La vente d'un bien indivis sans l'accord de tous les co-indivisaires

Publié le 27/01/2014 Vu 63 446 fois 54
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

Quelles sont les conditions pour pouvoir vendre un bien indivis sans l'accord de tous les co-indivisaires ?

Quelles sont les conditions pour pouvoir vendre un bien indivis sans l'accord de tous les co-indivisaires ?

La vente d'un bien indivis sans l'accord de tous les co-indivisaires

Le 4 décembre 2013, la Cour de cassation a jugé qu'un indivisaire peut être autorisé à conclure seul un acte de vente lorsque celle-ci est justifiée par l'urgence et l'intérêt commun (Cass. Civ. I, 4 décembre 2013, N° de pourvoi: 12-20158).

En effet, le juge dispose du pouvoir de permettre à un indivisaire de pallier l'absence ou la carence d'un autre co-indivisaire.

Ainsi, pour mémoire, l'article 815-5 du code civil dispose que :

« Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d'un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l'intérêt commun.
Le juge ne peut, à la demande d'un nu-propriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d'un bien grevé d'usufruit contre la volonté de l'usufruitier.
L'acte passé dans les conditions fixées par l'autorisation de justice est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut ».

De plus, l'article 815-6 alinéa 1 du code civil dispose que :

« Le président du tribunal de grande instance peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun ».

En l'espèce, Monsieur X a signé une promesse de vente d'un immeuble au profit d'un acheteur, l'acte prévoyant sa réitération par acte authentique à une date précise.

Cependant, Monsieur X est décédé avant cette date et a laissé pour lui succéder, son épouse et leur fils mineur, ainsi qu'une fille née d'une première union.

Les héritiers se sont donc tous retrouvés en indivision sur le bien laissé en héritage par le défunt et qui avait été promis à la vente.

Or, la veuve s'est opposée à la réitération de la vente de sorte que la vente n'a pas pu se faire.

La fille du défunt a saisi le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, pour être autorisée à signer seule l'acte authentique de vente du bien indivis, en application des articles 815-5 et 815-6 du code civil.

Conformément à la jurisprudence, l'autorisation judiciaire de l'indivisaire à passer seul un acte de vente d'un immeuble indivis suppose qu'un co-indivisaire mette en péril l'intérêt commun des indivisaires.

Eu égard à l'urgence et l'intérêt commun, les juges des référés et d'appel ont autorisé la signature de l'acte authentique de vente de l'immeuble de sorte qu'un indivisaire à pu passer seul un acte de vente d'un immeuble indivis, sans le consentement de tous les co-indivisaires.

La cour de cassation a confirmé cette position en jugeant que :

« il entre dans les pouvoirs que le président du tribunal de grande instance tient de l'article 815-6 du code civil d'autoriser un indivisaire à conclure seul un acte de vente d'un bien indivis pourvu qu'une telle mesure soit justifiée par l'urgence et l'intérêt commun ; qu'ayant constaté la réunion de ces deux conditions, l'arrêt est légalement justifié ».

Par conséquent, malgré la règle de l’unanimité applicable en cas d’indivision, le refus d’un indivisaire de conclure un acte projeté par un co-indivisaire peut être contourné par le juge en cas d'urgence et si c'est dans l'intérêt commun.

S'agissant de l'intérêt commun, il n'a pas été soutenu que la vente projetée eut été contraire aux intérêts de l'indivision.

L'urgence était suffisamment caractérisée par la volonté des parties signataires du compromis de réitérer leur accord par acte authentique avant une date convenue.

La condition exigée par l'article 815-5 du code civil, tenant à ce que le refus du co-indivisaire mette en péril l'intérêt commun, n'a donc pas à être est remplie.

Ainsi, aux termes de cette jurisprudence le juge peut autoriser, en application de l'article 815-6 du code civil précité, un propriétaire indivis à signer seul l'acte de vente d'un immeuble dépendant d'une succession ou d'une indivision malgré le refus d'un autre co-indivisaire, sans que soit remplie la condition tenant à ce que le refus de consentir à cet acte, relevant de l'article 815-5 du code civil, mette en péril l'intérêt commun des indivisaires.

Cette décision est donc importante en pratique puisqu'elle permet dorénavant au juge des référés d’autoriser un indivisaire à conclure seul un acte de vente d’un bien indivis pourvu qu’une telle mesure soit justifiée par l’urgence et l’intérêt commun et sans avoir à justifier le péril de l'intérêt commun des indivisaires.

L'absence de péril de l'intérêt commun des indivisaires étend donc les possibilités d'action des indivisaires qui souhaitent revendre leur bien indivis sans avoir à passer par une procédure de licitation judiciaire longue, coûteuse et aléatoire.

