Edmond MBOKOLO ELIMA

Magistrat, Enseignant à la Faculté de droit et Apprenant en DES/Troisième cycle en droit international privé et droit du numérique (Université de Kinshasa et Université de Kisangani)

Propos xénophobes du Cadre de Concertation de la Société Civile de la Province de l’Equateur

Publié le 23/01/2021 Vu 1 371 fois 0
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Chaque citoyen congolais étant libre de circuler librement dans le pays et s’y installer paisiblement, aucune personne, association ou autorité provinciale, voire nationale n’a le pouvoir de chasser un citoyen congolais d’une province.

Chaque citoyen congolais étant libre de circuler librement dans le pays et s’y installer paisiblement, aucu

Propos xénophobes du Cadre de Concertation de la Société Civile de la Province de l’Equateur

Analyse juridique des propos xénophobes du Cadre de Concertation de la Société Civile de la Province de l’Equateur à l’endroit du Professeur Place MAKWA, Directeur Général de l’ISDR/Mbandaka le déclarant « persona non grata » à l’Equateur (Mbandaka) : du tribalisme à la haine et aversion raciale.

Par

Me Edmond MBOKOLO ELIMA

Avocat au Barreau de l’Equateur

Assistant à l’Université de Mbandaka.

 

1. Contexte

 

Dans une déclaration lue le jeudi 21 janvier 2021 devant la presse de Mbandaka par Monsieur Barnabé Bongambo, Porte-Parole du cadre de concertation de la société civile de l’Equateur, présidé par Monsieur Fabien Mungunza, a déclaré le Directeur Général de l’ISDR/Mbandaka, Professeur Dr Placide MAKWA, persona non grata (personne qui n’est pas la bienvenue dans la Province de l’Equateur n’étant pas son originaire) pour mauvaise gestion et demande le départ de son comité de gestion, renseigne Delphin EBWA, Journaliste de la RTNC/Mbandaka.

Pour petite histoire et à titre des faits, l’ISDR/Mbandaka nous informe que Monsieur Fabien MUNGUNZA fait partie de son corps scientifique qui est chargé d’étude. A cet effet, depuis un certain temps, il est reproché par le comité de gestion de briller par les antivaleurs (injures publiques) et immoralités au sein de l’institution où il confond vivement ses fonctions de Président du cadre de concertation de la société civile de l’Equateur  (utilisant cette dernière à des fins propres) d’avec celles de l’agent de l’ESU.

 

C’est dans cette optique qu’à la suite de sa méconduite et ses actes contraires à l’éthique professionnel caractérisés par les griefs sus-rappelés et conformément au statut du personnel de l’enseignement supérieur et universitaire, les autorités académiques avaient décidé à l’unanimité de lui coller une suspension. C’est ce qui est à la base ce dernier temps des différentes déclarations de Sieur Fabien MUNGUNZA contre les autorités académiques de cette institution.

 

2. Déclarer un concitoyen persona non grata dans son pays

 

Aux termes de l’article 30 de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles « toute personne qui se trouve sur le territoire national a le droit d’y circuler librement, d’y fixer sa résidence, de le quitter et d’y revenir, dans les conditions fixées par la loi. Aucun congolais ne peut être ni expulsé du territoire de la République, ni être contraint à l’exil,  ni être forcé à habiter hors de sa résidence habituelle ».

Significativement, l’unité dans la diversité que prône les autorités congolaises dont notamment le Président de la République en dépit du découpage territoriale qu’a subi précocement le pays en 2015 voudrait que nous demeurions un, une seule nation, patrie….peu importe nos origines provinciales, territoriales, tribales ou ethniques, tous, nous sommes de la nationalité congolaise conformément à l’article 10 de la Constitution et de la loi de 2004 relative à la nationale.

L’article 30 de la loi fondamentale exclue dans ce pays la xénophobie, le tribalisme, la haine ou l’aversion raciale étant donné que tout congolais est libre d’y travailler ou demeurer là où bon lui semble.

Juridiquement, les propos du cadre de concertation de la société civile de l’Equateur sous l’impulsion de son Président, agent suspendu à l’ISDR/Mbandaka dénote du tribalisme, de la haine et aversion raciale à l’endroit de Monsieur le Professeur Placide Makwa qui n’est pas originaire de l’Equateur. Ces propos semblent avoir une analogie avec ceux tenus par le Pasteur Ngoy Mulunda.

3. Que dit la loi pénale à propos de la xénophobie, tribalisme, haine et aversion raciale ?

Interrogeant à ce propos la loi pénale congolaise, celle-ci nous renseigne que cet agissement de la société civile de l’Equateur par le biais de ses dirigeants déclarant un non originaire de l’Equateur persona non grata constitue un comportement antisocial qu’elle prohibe, et par conséquent, entaché des sanctions privatives de liberté car, il trouble l’ordre public.

En clair, déclarer un congolais persona non grata, parce qu’il n’est pas originaire de l’Equateur est injurieux, discriminatoire et susceptible de compromettre l’ordre public, ce qui matérialise la haine ou l’aversion tribale et constitutif de l’infraction de tribalisme prévue et punie par  l’ordonnance-loi n°66-342 du 07 juin 1966.

