Pour mémoire, l’article 843, alinéa 1er, du code civil dispose que :
« Tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.
De plus, l’article 860, alinéa 1er, du code civil dispose que :
« Le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation ».
Par ailleurs, la propriété d’un bien se divise en réalité en trois droits différents : l’usus, le fructus et l’abusus :
- l’usufruit (usus et fructus) qui représente à la fois le pouvoir d’user du bien, c'est-à-dire concrètement y habiter mais aussi celui de percevoir des fruits de ce bien tels que des loyers.
- la nue propriété (l’abusus) qui représente le droit de disposer du bien, c'est-à-dire de le céder.
La réunion de ces trois prérogatives forme le droit de propriété d’un bien.
Ainsi, la valeur des droits démembrés du droit de propriété est inférieure à celle de la pleine propriété du bien en question .
Ainsi, se pose la question de savoir quelle est la valeur que doit rapporter à la succession le donataire, c'est-à-dire le bénéficiaire de la donation : uniquement la valeur de la nue-propriété our celle de la pleine propriété du bien ?
En l’espèce, Monsieur X est décédé en laissant pour lui succéder ses deux enfants Roger et Evelyne.
Par acte notarié, il avait fait donation à son fils, Roger, de la nue-propriété d’une maison, s’en réservant l’usufruit.
Les parties à l’acte notarié avaient pris le soin d’évaluer l’usufruit de Monsieur X à 3/10èmes de la valeur en pleine propriété.
Evelyne a fait assigner Roger en liquidation de la succession de leur défunt père.
Le 29 mars 2010, la Cour d’appel de Douai a jugé que Roger doit rapport à la succession de son père de la valeur de la nue-propriété de l’immeuble qu’il a reçue de ce dernier au jour de l’acte notarié.
Mais les juges de cassation ont cassé et annulé cet arrêt d’appel en considérant qu’« en cas de donation en nue-propriété avec, comme en l’espèce, réserve d’usufruit au profit du donateur, la valeur à prendre en compte est celle de la pleine propriété du bien ».
Cet arrêt est donc important pour toutes les procédures de liquidation partage successorale dans lesquelles des donations en nue-propriété avec réserve d’usufruit au profit du donateur sont intervenues du vivant du défunt puisque le calcul du rapport devra se faire sur la base de la valeur de la pleine propriété du bien et non simplement sur celle de l’usufruit.
Cet arrêt s’inscrit dans une certaine logique qui veut qu’après l’extinction de l’usufruit au décès du donateur, le donataire se trouve investi de la pleine propriété de l’immeuble.
Ainsi, le rapport est dû de la valeur du bien donné à l’époque du partage, d’après son état à l’époque de la donation.
Je suis à votre disposition pour toute information ou action.
PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01
Email : abem@cabinetbem.com