Edmond MBOKOLO ELIMA

Magistrat, Enseignant à la Faculté de droit et Apprenant en DES/Troisième cycle en droit international privé et droit du numérique (Université de Kinshasa et Université de Kisangani)

ANALYSE JURIDIQUE DE L’AFFAIRE VITAL KAMERHE ET SES CONSEQUENCES POLITIQUES

Publié le Modifié le 14/04/2020 Vu 4 404 fois 0
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Mr KAMERHE en sa qualité du Directeur de Cabinet du Président de la République ne jouit aucunement d’immunités des poursuites, et susceptible d’être poursuivi comme tout citoyen.

Mr KAMERHE en sa qualité du Directeur de Cabinet du Président de la République ne jouit aucunement d’immu

ANALYSE JURIDIQUE DE L’AFFAIRE VITAL KAMERHE ET SES CONSEQUENCES POLITIQUES

ANALYSE JURIDIQUE DE L’AFFAIRE VITAL KAMERHE ET SES CONSEQUENCES POLITIQUES

Par

Maitre Edmond MBOKOLO ELIMA

Avocat au Barreau de l’Equateur

Assistant à la Faculté de Droit, Université de Mbandaka (RDC)

Analyste Juridique

 

 

I. CONTEXTE

 

Suite à l’invitation lancée par Procureur Général KISULA du Parquet Général de Kinshasa/Matete, le Directeur de Cabinet du Président de la République Démocratique du Congo, Monsieur Vital Kamerhé est placé sous mandat d’arrêt provisoire depuis le mercredi 08 avril courant, où il est reproché des malversations financières (détournement) des fonds alloués au projet de 100 jours en sa qualité de Coordonnateur.

 

Une fois mis sous mandat d’arrêt provisoire, les voix s’élèvent par-ci par-là non seulement relativement à la régularité de son arrestation mais aussi sur la jouissance des immunités des poursuites et du privilège de juridiction. Là, les juristes se tiraillent considérablement.

 

Face à cette tintamarre d’opinion, il est convenable que nous portions à la connaissance du public  (juristes ou non) notre analyse juridique relative à tous les concours de cette affaire tant sur le plan juridique que politique.

 

C’est ainsi que, la présente analyse traite de la régularité de la procédure suivie (II), du privilège de juridiction de Mr Kamerhé (III), de ses immunités des poursuites (IV), et enfin, des différentes conséquences politiques qui en découlent (V).

 

 

II. DE LA REGULARITE DE LA POURSUIVRE SUIVIE

 

1. Sur le plan processuel, l’invitation peut être admise en droit pénal ?

 

Par l’invitation n°1766/RMP/2538/PG.023.B/KAM/2020 du 06 avril 2020 émise par Monsieur le Procureur Général près la Cour d’Appel de Kinshasa Matete, Monsieur KISULA BATIKA YEYE Adler, demandant au Sieur KAMERHE de se présenter à son Cabinet le mercredi 08 avril 2020 à 13h00’ pour une communication en rapport avec les travaux de 100 jours, les droits de la défense ont été  scrupuleusement observés et respectées.

 

Logiquement, tout praticien de droit se conviendrait avec nous que, nulle part dans le code de procédure pénale, il existe un mandat appelé « INVITATATION »….Pour le  Ministère Public, l’article 15 du décret du 06 août 1959 portant code de procédure civile tel que révisé à ce jour, spécialement à ses alinéa 1, 2 et 3 dispose que « l’Officier du Ministère Public peut décerner mandat de comparution contre les auteurs présumées des infractions. A défaut par l’intéressé de satisfaire à ce mandat, l’Officier du Ministère Public peut décerner contre lui un mandat d’amener. Indépendamment de tout mandat de comparution antérieur, l’Officier du Ministère Public peut également décerner mandat d’amener, lorsque l’auteur présumé d’une infraction n’est pas présent, ou lorsqu’il existe contre lui des indices graves de culpabilité et que l’infraction est punissable de deux mois de servitudes pénales au mois… ».

 

Dans la pratique judiciaire (les us et coutumes), le Ministère Public recourt souvent à l’invitation lorsqu’il s’agit de faire venir devant lui, une autorité, personnalité ou une autre occupant des hautes fonctions (ceci marque la courtoisie et la considération)…Il peut le faire même par téléphone (les avocats et magistrats le savent bien).

 

C’est pourquoi, en sa qualité de Directeur de Cabinet du Président de la République, le Ministère Public a fait usage d’une pratique valable lui invitant devant son office…Ceci respecte bel et bien les droits de la défense, en conséquence, aucune procédure n’a été biaisée.