A en croire Bony CIZUNGU M. NYANGEZI, dans son ouvrage intitulé  catalogue des infractions : des incriminations et des peines, publié à la Maison d’Edition Laurent Nyangezi, Kinshasa 2010, à la page 273, l’infraction de racisme et tribalisme se présente matériellement sous diverses formes. Il s’agit de :

1ère forme : manifester ou extérioriser son mépris, son dégoût ou son hostilité, sa vive inimitié à l’égard d’un individu, du fait de son appartenance raciale, ethnique, tribale ou régionale. Ces divers actes doivent se réaliser : par paroles (injures, propos blessants), gestes (attitude offensante, injurieuse ou méprisante), écrits (confection, diffusion des documents discriminatoires), images ou emblèmes (dessins, gravures, photographies, etc.) ou par tout autre moyen.

 

2ème forme : tout acte de nature à inciter autrui à manifester de l’aversion ou de la haine par gestes, paroles, écrits, usages, etc.

3ème forme : la participation au maintien des associations, groupements à caractère racial, tribal, régional ou ethnique ;

4ème forme : assumer à un titre quelconque la direction ou l’administration d’une association ou groupement tribal à caractère politique.

 In specie causa, les propres tenus par le Porte-parole et le Président de la société civile se marient bel et bien avec les éléments matériels sus visés où dans leur exposé déclaratif, ils soutiennent que Monsieur le Professeur Placide MAKWA est déclaré persona non grata, tout simplement parce qu’il n’est pas originaire de l’Equateur.

A notre entendement, comme l’exposé a été lu dans le cadre d’une association privée appelée «société civile », tous ses membres qui ont signé la déclaration contenu des propos tribaux et de la haine ethnique sont également co-auteurs.

L’infraction de haine et aversion raciale suppose également un élément moral. Dans le cas sous examen, ces présumés infracteurs ont agi en âme et conscience, c’est-à-dire leur volonté de poser un acte discriminatoire ou susceptible de provoquer le désordre ou de troubler l’ordre public (déclarer quelqu’un persona non grata car il n’est pas originaire).

 

4. Les sanctions pénales y réservées

Le racisme et le tribalisme sont punis d’un mois à trois ans de servitude pénale et d’amende ou de l’une des peines. Ceux qui auront participé au maintien d’un cercle, club, association ou groupements visés par cette loi seront punis d’un mois à deux ans de servitude pénale principale et d’une amende ou d’une de ces peines seulement.

 

5. Conclusion et suggestions

Chaque citoyen congolais étant libre de circuler librement dans le pays et s’y installer paisiblement, aucune personne, association ou autorité provinciale, voire nationale n’a le pouvoir de chasser un citoyen congolais d’une province, qu’il soit originaire ou non. La RDC étant une et indivisible.

S’agissant des autorités académiques affectées par le Ministre de l’ESU dans une province, aucune autorité provinciale n’a le pouvoir de chasser, révoquer ou suspendre un recteur, Directeur Général, Secrétaire Général Académique, etc… n’étant pas sous ses barbes disciplinaires.

 

A cet effet, le comportement de Monsieur Fabien Mungunza imprime sans être contredit le fondement des différents griefs lui reprochés par le comité de gestion de l’ISDR/Mbandaka et qui a déclenché sa suspension.

Par suite, il doit éviter d’utiliser la société civile ou ses locaux à des fins propres. Cette dernière nous protège tous, mais sa suspension à l’ISDR/Mbandaka est une affaire privée qui ne doit pas intéresser une société appelée civile. D’ailleurs, ce comportement étant incriminable, le Ministre de tutelle  (ESU) risque de prendre d’autres dispositions allant dans le sens de la révocation.

 

Eu égard à tout ce qui précède, nous suggérons :

 

Au Président National la Société civile conformément à la volonté du Comité de gestion de l’ISDR/Mbandaka d’attirer l’attention de Monsieur Fabien MUNGUNZA et ses acolytes qui ne doivent pas utiliser la Société Civile à des fins privées. La sanction lui infligée n’ont aucun lien avec la société civile.

 

Aux autorités judiciaire de se saisir car, déclarer quelqu’un persona non grata parce qu’il n’est pas originaire de la Province, c’est commettre l’infraction du tribalisme et haine raciale. Nous estimons qu’aujourd’hui cela est prononcé contre un Professeur non originaire, si une telle hémorragie n’est pas arrêtée, il en sera de même pour nos autorités judiciaires, militaires, policières, administratives, privées…qui ne sont pas originaires de la Province de l’Equateur.

 

Voilà pourquoi, le Pasteur Ngoy Mulunda est aux arrêts pour des propres tribaux qui sont semblables avec ceux des Responsables de la société civile de l’Equateur.

 

Mbandaka, Province de l’Equateur le 23 janvier 2021 à 10h42’

Me Edmond MBOKOLO

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A propos de l'auteur
Blog de Edmond MBOKOLO ELIMA

MBOKOLO ELIMA Edmond, Magistrat, Officier du Ministère Public et Substitut du Procureur de la République

Ancien avocat au Barreau de l'Équateur, Enseignant à la Faculté de Droit de l'Université de Mbandaka et Apprenant en D. E. S à la Faculté de droit de l'Université de Kisangani et Chercheur en droit à l'Université de Kinshasa. 

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