Edmond MBOKOLO ELIMA

Magistrat, Enseignant à la Faculté de droit et Apprenant en DES/Troisième cycle en droit international privé et droit du numérique (Université de Kinshasa et Université de Kisangani)

Réflexion sur l'exercice de la profession d'avocat et de défenseur judiciaire en droit congolais

Publié le 16/07/2015 Vu 13 047 fois 2
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La profession d’avocat est depuis des siècles, une des attractivités les plus prisées du monde juridique. De par son prestige, la profession séduit bon nombre de juristes, mais ces derniers n’y trouvent pas toujours l’idéal tant convoité. (Lire inhttp://www.ares-infos.org/2012/12/26/la-profession-davocat-un-prestige-a-deux-vitesses/)

La profession d’avocat est depuis des siècles, une des attractivités les plus prisées du monde juridique.

Réflexion sur l'exercice de la profession d'avocat et de défenseur judiciaire en droit congolais

La grande question que nous nous posons dans ce point, est celle de savoir qui est-ce un avocat et un défenseur judiciaire ? (§1) et quelles en sont les conditions d’accession à cette profession ? (§2). 

Paragraphe 1 : DE L’AVOCAT 

1.1. DE L’AVOCAT

L’exercice de la profession d’avocat en République Démocratique du Congo est réglementé par l’ordonnance-loi n°79-028 du 28 septembre 1979 portant organisation du barreau, du corps des défenses judiciaires et du corps des mandataires de l’Etat.

            A. DEFINITION

Un avocat est un auxiliaire de la justice chargé d’assister ou représenter les parties, postuler, plaider et conclure devant les juridictions au nom de leurs clients. Par-là, il faut que l’on parle de la mission d’un avocat.

B. MISSION D’UN AVOCAT

Les attributions d’un avocat sont :

  1. L’assistance en justice

L’assistance peut se définir comme une mission en général confiée par le plaideur lui-même à un avocat, qui comporte pour celui qui en est chargé pouvoir et devoir de conseilleur la partie (d’où le nom de conseil des parties) et de présenter sa défense sans l’obliger (d’où le nom de défenseur).

  1. La représentation

C’est une mission d’origine conventionnelle, qui confère au mandataire pouvoir et devoir d’accomplir au nom du mandant ou plaider les actes de la procédure. En effet, principalement les avocats ne représentent les parties que lorsqu’ils sont porteurs d’une procuration spéciale, mais dans certains cas, ils sont présumés représenter les parties lorsqu’ils portent sur eux les pièces de procédure.

En clair, en matière civile, l’avocat représente son client sans moindre ou aucune limitation.

Par contre, en matière pénale, la représentation est acceptable si et seulement si l’infraction n’et pas punissable de plus de deux ans et dans ce cas, l’avocat doit être muni d’une procuration spéciale lui reconnaissant le mandat de représentation.

3. Postulation

Il consiste pour l’avocat de demander en justice au nom de son client. Cela veut dire que, l’avocat mandataire d’un client, accomplit pour son client les actes de procédure que nécessite le déroulement de l’instance.

4. Conclusion

Celle-ci est un acte de procédure par lequel les parties, par l’intermédiaire de leurs avocats ou par elles-mêmes, formulent à  l’intention du juge leurs chefs de demande ou leurs moyens de défense, en bref leurs prétentions. Le dépôt des conclusions entraine la fin des débats et oblige le juge à répondre à tous les objets.

5. Plaidoirie

Il consiste généralement à soutenir d’une manière verbale une cause devant un tribunal ou une cour dans une audience. La plaidoirie est un exposé verbal, à l’audience des prétentions et arguments des parties.

6. Consultation 

Celle-ci intervient lorsqu’un avocat donne son avis dans un cas litigieux

7. Conseil

Le conseil juridique reste l’une des attributions de l’avocat, néanmoins, il existe des juristes professionnels employés par des personnes physiques ou morales et dont la mission principale est de conseiller leurs employeurs en matière juridique. Il consiste pour l’avocat, de donner les avis et de rédiger les actes sous seing privé.

