Privilège du bailleur sur les meubles du locataire est-il applicable dans quel type de bail : professionnel ou non professionnel ?
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Les privilèges sont aux termes de l'article 50 de l'acte uniforme du 15 décembre 2010 portant organisation des sûretés, les sûretés mobilières. Par définition, un privilège est un droit de préférence conférant au titulaire de la créance, lorsqu'il vient en concurrence avec d'autres créanciers sur les éléments du patrimoine du débiteur commun, un classement plus ou moins avantageux suivant le rang que la loi a donné à la créance privilégiée.
Il sied de rappeler que, l'acte uniforme sus-vanté distingue entre les privilèges généreux et les privilèges spéciaux. Parmi ceux-ci, le législateur de l'OHADA prévoit le privilège du bailleur d'immeuble.
En effet, aux termes de l'article 184 du même acte uniforme, le bailleur d'immeuble a un privilège sur les meubles garnissant les lieux loués (les biens meubles se trouvant dans la maison du locataire). Ce privilège garantit outre les dommages-intérêts, les créances (loyers, dégradation des lieux, troubles de voisinage...) du bailleur contre le preneur pour les 12 mois échus précédant la saisie et pour les 12 mois à échoir après celle-ci.
Il est loisible de souligner que, le privilège du bailleur d'immeuble, concerne tous les baux quelle que soit la nature du bail : professionnel, à usage socio-culturel, à usage d'habitation ou résidentiel, etc...) appartenant au locataire. Il vise tous les biens meubles garnissant la maison louée et doivent appartenir au preneur. À ce propos, l'acte uniforme interdit l'application dudit privilège sur les biens n'appartenant pas au preneur (locataire).
C'est ainsi que, le bailleur ou tout autre personne qui prive le bailleur de ce droit par exemple en enlevant les biens se trouvant dans la maison du locataire à son insu, commet un délit (une infraction) conformément à l'alinéa 2éme de l'article sous examen et si et seulement si, elle est déjà prévue en droit interne de chaque Etats-partie. Nous estimons que le législateur congolais, n'a pas encore légiférer dans ce sens (nullum crimen, nulla poena sine lege).
Il résulte que, le bailleur ayant un droit de suite et de préférence, en cas de déplacement des meubles sans son consentement, il peut procéder à la saisie desdits biens, quel que soit le lieu où ils se trouvent et conserve bien entendu son privilège s'il le déclare dans l'acte de saisie.
En définitive, il faut affirmer que cette sûreté mobilière ne vise pas seulement les baux professionnels (commercial, bureau,...) mais concerne aussi tous les baux (résidentiel, socio-culturel, etc...). Ainsi donc, le bailleur qui procède à la saisie des biens meubles du locataire en contre partie du paiement de ses loyers échus ou à échoir, peut se faire payer par préférence en cas de vente de ceux-ci.
Magistrat Edmond Mbokolo Elima
Substitut du Procureur de la République
Enseignant- Chercheur.