 

Aussi, le Ministère Public peut faire citer devant lui toute personne dont il estime l’audition nécessaire dans le cadre des enquêtes ouvertes au Parquet (article 16 code de procédure pénale). Cette citation peut être faite sous  la forme d’une invitation, appel, mandat de comparution, etc…Cette disposition légale n’a pas donné la formule sacramentelle de cette citation.

 

A notre humble avis, Monsieur Vital KAMERHE a été invité parce qu’il a été cité à comparaitre par l’OMP mais sous forme d’une invitation. Jusque-là la procédure suivie demeure régulière et légale.

 

2. Est-il possible pour le Parquet d’arrêter une personne invitée à titre de renseignant, témoin ou victime ?

 

Oui, après l’audition du renseignant, témoin ou victime (plaignant), il est fort possible qu’ils soient métamorphosés en prévenus.

 

En effet, l’invitation lancée contre Mr KAMERHE ne renseigne pas qu’il a été mis en cause dans ce célèbre dossier, mais le signal fort est que, l’Avocat Général a pris soin d’indiquer le numéro RMP (Registre du Ministère Public), qui démontre aux yens de tout praticien du droit qu’il s’agit bel et bien d’un dossier pénal ouvert, contrairement au Registre d’Information (RI).

 

Citer à comparaitre pour permettre au Parquet d’avoir certaines informations (le Parquet a voulu utilisé le vocable communication), l’audition de Monsieur Kamerhé a dévoilé des indices sérieux et graves de culpabilité conformément aux différentes pièces et informations qui sont à la table de l’organe de la loi.

 

En vertu de l’article 67 de la loi n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire qui prescrit que « en matière répressive, le Ministère public recherche  les infractions aux actes législatifs et réglementaires qui  sont commises sur le territoire de la République.  Il  reçoit  les  plaintes  et  les  dénonciations,  accomplit  tous  les  actes  d'instruction  et  saisit  les  Cours  et tribunaux », nous nous rendons vite compte que, le  travail du Parquet est de rechercher les infractions… A cet effet, une personne invitée pour une communication (un renseignement), peut être transformée en inculpé et placée sous mandat d’arrêt étant donné que, l’article 67 sus-évoqué, donne au Ministère Public le plein pouvoir de rechercher les infractions….Cette recherche des infractions est faite dans son office en auditionnant les gens ou à la cité.

 

Un renseignant, témoin ou victime qui comparaissent devant l’OMP, et après l’audition le Ministère Public constate qu’ils pèsent contre eux une certaine charge indiquant les indices sérieux de culpabilité, il doit procéder illico à son arrestation (les avocats et magistrats en savent plus).

 

Dans le cas sous revue, Mr KAMERHE a été invité à titre de renseignant pour une communication, et après son audition, le Ministère Public a constaté que, les faits qui sont dans les dossiers corroborent avec son audition, étant donné qu’il a joué un rôle primordial en sa qualité de coordonnateur du projet 100 jour dont il est l’ordonnateur principal, son mandat d’arrêt provisoire est totalement justifié.

 

3. Quid du mandat d’arrêt provisoire décerné contre Mr KAMERHE ?

 

L’alinéa 1èr de l’article 27 du code de procédure pénale prévoit que « l’inculpé ne peut être  mis  en état de détention préventive que s’il existe contre lui des  indices  sérieux  de  culpabilité  et  qu’en outre le fait paraisse constituer une infraction que loi réprime d’une peine de six mois de servitude pénale au moins ».

 

En exubérance, l’article 28 alinéas 2 et 3 dispose que « lorsque les   conditions de la mise en état de détention préventive sont réunies, l’Officier du Ministère Public peut, après avoir interrogé l’inculpé, le placer sous mandat d’arrêt provisoire,   à   charge   de   le   faire conduire devant le juge le plus proche compétent pour statuer sur la détention préventive. Si  le  juge  se  trouve  dans  la  même localité que l’Officier du Ministère Public, au plus tard, dans les cinq (05) jours de la délivrance du mandat d’arrêt provisoire ».

Dans le cas sous analyse, Mr Kamerhé a été placé sous mandat d’arrêt provisoire étant donné que le Ministère Public après l’avoir interrogé, il a constaté des sérieux indices de culpabilité qui pèsent sur lui conformément à l’article 28 alinéa 2 et 3 sus-évoqué.

Il sied de préciser que, le délai de ce mandat d’arrêt provisoire est de cinq (05) jours à compter de son établissement…Après ce délai, le Ministère Public appréciera s’il faut relaxer Mr Kamerhé ou encore, si les enquêtes ne sont pas finies, l’OMP sollicitera sa mise en détention préventive.

