Face au développement de la copie papier ou numérique d’articles de presse ou de pages de livres, la gestion individuelle des œuvres par leurs auteurs est souvent inefficace.
Pour pallier à cela, la loi a institué des sociétés de perception et de répartition des droits chargées de gérer collectivement les droits d’auteur et droits voisins dans l’intérêt et pour le compte des titulaires de droits.
Cette gestion collective de droits d’auteur peut être volontaire ou obligatoire.
A titre d’exemple, le droit de reproduction par reprographie (photocopies classiques, télécopies, photocopies à l’aide d’une imprimante, etc.) est géré collectivement pour les auteurs et les éditeurs par une société de gestion collective. Â
En effet, pour mémoire, l’article L122-10 du code de la propriété intellectuelle dispose que :
« La publication d'une Å“uvre emporte cession du droit de reproduction par reprographie à une société régie par le titre II du livre III et agréée à cet effet par le ministre chargé de la culture. Les sociétés agréées peuvent seules conclure toute convention avec les utilisateurs aux fins de gestion du droit ainsi cédé, sous réserve, pour les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion, de l'accord de l'auteur ou de ses ayants droit. A défaut de désignation par l'auteur ou son ayant droit à la date de la publication de l'Å“uvre, une des sociétés agréées est réputée cessionnaire de ce droit.Â
La reprographie s'entend de la reproduction sous forme de copie sur papier ou support assimilé par une technique photographique ou d'effet équivalent permettant une lecture directe.
Les dispositions du premier alinéa ne font pas obstacle au droit de l'auteur ou de ses ayants droit de réaliser des copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion.
Nonobstant toute stipulation contraire, les dispositions du présent article s'appliquent à toutes les œuvres protégées quelle que soit la date de leur publication. »
Ainsi, le Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC) est chargé de la gestion collective du droit de reproduction par reprographie du livre et de la presse.
À cet effet, le CFC autorise contractuellement les utilisateurs à effectuer des copies papier ou numériques de publications (articles, pages de livres, etc.) en contrepartie de redevances qu'il reverse aux auteurs et aux éditeurs dont les œuvres ont fait l'objet de reproductions.
Cependant, si le CFC est seul habilité à délivrer des autorisations de reproduction d’extraits de livre et d’articles de la presse, force est de constater qu’il ne peut pas autoriser la commercialisation de telles œuvres sans l’accord du titulaire des droits.
En l’espèce, un avocat a constaté que certains de ses articles, publiés dans diverses revues spécialisées étaient commercialisés, sans son accord, par une société sur son site internet.
L’avocat a alors assigné ladite société en contrefaçon invoquant les dispositions de l’article L.122-10 du code de la propriété intellectuelle relatif à la reproduction des œuvres par voie de reprographie.
Mais, la société a appelé en intervention forcée et en garantie le Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC) qui l’avait autorisée à procéder à une telle commercialisation.
La cour d’appel a donné gain de cause à l'avocat et a condamné la société et le CFC pour contrefaçon.
Cette décision est confirmée par la Cour de cassation qui a considéré que :
« si l’article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle instaure la cession légale du droit de reproduction par reprographie au bénéfice d’une société collective agréée pouvant seule conclure toute convention avec les utilisateurs à des fins de gestion du droit ainsi cédé, ce même texte, en réservant pour les stipulations autorisant les copies aux fins de vente, de location, de publicité ou de promotion, l’accord de l’auteur ou de ses ayants droit, exclut du périmètre de la cession légale toute utilisation à des fins commerciales desdites copies. »
Par conséquent, la Haute juridiction a estimé que la cour d’appel a exactement jugé qu’en reproduisant et en offrant à la vente les œuvres de l’avocat et en permettant cette exploitation sans avoir recueilli l’accord de ce dernier ou de ses ayants droit, la société et le CFC ont porté atteinte aux droits patrimoniaux d’auteur de l’avocat, car ils n’étaient pas fondées à se prévaloir d’une cession tacite ou implicite des droits d’auteur à l’éditeur.
Il résulte de cette décision que si un auteur cède légalement son droit de reproduction par reprographie à une société de gestion collective, cette dernière n’est pas pour autant habilitée à autoriser la commercialisation de ses publications sans le consentement de l’auteur.
De ce fait, si des copies d’articles ou d’extraits de livres sont mises en vente sans l’accord de l’auteur, celui-ci pourra, avec l’assistance d’un avocat spécialisé en droit d’auteur, engager une action en justice pour obtenir une indemnisation de ses préjudices, quand bien même il aurait cédé son droit de reproduction par reprographie à une société de gestion collective.
Pour conclure, toute utilisation à des fins commerciales d’œuvres de l’esprit « est exclue du périmètre de la cession légale » et suppose une autorisation spéciale préalable et explicite de leur auteur, sauf à constituer une contrefaçon sanctionnable en justice et ouvrant droit à indemnisation au profit de l’auteur victime de contrefaçon.
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Anthony Bem
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