Le droit de rectification et de réponse comme étant la condition préalable et obligatoire à la saisine judiciaire pour diffamation (imputations dommageables).
Il vient d'être démontré noir sur blanc lors des états généraux de la presse tenus à Kinshasa que, les lois et règlements en matière de la presse demeurent à ce jour obsolètes, inadaptés, de fois incompréhensibles, d'où la volonté de rationaliser ce secteur en réformant l'ordonnance-loi de 1981 et la loi du 22 juin 1996, textes principaux de la communication écrite et audiovisuelle en RDC, laquelle réforme constitue un véritable gage du droit de l'information.
En dépit de ce constat, la loi n°96-002 du 22 juin 1996 qui fixe les modalités de l'exercice de la liberté de presse est mal comprise par les acteurs des médias d'une part, et d'autre part, par les autorités judiciaires ainsi que tous ceux qui interviennent dans ce secteur.
Il arrive que, pendant la présentation d'une émission ou l'impression d'un journal, le journaliste et son invité, parviennent à proférer des propos diffamatoires ou des imputations dommageables à l'endroit d'une personne physique ou morale, privée ou publique.
Constamment, les victimes desdits propos jugés diffamatoires, sans lire la loi, se permettent illico presto, de saisir la justice contre le journaliste ou l'invité, en méconnaissant les conditions préalables pour l'exercice de ce droit, en l'occurrence le droit de réponse ou de solliciter une rectification.
Malheureusement, la justice aussi, de fois travaillant à double vitesse, se saisit de la personne sans imposer une réponse ou rectification comme est le vœu de la loi.
S'agissant de la presse écrite, l'article 37 de la loi du 22 juin 1996 est éloquent lorsqu'il dispose que : toute personne citée dans un journal ou un écrit périodique, soit nominativement, soit indirectement, mais de façon telle qu’elle puisse être identifiée, a le droit d'y faire insérer une réponse ou une rectification.
De son côté, l'article 67 de la même loi prévoit sagement pour la presse audiovisuelle que : toute personne physique ou morale dispose d'un droit de réponse dans tous les cas où des imputations susceptibles de porter atteinte à son honneur ou à sa réputation auront été diffusées dans le cadre d'une activité de communication audiovisuelle. Le demandeur doit préciser, les imputations sur lesquelles il veut répondre.
Aussi, poursuit l'article 71 de la même loi, tout dépositaire de l'autorité publique, dont les actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions ont été inexactement diffusés, a le droit de faire diffuser une rectification, pourvu que celle-ci limite à redresser les faits, images, sons, inexactitude diffusés.
Assurément, il sied de préciser ici que le droit de réponse et de rectification est entièrement gratuit et s'exerce devant le même média ayant diffusé oi publié des informations prétendument jugés diffamatoires, et doit se faire dans un délai de 15 jours qui suivent la diffusion de l'émission (lire à ce propos les articles 69,70 et 39 de la loi du 22 juin 1996).
A en croire le législateur de 1996, une victime des propos téméraires, vexatoires et diffamatoires ne peut se plaindre devant les instances judiciaires pour imputations dommageables ou diffamation que si le droit de réponse ou de rectification lui a été refusé par le média concerné.
Logiquement, s'il arrive qu'une personne physique ou morale se plaigne sans respecter les dispositions impératives sus-citées, le parquet, voire la juridiction saisie doit lui réserver une fin de non-recevoir, s'il échet, lui demander d'abord de solliciter l'exercice du droit de réponse et de rectification, et dans le cas où ce dernier ne lui a pas été accordé, elle aura alors le droit d'initier une action en justice ou une plainte au parquet.
Malheureusement et contre toute attente, la pratique judiciaire nous offre une autre réalité, celle qui consiste à inviter, arrêter où condamner les journalistes et/ou leurs invités sans pour autant que les prétendues victimes arrivent à exercer leur droit de réponse ou de rectification.
Les propos tenus par ceux qui interviennent dans les médias sont garantis par le droit à l'information, à la liberté de presse et d'expression. Dans le cas d'un dérapage, il faut d'abord appliquer les dispositions légales sus-évoquées.
Sur ce, le juge ou le Ministère Public qui reçoit une action allant dans ce sens, doit réserver au plaignant, demandeur, partie civile ou partie civile citante, une fin de non-recevoir pour le non-respect de l'exercice du droit de réponse et de rectification, condition préalable pour être reçu en justice.
Me Edmond MBOKOLO ELIMA
Avocat au Barreau de l’Equateur
Enseignant à l’Université de Mbandaka
Chercheur (DEA/DES) en droit à l’Université de Kinshasa