4. Kamerhé peut-il être présenté en chambre du conseil pendant ce délai du MAP ?

D’entrée de jeu, il est loisible de préciser que, le juge d’instruction est celui du tribunal de Paix…qui statue évidement sur la régularité de la détention d’un inculpé.

En effet, l’article 28 alinéas 2 et 3 reconnait au Ministère Public un délai de cinq (5) jours pour garder une personne sous MAP…La loi dit que « l’Officier du Ministère Public peut, après avoir interrogé l’inculpé, le placer sous mandat d’arrêt   provisoire,   à   charge   de   le   faire conduire devant le juge le plus proche compétent pour statuer sur la détention préventive. Si  le  juge  se  trouve  dans  la  même localité que l’officier du Ministère public, au plus tard, dans les cinq jours de la délivrance du mandat d’arrêt provisoire ».

Conséquemment, lorsqu’il place un inculpé sous MAP, le Ministère Public a l’obligation de le faire conduire devant le juge d’instruction statuant en chambre du conseil pour régulariser sa détention préventive….et, ce devoir doit être accompli dans cinq jours. La loi n’a pas dit que le Ministère Public a l’obligation d’amener un inculpé en chambre du conseil qu’après l’épuisement du délai de cinq jours, non…on dit bien dans les cinq jours….Le Ministère Public peut arrêter aujourd’hui et demain présenter quelqu’un devant le juge d’instruction….Ceci ne peut pas se faire uniquement après le 5ème jour de son arrestation. Cela ne constitue pas une entorse juridique.

Si Mr KAMERHE est présenté en chambre du conseil, c’est tout à fait légal car la loi dit dans le cinq jour (c’est-à-dire du 1èr jour de son MAP jusqu’au 5ème jour, il doit présenter devant le juge d’instruction)…

S’agissant de sa mise en liberté provisoire, Mr KAMERHE a plusieurs possibilités, soit solliciter la liberté provisoire ou la mainlevée de la détention devant le Parquet ou encore les solliciter devant le juge d’instruction (tribunal de paix statuant en chambre du conseil).

5. Est-il vrai qu’avant son arrestation, le Procureur devait préalablement informé son chef hiérarchique qui est le Chef de l’Etat conformément à l’article 10 du code de procédure pénale ?

Aux termes de l’article 10 sus-évoqué « lOfficier de Police Judiciaire ou le Magistrat du Ministère Public qui reçoit une plainte ou une dénonciation ou qui constate une infraction à charge d’un magistrat, d’un cadre de commandement de l’Administration publique ou judiciaire, d’un cadre supérieur d’une entreprise paraétatique, d’un commissaire de district, d’un bourgmestre, d’un chef de secteur ou d’une personne qui le remplace ne peut, sauf cas d’infractions flagrantes ou d’infractions relatives aux violences sexuelles, procéder à l’arrestation de la personne poursuivie qu’après avoir préalablement informé l’autorité hiérarchique dont elle dépend ».

Dans le cas sous examen, Monsieur KAMERHE est un membre de bureau politique et non un agent ou cadre de l’Administration publique congolaise…Au niveau de la Présidence de la République, ce sont les agents administratifs qui bénéficient de cette garantie légale, dont notamment le Secrétaire Général de la Présidence et non un membre du Bureau politique de la Présidence.

Raison pour laquelle, l’Avocat Général ne pouvait pas, avant d’arrêter KAMERHE informer le Chef de l’Etat, son autorité hiérarchique dont il dépend, n’étant pas un cadre de l’administration publique, l’application de cette disposition légale est superfétatoire.

III. KAMERHE JOUIT-IL DU PRIVILEGE DE JURIDICTION ?

Le dictionnaire juridique en ligne dit que le "privilège de juridiction" que certains auteurs préfèrent utiliser l'expression "immunité de juridiction" ou la "délocalisation", est le droit donné à certaines personnes de comparaître devant une juridiction autre que celle à laquelle les règles du droit commun procédural attribuent compétence.

Toni LOKADI dit que, cela s'explique par le fait que nous ne sommes pas tous justiciables des mêmes juridictions ; c'est-à-dire, certaines infractions commises par une certaine catégorie des personnes ne sont susceptibles d'être instruites et jugées que par une juridiction dictée par la loi, même si l'acte constitutif de l'infraction est du droit commun.

