs sur les sites internet d’avis afin de lutter contre les faux avis dont ils seraient victimes.
Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).
Anthony Bem
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