Enfin, selon la jurisprudence, la cession d'un bien indivis ne réalise pas un partage et le prix de cession se substitue dans l'indivision au bien vendu.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01

Email : 
abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1435 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

1 Publié par Jibi7
02/02/2014 13:41

Merci Maître de nous informer sur ce sujet,

Par contre vu mes (mauvaises)expériences je doute de pouvoir faire appliquer cette jurisprudence dans le cas de l'indivision(50/50) post conjugale (si ma mémoire est bonne un des articles 815....requérait 2/3 pour pouvoir agir.)
-->prestation non réglée depuis 2008, parce que transformée a posteriori en partie du patrimoine indivis..
-->partage judiciaire bloqué depuis 2010
--> expertises judiciaires tardives en 2012 remettant en cause les bases de décisions.
-->Escroqueries, fraudes (encore au cours du partage) aux jugements prescrites, refusées etc..
-->Référé refusé en 2010 (dettes et charges indivises..)au prétexte que le partage venait d'être demandé par moi..
etc....
Comment obtenir une vente partielle du patrimoine pour, en priorité régler prestation, surtout dettes de l'indivision et travaux urgents mettant en péril le patrimoine (toit, installation électrique etc..)
ou simplement pouvoir louer en permettant d'emprunter pour ces travaux .
Comment obtenir qu'une offre d'achat partiel(1/3) puisse être retenue pour débloquer la situation et éviter expulsion etc...?
Le seul "intérêt commun " de l'autre indivisaire est la dégradation supplémentaire du patrimoine (déjà + de 35% expertisés) et d'obtenir le rachat a vil prix avec expulsion de son ex..(20 ans après l'abandon du domicile!)
Les situations respectives financières (en rapport de 1 à 7) ne me permettant plus de payer défenseurs comme notaires à la mesure des compétences requises.
(Même les délais de révision semblent dépassés..la CDH rajouterait 10 ans de plus !....)
..Donc si vous avez des "filons" pour que les articles 815-4,6,9...s'appliquent de même manière aux indivisions successorales que post communautaire..vos infos seront bienvenues à défaut de pouvoir vous faire intervenir hors de votre juridiction!
Bon dimanche

2 Publié par Maitre Anthony Bem
02/02/2014 16:20

Bonjour Jibi7, la vente peut se faire sous les mêmes conditions, que l'indivision du bien relève d'une indivision successorale ou s'inscrive dans le cadre d'une propriété indivise entre époux. Par ailleurs, l'offre d'achat doit être totale et non partielle. Enfin, sachez que je peux plaider devant l'ensemble des juridictions nationales pour ce type de litiges. Cordialement. Anthony Bem avocat

3 Publié par Jibi7
02/02/2014 18:21

"l'offre d'achat doit être totale et non partielle"
dites vous : cela équivaut à me dessaisir de ma moitié et m'expulser de ma residence principale..!
A moins que le rachat soit en sci avec un ou des acquereurs puisse resoudre le probleme.

Votre situation parisienne ne me laisse à penser qu'à
la revision si vous etes en relation avec des conseils a la cour.
Ma situation matérielle ne me permet pas-plus l'avance de frais à la mesure de ces procédures
et je ne suis plus d'age à vendre mes charmes même au plethorique barreau strass-bourgeois (+ de 900 avocats)
Pardonnez l'humour noir comme votre robe, mais croyez que c'est bien de l'humour desespéré!
Bonne soirée

4 Publié par Visiteur
28/10/2015 18:36

Bonjour,
Je suis en indivision post patrimoniale avec une liquidation en cours par notaire expert nommé par le TGI.
J'occupe le bien et ai réussi à fédérer mes voisins pour profiter d'un nouveau PLU et vendre à un promoteur. J'ai obtenu une offre de promoteur 50% supérieure à la valeur estimée avec date limite de l'offre sous un mois. Madame refuse la signature car elle veut qu'un accord sur le partage soit signé avant la promesse de vente. Sa motivation est de remettre en cause les fondements du partage obtenu en cours d'appel dans le cadre d'une liquidation partage judiciaire. Dit autrement un chantage en bon et due forme.
Les conditions de mise en péril des intérêts de l'indivision (perte de plusieurs centaines de milliers d'euros) si on ne signe pas avec le promoteur et le caractère urgent (délais donné par le promoteur pour signer l'acte authentique) sont-elles suffisantes pour obtenir un référé m'autorisant à vendre seul ?
Sachant qu'un notaire m'a dit aujourd'hui qu'il n'y a pas caractère d'urgence donc que je serai débouté.
Merci de votre avis

5 Publié par Maitre Anthony Bem
28/10/2015 20:46

Bonjour FBDC,

Je vous confirme que les conditions de mise en péril des intérêts de l'indivision et que le caractère d'urgence me semble vous permettre d'obtenir en référé une autorisation de vendre seul.