Toni LOKADI surabonde que, c'est ainsi qu'à chaque fois qu'une personne, pour une infraction donnée, est traduite, sur base de sa qualité ou sa position socio-professionnelle, devant une juridiction autre que celle dont la compétence matérielle a été attribuée pour ladite infraction, il y a privilège de juridiction. C'est une dérogation aux règles de compétence matérielle des juridictions établis par le législateur.

Il note avec nous que, la loi n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire détermine les personnes qui sont bénéficiaires du privilège de juridiction.

1. Au niveau du Tribunal de Grande Instance

L’article 89 alinéa 2 de la loi sus-évoquée dit que le TGI est compétent pour statuer au premier degré pour ce qui est des infractions commises par : les Conseillers urbains, les Bourgmestres, les Chefs de secteur, les Chefs de chefferie, les chefs de chefferie adjoints, les Conseillers communaux, les Conseillers de secteur et les Conseillers de chefferie.

Mon ami Toni poursuit en préconisant que, la nouvelle loi sur le statut des chefs coutumier en son article 26, ajoute à la liste précitée les chefs coutumiers qui sont aussi dorénavant justiciables du tribunal de grande instance.

2. Au niveau de la Cour d'appel

L’article 91, alinéa 2, point 2 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 précitée et l'article 10 de la loi n° 08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces prévoient que « sont justiciables au premier degré devant la Cour d'appel : les membres de l'Assemblée provinciale, excepté les présidents de ces Assemblée qui sont justiciables devant la cour de cassation; - les magistrats des Cours d'appel;- les magistrats des parquets généraux;- les magistrats des tribunaux de grande instance;- les magistrats des tribunaux de paix et, - les magistrats des parquets de la République hormis les premiers Président des Cours d'appel et les Procureurs généraux qui sont bénéficiaires à la Cour de cassation;- les Maires;- les Maires adjoints,- les Présidents des Conseils urbains; -les fonctionnaires des services publics de l'État; - les dirigeants des établissements ou entreprise publique revêtus au moins du grade de directeur ou du grade équivalent;- les membres du Conseil économique et social et - les membres Conseil Supérieur de l'Audiovisuel et de la Communication (CSAC).

3. Au niveau de la Cour de cassation

Conformément à l’article 153 de la Constitution du 18 Février 2006 telle que modifiée à ce jour, les articles 93 et 95 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013, l’article 81 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de cassation, la Cour de cassation est compétente de juger en premier et dernier ressort les infractions commises par : - les membres de l'Assemblée nationale et du Sénat;- les membres du gouvernement autre que le Premier Ministre; - les membres de la Cour constitutionnelle;- les membres du parquet près la Cour Constitutionnelle ;- les membres de la Cour de cassation;- les membres du parquet général près Cour de cassation ;- les membres du Conseil d'Etat;- les membres du parquet près du Conseil d'État ;- les membres de la Cour de compte;- les membres du parquet près la Cour de compte ;-  les premiers présidents de Cours d'appel;- le procureur généraux près les cours d'appels;- les premiers présidents des Cours administratives d'appel;- les Procureurs généraux près les cours administratives d'appel ;- les gouverneurs de province;- les vice-gouverneurs de province;- les ministres provinciaux; - les présidents des Assemblées provinciaux;- les membres de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI);- les membres de la Commission Nationale des Droits de l'Homme (CNDH).

Toni précise que, le Procureur général près la Cour de cassation est la seule autorité habilitée à exercer l'action publique dans les actes d'instruction et de poursuites contre tous ces bénéficiaires précités. Il a l'initiative des enquêtes relatives aux faits infractionnels reprochés à ces derniers et reçoit les plaintes et les dénonciations et rassemble les preuves. Il auditionne toute personne susceptible de contribuer à la manifestation de la vérité.


A en croire Toni, sauf dans le cas de la procédure en matière d'infractions intentionnelles flagrantes, le Procureur général près la Cour de cassation devra préalablement avoir l'autorisation de poursuite et la mise en accusation du Sénat quand il s'agit d'un sénateur, de l'Assemblée nationale pour un député, des membres de la Cour de compte et de l'Assemblée Provinciale s'il s'agit d'une autorité provinciale ci-dessous citée. Pour tous les magistrats ciblés ci-haut, l'autorisation de poursuite émane de Bureau du Conseil Supérieur de la Magistrature. Pour les autres bénéficiaires de cette Cour, l'autorisation émane de l'organe au sein duquel il œuvre tout.

