UNE CITATION DIRECTE MAL FONDÉE PEUT-ELLE ÊTRE CONSTITUTIVE D'UNE DÉNONCIATION CALOMNIEUSE EN DROIT CONGOLAIS ?
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Il n'est point besoin de rappeler que la citation directe permet à la personne lésée à l'issue de la commission d'une infraction, de saisir directement le Tribunal en contournant la procédure préparatoire de l'organe poursuivant (le Parquet) et en forçant la main de ce dernier devant ledit Tribunal répressif. Il s'agit là, d'un droit s'agir en justice.
Mais hélas ! Une citation directe peut aboutir au non fondement, c'est-à-dire à l'acquittement du cité (l'accusé) ou au non établissement des faits infractions, objet de la citation directe.
Il sied de noter que, ce non fondement de la citation directe peut relever d'une nuisance de la part de son auteur, d'où son caractère vexatoire et téméraire.
De ce qui précède, une citation directe peut revêtir un caractère téméraire et vexatoire lorsque la partie civile citante est animée de l'intention de nuire au cité, mais aussi lorsque qu'il exerce son droit d'agir en juste d'une manière qui excède manifestement les limites de l'exercice normal dudit droit.
Nous rejoignons sans atermoiements la position de Me Benjamin Ifeka Momponza lorsqu'il soutient qu'étant donné que la loi érige en infraction une fausse accusation, une citation directe (citation téméraire et vexatoire) mal fondée (en cas d'acquittement du cité) peut avoir le caractère d'une dénonciation calomnieuse (B.Ifeka Momponza, _Guide initiative dans la pratique de la profession d'avocat en RDC,_ Ed. Mon petit editeur, Paris, 2016, p.23).
Il s'agit une dénonciation calomnieuse car, à en croire la Cour Suprême de Justice soutenant que, s'agissant de la dénonciation calomnieuse, l'intention de nuire doit être établie (CSJ, 23/02/1982, MP c/KIT, www.droitcongolais.info).
En foi à l'article 76 du Code pénal livre deuxième, spécialement en son point 1, celui qui aura fait par écrit ou verbalement à une autorité judiciaire ou à un fonctionnaire public, qui a le devoir d'en saisir ladite autorité sera puni d'une servitude pénale de 5 ans au maximum et une amende ou d'une de ces peines seulement.
Dans sous examen, il est loisible de noter que, le juge (Tribunal) est une autorité judiciaire, et une citation mal fondée soumise devant lui constitue une dénonciation par écrit.
Dans ce cas d'espèce, les poursuites pénales peuvent être exercées par le Ministère public d'office ou sur plainte du prévenu. Elles peuvent se faire aussi par voie d'une citation directe devant le même juge ou un autre juge territorialement et matériellement compétent.
(B.Ifeka Momponza, Op.cit, p.23).
Pour épiloguer et suivant l'analyse sus-faite, nous répondons que, une citation directe initiée devant une juridiction civile, et qui est déclarée non fondée (acquittement du cité), s'il a été fait dans l'intention de nuire à ce dernier, peut constituer une infraction de dénonciation calomnieuse aux termes de l'article 76 sus-vanté. Dans ce cas, le Ministère public peut s'en saisir d'office ou la personne victime de ladite dénonciation peut soit saisir le Parquet ou saisir directe le juge par la même voie.
Joyeux Noël et bonne année 2025.
Une tribune juridique de : Edmond MBOKOLO ELIMA
Chercheur en droit aux Universités de Kisangani et de Kinshasa.
Substitut du Procureur de la République/Kisangani.