8. Conciliation

C’est lorsque l’avocat est appelé à suggérer une solution à un litige né entre les parties. C’est une mission occasionnelle, justifiée par ses connaissances juridiques. Il consiste en ce sens que l’avocat est sollicité par toutes les deux parties en désaccord afin qu’il leur propose une solution à leur litige.

C. CATEGORIE DES AVOCATS 

Selon les différentes catégories des avocats, ils sont près chaque Cour. C’est ainsi que, les avocats près la cour d’appel sont en deux catégories : 

1. LES AVOCATS INSCRITS A LA LISTE DE STAGE

L’avocat stagiaire, est celui qui n’a pas renouvelé son serment. Il n’a pas accompli deux ans dans son métier. 

2. LES AVOCATS INSCITS AU TABLEAU DE L’ORDRE

Ce sont les avocats qui ont exercé la profession plus de deux ans et ont renouvelé leur serment.

D. CARACTERISTIQUES DE LA PROFESSION D’AVOCAT

Les avocats exercent librement leur ministère sous réserve de leur soumission aux lois et règlements, et du respect des règles propres à la déontologie de leur profession. D’où la profession est libérale et indépendante.

1. LE CARACTERE LIBERAL

L’avocat exerce librement sa profession. Bien que cette profession soit règlementée par l’Etat, elle reste libérale, raison pour laquelle, les avocats ne sont pas des agents publics mais ils sont des auxiliaires ou collaborateurs de la justice.

2. LE CARACTERE INDEPENDANT

Dans l’exercice de leur mission, les avocats ne sont pas soumis à aucun lien impliquant la subordination.

Bref, les caractéristiques de cette profession sont distinctes par rapport à d’autres. En effet, la profession d’avocat, est une profession libérale et indépendante. Les avocats exercent librement leur profession sous réserve de leur mission aux lois et règlements et du respect des règles propres à la déontologie de leur profession. C’est ainsi qu’ils sont rémunérés par les honoraires, ils sont exclus de toute rémunération salariale conformément à l’ordonnance-loi sus-évoquée. 

E. LES CONDITIONS D’ACCESSION A LA PROFESSION D’AVOCAT

L’ordonnance-loi sous examen prévoit toutes les conditions d’accès à cette profession. Ces conditions sont au nombre de cinq, à savoir : 
 

  1. Etre Zaïrois (Congolais). Toutefois, l’étranger pourrait accéder à la profession sous la condition de réciprocité ou en vertu des conventions internationales ;
  2. Etre titulaire d’une licence ou d’un doctorat en droit délivré par l’université nationale du Zaïre ou par l’ancienne Ecole Nationale de Droit et d’Administration ou d’un diplôme équivalant délivré par l’université étrangère en justifiant en ce cas de sa connaissance du droit zaïrois (congolais) ; 
  3. N’avoir pas été condamné pour des agissements contraires à l’honneur, à la probité et aux bonnes mœurs, à moins d’en avoir été amnistié ou réhabilité ; 
  4. N’avoir pas été auteur de faits de même nature que ceux prévus ci-dessus et ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou à une décision administrative de destitution, radiation ou révocation ; 
  5. Justifier d’une bonne conduite par la production d’un certificat de bonne vie et mœurs délivré par les autorités administratives du lieu de résidence durant les cinq dernières années.

Toutefois, les candidats près la Cour Suprême de Justice, doivent réunir les conditions ci-après : 

  • Exercer pendant au moins 10 ans la profession d’avocat ;
  • Réaliser une ou plusieurs publications dans le domaine de droit. 

En clair, nul ne peut porter le titre d’avocat ni en exercer la profession s’il n’est inscrit sur un tableau de l’ordre ou sous la liste de stage. Par conséquent, le corps des tous les avocats, c’est-à-dire l’organe qui les rassemble est le "Barreau". Celui-ci, est un ensemble des avocats établis dans le ressort de chaque cour d’appel. Il comprend les avocats inscrits au tableau de l’ordre et les avocats stagiaires.