4. Au niveau de la Cour constitutionnelle 


Les articles 163 et 164 de la constitution du 18 février 2006 telle que modifiée à ce jour prévoit que, la Cour constitutionnelle est la juridiction pénale du Chef de l'État et du Premier Ministre dans les cas et conditions prévus par la Constitution. Elle est le juge pénal du Président de la République et du Premier Ministre pour des infractions politiques de haute trahison, d'outrage au Parlement, d'atteinte à l'honneur ou à la probité ainsi que pour les délits d'initié et pour les autres infractions de droit commun commises dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. Elle est également compétente pour juger leurs co-auteurs et complices.

A SAVOIR :

Aucune de ces lois sus-citées, un Directeur de Cabinet (soit-il du Président de la République, Assemblée Nationale, Sénat, Ministres, Assemblées Provinciales, Gouverneurs de Provinces, etc…) n’a un privilège de ces juridictions.

Même si Mr KAMERHE, conformément à l’ordonnance n°19/082 du 23 novembre 2019 portant fixation des rémunérations et autres avantages des membres du Cabinet Présidentiel a le même grade que le Vice-Premier Ministre (membre du Gouvernement), c’est dans le cadre du traitement (rémunérations, avantages, primes, etc….) et non sur le plan pénal.

Mr KAMEHE doit être jugé conformément à la compétence matérielle de chaque juridiction, soit par le Tribunal de paix si l’infraction est punissable d’une amande seulement ou d’une peine de servitude pénale ne pesant pas 5 ans, soit par le Tribunal de Grande Instance si l’infraction est punissable d’une peine de servitude pénale de plus de 5 ans, de la peine à perpétuité, de la peine de mort…

IV. KAMERHE JOUIT-IL DES IMMUNITES DES POURSUITES ?

Les immunités des poursuites sont des prérogatives qui mettent les parlementaires et certaines autorités à l'abri des poursuites judiciaires en vue d'assurer le libre exercice de leur mandat. On parle des immunités parlementaires, diplomatiques, d’exécution, etc….

En vertu du principe de la légalité, ces immunités doivent être prévues que par la loi. A cet effet, le Président de la République, le Premier Ministre, les Membres du Gouvernent National, les Députés nationaux, Sénateurs, Députés provinciaux…jouissent des immunités des poursuites… (Article 166, 107, 166 et 197 de la constitution)….

D’où, Mr KAMERHE en sa qualité du Directeur de Cabinet du Président de la République ne jouit aucunement d’immunités des poursuites, et susceptible d’être  poursuivi comme tout citoyen.

V. QUELLES SONT LES CONSEQUENCES POLITIQUES QUI PEUVENT DECOULER DE L’ARRESTATION DE KAMERHE

La crainte majeure est que, aujourd’hui Kamerhé est pris comme inculpé, et pendant l’instruction de la cause (audition, confrontation, enquête…) qu’il cite également le nom du Chef de l’Etat dans la malversation financière (détournement) des fonds alloués au projet de 100 jours, étant donné qu’il est l’ordonnateur principal des projets de la Présidence, il pourra être poursuivi comme auteur, co-auteur ou complice dans cette affaire.

A cette hypothèse, c’est l’article 165 alinéa 2 de la Constitution qui sera d’application. Aux termes de cette disposition constitutionnelle « il  y  a  atteinte  à  l’honneur  ou  à  la  probité  notamment  lorsque  le  comportement personnel  du  Président  de  la  République  ou  du  Premier  ministre  est  contraire aux  bonnes  mœurs  ou  qu’ils  sont  reconnus  auteurs,  co-auteurs  ou  complices de malversations, de corruption ou d’enrichissement illicite ».

Conséquemment, c’est l’article 166 de la constitution qui sera appliqué qui prévoit que « la  décision  de  poursuites  ainsi  que  la  mise  en  accusation  du  Président  de  la République  et  du  Premier  ministre  sont  votées  à  la  majorité  des  deux  tiers  des membres du Parlement composant le Congrès suivant la procédure prévue par le Règlement intérieur ».

A cette hypothèse, conformément aux articles 75 et 76 de la même constitution, c’est le Président du Sénat qui exercera provisoirement les fonctions de Président de la République.

Voilà la production de notre analyse dans cette fameuse arrestation de Mr KAMERHE.

 

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Me Edmond MBOKOLO ELIMA Edmond

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A propos de l'auteur
Blog de Edmond MBOKOLO ELIMA

MBOKOLO ELIMA Edmond, Magistrat, Officier du Ministère Public et Substitut du Procureur de la République

Ancien avocat au Barreau de l'Équateur, Enseignant à la Faculté de Droit de l'Université de Mbandaka et Apprenant en D. E. S à la Faculté de droit de l'Université de Kisangani et Chercheur en droit à l'Université de Kinshasa. 

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