Le 4 décembre 2013, la Cour de cassation a jugé qu'un indivisaire peut être autorisé à conclure seul un acte de vente lorsque celle-ci est justifiée par l'urgence et l'intérêt commun (Cass. Civ. I, 4 décembre 2013, N° de pourvoi: 12-20158).
En effet, le juge dispose du pouvoir de permettre à un indivisaire de pallier l'absence ou la carence d'un autre co-indivisaire.
Ainsi, pour mémoire, l'article 815-5 du code civil dispose que :
« Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d'un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l'intérêt commun.
Le juge ne peut, à la demande d'un nu-propriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d'un bien grevé d'usufruit contre la volonté de l'usufruitier.
L'acte passé dans les conditions fixées par l'autorisation de justice est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut ».
De plus, l'article 815-6 alinéa 1 du code civil dispose que :
« Le président du tribunal de grande instance peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun ».
En l'espèce, Monsieur X a signé une promesse de vente d'un immeuble au profit d'un acheteur, l'acte prévoyant sa réitération par acte authentique à une date précise.
Cependant, Monsieur X est décédé avant cette date et a laissé pour lui succéder, son épouse et leur fils mineur, ainsi qu'une fille née d'une première union.
Les héritiers se sont donc tous retrouvés en indivision sur le bien laissé en héritage par le défunt et qui avait été promis à la vente.
Or, la veuve s'est opposée à la réitération de la vente de sorte que la vente n'a pas pu se faire.
La fille du défunt a saisi le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, pour être autorisée à signer seule l'acte authentique de vente du bien indivis, en application des articles 815-5 et 815-6 du code civil.
Conformément à la jurisprudence, l'autorisation judiciaire de l'indivisaire à passer seul un acte de vente d'un immeuble indivis suppose qu'un co-indivisaire mette en péril l'intérêt commun des indivisaires.
Eu égard à l'urgence et l'intérêt commun, les juges des référés et d'appel ont autorisé la signature de l'acte authentique de vente de l'immeuble de sorte qu'un indivisaire à pu passer seul un acte de vente d'un immeuble indivis, sans le consentement de tous les co-indivisaires.
La cour de cassation a confirmé cette position en jugeant que :
« il entre dans les pouvoirs que le président du tribunal de grande instance tient de l'article 815-6 du code civil d'autoriser un indivisaire à conclure seul un acte de vente d'un bien indivis pourvu qu'une telle mesure soit justifiée par l'urgence et l'intérêt commun ; qu'ayant constaté la réunion de ces deux conditions, l'arrêt est légalement justifié ».
Par conséquent, malgré la règle de l’unanimité applicable en cas d’indivision, le refus d’un indivisaire de conclure un acte projeté par un co-indivisaire peut être contourné par le juge en cas d'urgence et si c'est dans l'intérêt commun.
S'agissant de l'intérêt commun, il n'a pas été soutenu que la vente projetée eut été contraire aux intérêts de l'indivision.
L'urgence était suffisamment caractérisée par la volonté des parties signataires du compromis de réitérer leur accord par acte authentique avant une date convenue.
La condition exigée par l'article 815-5 du code civil, tenant à ce que le refus du co-indivisaire mette en péril l'intérêt commun, n'a donc pas à être est remplie.
Ainsi, aux termes de cette jurisprudence le juge peut autoriser, en application de l'article 815-6 du code civil précité, un propriétaire indivis à signer seul l'acte de vente d'un immeuble dépendant d'une succession ou d'une indivision malgré le refus d'un autre co-indivisaire, sans que soit remplie la condition tenant à ce que le refus de consentir à cet acte, relevant de l'article 815-5 du code civil, mette en péril l'intérêt commun des indivisaires.
Cette décision est donc importante en pratique puisqu'elle permet dorénavant au juge des référés d’autoriser un indivisaire à conclure seul un acte de vente d’un bien indivis pourvu qu’une telle mesure soit justifiée par l’urgence et l’intérêt commun et sans avoir à justifier le péril de l'intérêt commun des indivisaires.
L'absence de péril de l'intérêt commun des indivisaires étend donc les possibilités d'action des indivisaires qui souhaitent revendre leur bien indivis sans avoir à passer par une procédure de licitation judiciaire longue, coûteuse et aléatoire.
Enfin, selon la jurisprudence, la cession d'un bien indivis ne réalise pas un partage et le prix de cession se substitue dans l'indivision au bien vendu.
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Anthony Bem
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