F. DROITS, INTERDICTIONS ET DEVOIR D’UN AVOCAT

F.1. DROITS DES AVOCATS

Les avocats ont comme droit :

  • Plaider à l’audience ;
  • Correspondre avec son client et le voir sans témoin en son lieu d’incarcération ;
  • Prendre connaissance au greffe de tous les dossiers des affaires dans lesquelles ils représentent ou défendent une partie ;
  • Représenter les parties lorsqu’il dispose d’un mandat spécial ou lorsqu’il est porteur des pièces de la procédure ;
  • Assister à huis clos.
F.2. INTERDICTIONS ET DEVOIR DES AVOCATS

            Dans l’exerce de leur fonction, les avocats sont tenus à plusieurs obligations, qui sont prévues sous formes d’interdictions et de devoirs.

a) INTERDICTIONS

  • L’interdiction  de se livrer à des injures envers les parties ou à des personnalités, envers les défenseurs ;
  • L’interdiction de se rendre concessionnaire des droits successoraux ou litigieux ;
  • L’interdiction de faire avec les parties, en vue d’une rétribution, des conventions aléatoires subordonnées à l’issue des procès ;
  • L’interdiction de refuser ou de négliger la défense des prévenus et l’assistance aux parties dans les cas où ils sont désignés ;
  • L’interdiction d’accepter de défendre tour à tour les intérêts opposés dans une même cause ;
  • L’interdiction de révéler les secrets qui leur sont confiés en raison de leur profession ou d’en tirer eux-mêmes un parti quelconque ;
  • L’interdiction de faire état à l’audience d’une pièce non communiqué à l’adversaire ;
  • L’interdiction de faire toute démarche, d’avoir toute conduite susceptibles de compromettre leur indépendance ou leur moralité.

b) DEVOIRS

  • Conduire chaque affaire avec célérité et compétence ;
  • De ne pas se rendre au domicile de ses clients, sauf en cas d’urgence ou de nécessité ;
  • De se présenter au Président de l’audience, à l’Officier de Ministre public, au Bâtonnier et aux confrères chargés des intérêts adverses lorsqu’il est appelé à plaider devant une juridiction extérieure au ressort de son barreau ;
  • De restituer, sans délai, les pièces ou sommes dont il est dépositaire dès qu’elles ne lui sont plus nécessaires pour la défense de la cause.

G. LES PROFESSIONS INCOMPATIBLES AVEC L’EXERCICE DE LA PROFESSION D’AVOCAT

La profession d’avocat est incompatible avec l’exercice de toute activité de nature à porter atteinte à l’indépendance et au caractère libéral de la profession d’avocat. Il s’agit de :

  • Toute fonction permanente de l’ordre judiciaire ou administratif qui ne serait pas gratuite ;
  • Tout emploi à gage qui créerait un lien de subordination ;
  • Toute espèce de négoce qu’il soit exercé directement ou par personne interposée.

Toutefois, la profession d’avocat n’est pas incompatible avec l’enseignement du droit dans une université ou dans une école supérieure.

Par ailleurs, tout avocat qui, hors les cas prévus à l’alinéa 2 de l’article précédent, se propose d’exercer une activité extérieure à celle de sa fonction est tenu d’en aviser le conseil de l’Ordre dont il relève, avant tout exercice de cette activité. Il joint à sa déclaration tout document et toute information utile quant à la nature de l’activité et les conditions dans lesquelles il se propose de l’exercer.

H. LES HONORAIRES DES AVOCATS

Les honoraires des avocats comprennent es frais dus pour la postulation  et les actes de procédure et les frais de consultation et de plaidoirie.

I. REGIME DISCIPLINAIRE DES AVOCATS

Toute contravention aux lois et règlements, toutes infractions aux règles professionnelles, tout manquement à la probité, à l’honneur ou à la délicatesse, même se rapportant à des faits extraprofessionnels, exposent l’avocat qui en est l’auteur aux sanctions disciplinaires suivantes :

- L’avertissement ;

- La réprimande ;

- La suspension pour un temps qui ne peut excéder une année ;

- La radiation du tableau ou de la liste de stage.

Ainsi donc, toute faute ou manquement sont réprimés par le conseil de l’Ordre siégeant comme conseil de discipline soit sur plainte ou dénonciation d’un magistrat, d’un avocat, d’un stagiaire ou de toute personne intéressée, soit d’office.

Paragraphe II. DE DEFENSEUR JUDICIAIRE

                          A. DEFINITION

Un défenseur judiciaire est un auxiliaire de la justice chargé d’assister ou de représenter les parties, postuler, plaider et conclure devant les Tribunaux de paix et les Tribunaux de grande instance au nom de leurs clients.

En effet, il ne peut exercer son ministère que devant les Tribunaux de grande instance auprès desquels ils sont été inscrits, ainsi que devant les Tribunaux de paix faisant partie du ressort desdits tribunaux. Par contre, sur décision du Premier président de la Cour d’Appel, le défenseur judiciaire peut être admis à plaider devant tous les Tribunaux de paix et de Grande instance du ressort de la Cour d’appel dans lequel se trouve le Tribunal de grande instance auprès duquel il est inscrit.

Par ailleurs, il est formé au siège de chaque Tribunal de grande instance, un tableau de défenseurs judiciaires admis à exercer leurs ministères dans le ressort du tribunal.

B. CONDITIONS D’ACCESSION A LA PROFESSION DES DEFENSEURS JUDICIAIRES

Les conditions suivantes sont exigées pour être inscrit au tableau du corps de défenseurs judicaires, à savoir :

  • Etre congolais ;
  • Etre titulaire d’un diplôme de gradué en droit délivré par une université du Congo ou d’un diplôme équivalent ;
  • N’avoir pas été condamné pour des agissements contraires à l’honneur, à la probité et aux bonnes mœurs ;
  • N’avoir pas fait l’objet de sanction disciplinaire ou administrative de destitution, de radiation ou de révocation, pour des agissements contraires à l’honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs.

C. DROITS ET DEVOIRS DES DEFENSEURS JUDICIAIRES

Les défenseurs judiciaires jouissent de toutes les prérogatives reconnues aux avocats (droits, honoraires, etc…) Toutefois, ils portent à l’audience une robe noire sans chausse mais avec le rabat blanc.

En tant qu’auxiliaires de la justice, toutes les interdictions faites aux avocats sont applicables aux défenseurs judiciaires (interdictions, incompatibilité, etc...).

D. REGIME DISCIPLINAIRE DES DEFENSEURS JUDICIAIRES

Toute contravention aux lois et règlements, toutes infractions aux règles professionnelles, tout manquement à la probité, à l’honneur ou à la délicatesse, même se rapportant à des faits extraprofessionnels, exposent le défenseur judiciaire qui en est l’auteur aux sanctions disciplinaires suivantes :

- L’avertissement ;

- La réprimande ;

- L’interdiction d’exercer pour un temps qui ne peut excéder une année ;

- La radiation du tableau des défenseurs judiciaires.

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1 Publié par Muanza
07/02/2024 02:41

En lisant cette ouvrage, je me revue en L2 Droit Public de l'université de Mwene-Ditu, entrain d'étudier l'éthique et la déontologie des avocats et des magistrats

2 Publié par Le sage
21/02/2024 08:31

Je suis ravie , d'avoir lu cette page qui m'a donné une ouverture par rapport au multiple préoccupation que j'avais sur l'exercice de la profession d'avocat et ceux de défenseur judiciaire

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A propos de l'auteur
Blog de Edmond MBOKOLO ELIMA

MBOKOLO ELIMA Edmond, Magistrat, Officier du Ministère Public et Substitut du Procureur de la République

Ancien avocat au Barreau de l'Équateur, Enseignant à la Faculté de Droit de l'Université de Mbandaka et Apprenant en D. E. S à la Faculté de droit de l'Université de Kisangani et Chercheur en droit à l'Université de Kinshasa. 

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