En l'espèce, la société Doweb exploite un logiciel dénommé “FacebookDislike” ou “Dislike” permettant à ses utilisateurs d'indiquer sur le site internet qu'ils n'aiment pas une publication (photo, statut, etc.).
L'un des associés de cette société a assigné les autres associés de celle-ci afin de faire reconnaître ses droits d'auteur sur ce logiciel et obtenir réparation de son préjudice.
L'instance engagée par le demandeur n'avait pas pour objet de comparer le logiciel revendiqué avec un logiciel argué de contrefaçon qui aurait été créé par les défendeurs, mais de statuer sur le bien fondé de sa revendication de ses droits d'auteur sur le logiciel “FacebookDislike” créé avec les défendeurs.
En défense, les associés invoquaient la nullité de ces constats ou à tout le moins leur défaut de valeur probante en raison du non-respect des règles jurisprudentielles et de la norme Afnor NFZ67- 147 du 11 septembre 2010 concernant le “mode opératoire de procès-verbal de constat sur internet effectué par huissier de justice”.
En effet, unes des particularités du droit de l'Internet sont que :
- la preuve d'un fait ou de la diffusion d'un contenu litigieux diffusé sur internet (photographies, vidéos ou propos) suppose la réalisation d'un constat d'huissier de justice ou d'un expert indépendant (Centre d'expertise Celog ou l'Agence pour la Protection des Programmes) ;
- la validité des procès-verbaux de constat sur internet suppose le respect et la description du mode opératoire fixé par la jurisprudence.
En effet, cette description permet de garantir le sérieux et la réalité d'un fait sur internet, même si la technique, la technologie et les huissiers ont leurs limites de sorte que rien ne permet de garantir à 100% la fiabilité des constats réalisés.
A cet égard, il convient de souligner l'absence totale de règle légale et de compétence d'expertise exclusive des Huissiers de justice en matière de constat sur internet, de sorte qu'il est toujours possible de combattre ou réfuter un constat en ligne.
Au cas présent, il était reproché à l'huissier de justice ayant procédé aux constatations de ne pas avoir respecté l'ensemble des règles jurisprudentielles relatives à la force probante des constats effectués sur internet, à savoir :
- s'être connecté directement à des URL complexes sans avoir parcouru le cheminement normal d'un internaute,
- l'absence d'indication si l'ordinateur utilisé était ou non connecté par le biais d'un serveur proxy,
- l'absence de vérification des serveurs DNS comme le prévoit la norme Afnor,
- l'absence d'annexes des copies d'écran aux constats.
Les juges d'appel ont confirmé le premier jugement en posant le principe selon lequel la norme Afnor NFZ67-147 « n'a pas un caractère obligatoire et ne constitue qu'un recueil de recommandations de bonnes pratiques ».
Par conséquent, le seul non-respect de cette norme par les constats d'huissiers de justice n'entraîne pas leur nullité et ne permet pas d'en demander l'annulation devant les juges.
Les juges ont profité de l'occasion pour poser une liste précise de pré-requis techniques conditionnant la validité des procès-verbaux de constats d'huissier de justice sur internet intitulé « diligences préalables nécessaires et suffisantes à la validité et à la force probante d'un constat effectué sur internet », à savoir :
- la description du matériel ayant servi aux constatations (ordinateur et imprimante),
- l'indication de l'adresse IP de l'ordinateur ayant servi aux opérations de constat,
- le vidage des caches de l'ordinateur préalablement à l'ensemble des constatations,
- la désactivation de la connexion par proxy : l'huissier instrumentaire doit bien indiqué que le logiciel de navigation utilisé est configuré pour ne pas utiliser de serveur proxy afin d'établir que l'ordinateur utilisé n'était pas connecté à un serveur proxy au moment des opérations de constat.
- la suppression de l'ensemble des fichiers temporaires stockés sur l'ordinateur,
- la suppression de l'ensemble des cookies et de l'historique de navigation.
Par ailleurs, les juges ont estimé que le fait que l'huissier de justice se soit rendu directement sur les pages en ligne à partir d'adresses URL communiquées par son client, sans passer par le site internet d'origine, ne porte pas atteinte à la validité et à la valeur probante de ces constats qui établissent seulement l'existence des pages litigieuses depuis ces adresses dont les intitulés démontrent qu'il s'agit bien de pages auxquelles l'internaute peut accéder à partir des sites internet d'origine.
Dans ce contexte, les juges de première instance et d'appel ont notamment considéré que les procès-verbaux de constat sur internet étaient valables et rejeté la demande de nullité.
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Anthony Bem
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