L'appréciation du caractère d'urgence est une question d'appréciation subjective par les juges.

Cordialement.

6 Publié par Visiteur
20/11/2015 20:03

bonjour Monsieur,
nous sommes en indivisión d'un bien immobilier comme suit,A=50% du bien ,B,C,D= 16.666% chacuns ; D est le seul a vouloir vendre ,peut il le faire alors que les autres ne veulent pas??? (A etant en maison de retraite,les autres vont dans cet appartement juste lorqu'ils viennent visiter A. B et C habitent a plus de 600 kilometres, D habite a 15 kilometres.

Cordialement

7 Publié par Maitre Anthony Bem
20/11/2015 20:46

Bonjour rene,

Un seul des indivisaires peut faire vendre le bien mais seulement par le biais d'une procédure de liquidation de l'indivision sur assignation en justice et de vente judiciaire par adjudication ordonnée par le juge à défaut d'accord amiable, peu importe les droits de chacun sur le bien.

Cordialement.

8 Publié par Visiteur
29/11/2015 01:44

Bonsoir Maître,

Mon ex concubin habite seul le bien et je me suis relogé pour ma tranquillité.
En revanche depuis 5 ans celui-ci fait tout son possible pour faire traîner la procédure alors même que le TGI et la cour d'appel s'est déjà prononcé.
J'apprends qu'il part pour 4 à 5 jours et je souhaite booster la récupération du bien soit en :
- Entrant pour, à mon tour "proprement sans casse" afin de "squatter le bien" (les contrats EDF et eau sont encore aux 2 noms même le compte joint depuis lequel seul Mr paye le crédit), et attendre son retour en sachant que cela est voué à de grosses embrouilles quotidiennes et à mes risques et périls même en changeant le barillet de la serrure....
- Entrant pour retirer les pans de fenêtres de toute la maison (que j'ai moi même financer et dont j'ai encore la facture) et changer aussi le barillet de la porte d'entrée, et d'attendre sans habiter dedans que Mr fasse une effraction....
En sachant que j'ai demandé au tribunal une indemnité d'occupation
quand même...
En faite, je cherche une solution d'urgence pour accélérer la récupération de mes fonds financiers d'origine ou mon bien y compris si je dois retourner devant un juge, en attendant la reprise ou la vente.
Car, depuis Juillet 2014, la mairie a déposé une mise en péril imminente sur l'annexe de la maison, et Mr ne prend absolument pas soin du bien au contraire.
Faut-il sinon saisir un huissier pour faire constater ?

Merci pour vos éventuels conseils.

Très cordialement

9 Publié par Maitre Anthony Bem
29/11/2015 07:51

Bonjour Dus,

Je ne pense pas que vous faire justice à vous même accélérera la procédure en cours.

Au contraire, cela risque finalement de se retourner contre vous.

Afin de me permettre de prendre connaissance de votre situation personnelle en détail et de disposer de toutes les informations nécessaires pour vous répondre, je vous suggère de me contacter en privé pour une consultation.

A cet égard, je vous invite à choisir l'une de mes différentes modalités de consultation proposées dans la rubrique "services" en haut de page.

Cordialement.

10 Publié par victimedenotaire
05/12/2015 18:06

Le cousin germain de mon père est mort en 2004. Le défunt ne possédait plus grand-chose à sa mort. Dix ans après le décès, nous sommes contactés par un généalogiste successoral. Sans réponse de sa part, quant à la justification de ses « honoraires », j’ai retrouvé seule le notaire à qui j’ai communiqué les coordonnées de tous les héritiers en aout 2014 afin qu’il nous convoque pour dresser l’acte de notoriété ce qu’il n’a, à ce jour, toujours pas fait, à ma connaissance du moins…
Pour ma part, je suspecte que des spéculations sur un terrain devenu constructible sont à l’origine de notre recherche et aujourd’hui j’apprends par les héritiers signataires du contrat de révélation qu’ils ont reçu une offre d’achat (qui expirait hier) pour le terrain faite par un promoteur qui a eu vent de cette opportunité on ne sait comment… Le généalogiste sert d’intermédiaire entre les héritiers signataires et le promoteur.
Le problème étant que ni ma sœur, ni ma mère sous curatelle, ni moi n’avons reçu cette offre (nous n’avons pas signé la convention de révélation du généalogiste).
Dans votre article vous dites que l’on peut vendre sans l’accord de tous en cas de refus d’un co-indivisaire. Mais que se passe-t-il s’ils le font sans même nous consulter ?

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1435 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles